Albert Schweitzer, Prix Nobel de la paix

Publié le 5 décembre 2003 Lecture : 3 minutes.

Le vainqueur du plus prestigieux des prix était absent ce jour-là, le 10 décembre 1953, pour la meilleure des raisons. Celle qui lui avait valu d’être couronné Prix Nobel de la paix : son engagement médical envers les plus défavorisés d’Afrique. Albert Schweitzer était retenu à Lambaréné, au Gabon, dans son hôpital. Mais il avait mandaté l’ambassadeur de France en Norvège, lui demandant de lire un message dans lequel il exprimait sa gratitude, son regret de ne pouvoir être présent et son intention de se rendre à Oslo le plus tôt possible. Le lauréat du prix Nobel de la paix 1952, exceptionnellement attribué en 1953, ne viendrait recevoir sa récompense que le 4 novembre 1954.

C’est une foule en liesse qui, selon le New York Times du 3 novembre 1954, attend le septuagénaire lors de son arrivée à Oslo. Selon le quotidien, jamais un nobélisé n’avait soulevé autant d’enthousiasme. La veille de la cérémonie de remise du prix, les Norvégiens avaient formé une longue file d’attente pour obtenir des tickets leur permettant d’écouter le discours de Schweitzer. Cinquante minutes d’allocution en français pendant lesquelles l’auditoire a été touché par le calme et le sérieux du nobélisé. Accompagné de son épouse, Hélène, Schweitzer a dédié son prix, « un honneur redoutable », dira-t-il, au « problème de la paix ». Une notion que l’homme, récompensé pour son engagement humanitaire, a également abordée sous ses autres casquettes de théologien et de philosophe.
Né en 1875, en Alsace, Albert Schweitzer entreprend des études de théologie en 1893. Il obtient un doctorat en philosophie en 1899. En 1900, il est théologien et commence à prêcher à l’Église protestante Saint-Nicolas de Strasbourg. Pendant cette période, il devient également un organiste internationalement réputé. Une passion qui lui permettra de financer ses études de médecine. Pourquoi une vocation si « tardive » ? Simplement parce qu’« il avait le sentiment de ne pas avoir le droit d’accepter son bonheur comme une chose naturelle, mais qu’il fallait donner quelque chose en échange », confiait-il. Un « quelque chose » qui devait être une « action personnelle et indépendante », concrétisée par le choix d’être missionnaire. Diplômé en 1913, il part en Afrique-Équatoriale française, devenue le Gabon, et y fonde un hôpital à Lambaréné, au bord du fleuve Ogooué. Il y soigne gratuitement, avec les moyens du bord, les habitants de cette région où foisonnent les épidémies. En 1924, une léproserie pouvant accueillir trois cents malades ouvre à Lambaréné. L’hôpital, lui, est passé de quelques lits en 1914 à cinquante-six en 1963.
Malgré l’admiration qu’il suscitait, Schweitzer avait quelques détracteurs qui l’accusaient d’agir en colon. Raciste, il ne l’était certainement pas, tant son engagement antinazi en 1940 était sans équivoque. Sexiste ? Peut-être : il est vrai qu’il a interdit à sa fille d’étudier la médecine, mais ce comportement n’était pas rare à l’époque.

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Si Schweitzer retournait souvent en Europe pour donner des récitals, ces voyages étaient dictés par la nécessité de financer son centre hospitalier. Petit à petit, d’autres donateurs privés et des fondations participèrent à l’entretien de Lambaréné. L’Institut Nobel également : les 33 000 dollars accordés au lauréat du Nobel de la paix ont été directement versés au budget de son hôpital. Et malgré les critiques, minoritaires, formulées après le décès de Schweitzer en 1965 et soulignant qu’il exerçait une médecine autoritaire et primitive, il semblerait que l’Académie Nobel ne se soit pas fourvoyée en lui accordant ce prix. Depuis, d’autres acteurs de l’humanitaire, comme Médecins sans frontières en 1999, ont été eux aussi consacrés un 10 décembre, à Oslo.

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