Nord du Mali : la guerre est déclarée entre le MNLA et Iyad Ag Ghali
Entre l’unité anti-terroriste du MNLA et le groupe jihadiste Ansar Eddine de Iyad Ag Ghali, la guerre est déclarée dans la région de Kidal. Les deux frères ennemis règlent leurs comptes loin des caméras, dans la plus grande discrétion.
Comment tout a commencé…
C’est en janvier 2014, à Aguelhok (160 km, au nord de Kidal), que les premiers heurts surviennent. Une unité du Mouvement national pour la libération de l’Azawad (MNLA) chargée de la lutte contre le terrorisme et dirigée par Sidi Mohamed Ag Saïd, alias Trois-Trois, arrête quatre membres d’Ansar Eddine, accusés de poser des mines sur les axes routiers entre Aguelhok et Kidal.
Ces jihadistes sont d’abord présentés aux soldats tchadiens de la Minusma avant d’être amenés dans la cour d’une maison d’Aguelhok ou des femmes, des enfants et des hommes se sont rassemblés pour profiter du spectacle. Dans la tradition touarègue, c’est l’humiliation ultime. « Notre mission est de détruire les terroristes qui tuent nos populations et occupent illégalement nos terres. Nous allons continuer à combattre avec nos hommes, nos armes, nos véhicules », explique Trois-Trois, dont le coup d’éclat provoque la fureur de Iyad Ag Ghali. Celui-ci réagit en mettant la tête à prix.
Iyad Ag Ghali se ravise, mais Trois-Trois ne fléchit pas
Quelques mois plus tard, « Bilal Ag Cherif, le secrétaire général du MNLA, se déplace discrètement dans la région de Kidal pour rencontrer un marabout qui va jouer le rôle d’intermédiaire en demandant à Iyad Ag Ghali de renoncer à sa décision. Ce que ce dernier « finit par accepter, à condition que Trois-Trois ne recommence plus », dit un haut cadre de la rébellion touarègue, membre du Haut conseil pour l’unité de l’Azawad (HCUA). Mais les actions de cette unité anti-terroriste du MNLA, composée de 250 hommes et placée sous le commandement direct de Mohamed Ag Najim, chef d’état-major du MNLA, ne s’arrêtent pas là.
Car Trois-Trois et ses compagnons continuent de plus belle leur traque des jihadistes qui écument le nord et le nord-est de Kidal. Le 19 novembre dernier, près de Boghassa, ils interceptent huit motards d’Ansar Eddine. « Quatre sont éliminés sur le champ, les quatre autres sont conduits à Kidal, au camp de Barkhane, avec leurs armes et appareils de communication », dit le cadre du HCUA. « Nous partageons nos informations avec les forces internationales sur place », explique un autre membre de l’unité anti-terroriste du MNLA.
La réplique de Ansar Eddine, qui dispose d’environs 250 à 300 jihadistes, ne se fait pas attendre
Depuis 2014, « nous avons détruit 14 polices islamiques (hisba), dans les zones de Abaibara, Aguelhok, Tessalit et Boghassa. Nous avons récupéré 16 véhicules de terroristes et environs 60 motos, ainsi que des armes et des appareils comme des téléphones », explique la même source, qui a dû quitter la région à cause de la menace jihadiste accrue depuis quelques semaines. La réplique de Ansar Eddine, qui dispose d’environs 250 à 300 jihadistes basés essentiellement à Abeibara, Boghasse et Tenessako, ne se fait pas attendre.
Multiplication des affrontements et des enlèvements
Le 24 décembre dernier à Talahadak, près de la frontière avec l’Algérie, ils attaquent un poste du MNLA et le lendemain, dressent une embuscade mortelle à un convoi du même groupe dans la région de Kidal. Dans les combats, le petit frère de Bilal Ag Cherif et celui de Trois-Trois trouvent la mort. Le bilan de ces deux attaques est de 21 morts du côté du MNLA et de 15 morts pour Ansar Eddine, qui retient en outre une vingtaine de prisonniers.
« L’attaque a permis la libération des prisonniers moudjahiddines et la récupération de véhicules et d’armes », annonçait Ansar Eddine dans communiqué publié sur des sites jihadistes, le 28 décembre dernier. Dans le même document, le groupe terroriste s’en prend directement à Trois-Trois qu’il accuse d’être l’agent des Occidentaux. Depuis janvier, les armes se sont tues, mais les enlèvements se multiplient comme en témoigne celui, cette semaine à Kidal, d’un enfant de 13 ans, fils d’un des chefs de l’unité terroristes du MNLA. « Aucun pays ne nous aide, la Minusma ne nous donne même pas de l’eau à boire alors que nous luttons contre un fléau international », déplore de son côté Trois-Trois.
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