Les cinq défis du football togolais
Le nouveau bureau de la fédération togolaise de football est entré en fonction lundi. L’équipe dirigée par le colonel Guy Akpovy devra faire face à cinq principaux défis pour redresser une situation catastrophique.
L’élection attendue depuis plus d’un an à la fédération togolaise de football s’est finalement tenue samedi 13 février. Choisie pour insuffler une nouvelle dynamique aux acteurs du ballon rond dans le pays, la liste « nouvel élan » du colonel Guy Akpovy s’est mise au travail lundi. Avec de nombreux chantiers en perspective.
De fait, depuis la qualification historique des Éperviers à la phase finale de la Coupe du monde en Allemagne en 2006, le football togolais, miné par des crises à répétition, est à l’agonie. En dix ans, seul le bureau de Gabriel Améyi (2010-2014) a pu parvenir au bout de son mandat, malgré des querelles internes et la démission de plusieurs de ses membres. Le comité de normalisation qui lui a succédé n’aura finalement jamais pu respecter sa feuille de route.
Aucun championnat majeur n’a par exemple été organisé sous son mandat. C’est le second comité de normalisation, présidé par Horacio Freitas, ancien ministre des Sports, qui réussira à faire voter les statuts de l’instance et organiser de nouvelles élections. Guy Akpovy, ancien patron de la gendarmerie, propulsé par les délégués à la tête du football togolais, devra désormais relever cinq défis principaux pour remettre le Togo dans le concert des grandes nations du sport roi en Afrique.
Reconstruire l’équipe nationale
En 2005, ils ont fait rêver toute une nation en se qualifiant pour la première fois à une phase finale de Coupe du monde. Depuis, les Éperviers font difficilement de bons résultats. Le dernier en date reste la qualification pour un quart de finale lors de la Coupe d’Afrique des nations (CAN) en 2013.
La convocation des cadres en sélection est depuis cette date un casse-tête chinois pour les sélectionneurs qui se succèdent. « Les joueurs ne souhaitent plus faire de sacrifices alors que les conditions nécessaires ne sont jamais réunies pendant les matchs de la sélection », témoigne un Épervier dépité. Qui reconnaît que « lorsque Emmanuel Adebayor tousse, c’est toute l’équipe qui est enrhumée ».
La participation de l’emblématique capitaine des Éperviers aux matchs internationaux est à chaque fois un véritable problème à résoudre. Ce qui a tendance à agacer certains de ses coéquipiers. Même si Adebayor a toujours montré une fidélité absolue au maillot togolais, le bureau de la fédération devra rebâtir une équipe autour de nouveaux cadres, pour ramener la sérénité dans les rangs de la sélection.
Donner des moyens à l’entraîneur de la sélection
Les sélectionneurs notamment étrangers qui se sont succédé ces dix dernières années se sont toujours plaint de leurs conditions de travail. Absence d’une direction technique efficace, difficultés de repérer des talents par la prospection dans les divers championnats internationaux… Conséquence : les listes de joueurs convoqués se suivent et se ressemblent souvent, sans évolution notable.
« La sélection de joueurs locaux ne s’entraîne pas suffisamment et peine donc à constituer une réserve solide pour l’équipe A », explique Laté Lawson, membre du staff d’une équipe de première division. Et le ministre des Sports, Guy Madjé Lorenzo, a clairement demandé à la nouvelle équipe de mettre rapidement en place « une direction technique nationale efficace dans de brefs délais ». Mais le véritable problème est de nommer un technicien consensuel, qui fasse l’unanimité dans les vestiaires ainsi que dans les tribunes.
Relancer les championnats
Le désarroi des joueurs des championnats des premières et deuxièmes divisions du Togo est immense. Depuis octobre 2014, les compétitions sont aux arrêts et les joueurs au chômage technique. Certains, comme Koffi Amétépé, milieu de terrain de l’Etoile Filante de Lomé, sont obligés de travailler comme taxi-moto pour joindre les deux bouts.
Conséquence : les sélectionneurs des équipes A et B n’ont plus d’éléments d’appréciation pour recruter de nouveaux joueurs locaux. Le Togo a d’ailleurs été absent du dernier CHAN (Championnat d’Afrique des nations), faute d’avoir pu se qualifier. Les clubs manquent de ressources, et sont obligés de jouer les rares compétitions à trois ou à quatre pour maintenir leurs effectifs en forme. Cercle vicieux : ils n’ont pas non plus les moyens de payer leurs employés, faute de compétitions et donc de subventions de la fédération.
Assainir les finances de la fédération
« La plupart des problèmes des précédentes équipes de la fédération tournent autour de l’argent », explique Augustin Noukafou, journaliste à Lomé. De nombreuses irrégularités relevées dans les comptes de la fédération lors d’un audit commandité par la Fifa ont conduit cette dernière a retirer la signature à Gabriel Améyi en décembre 2012. Le président de l’époque, critiqué même à l’intérieur de son bureau notamment par ses deux vices-présidents, n’a jamais pu reprendre la main sur la gestion des comptes de la fédération jusqu’à la fin de son mandat en 2014. L’équipe qui a succédé à ce bureau n’a pas fait mieux. Le ministère des Sports attends toujours le rapport financier du premier comité de normalisation qui a géré la fédération entre décembre 2014 et décembre 2015. Et le nouveau bureau devra mettre de l’ordre dans la gestion des fonds pour bénéficier des prochaines subventions de la Fifa et de ses partenaires.
Assurer de bons rapports avec l’État
Même si la Fifa interdit toute ingérence des États dans les affaires des fédérations affiliées, les pouvoirs publics apportent leurs contributions – notamment financière – au développement des sports dans le pays. Or, les relations entre les différentes équipes de gestion du football qui se sont succédé ces dix dernières années et l’État togolais sont souvent tendues. Ceci s’exprime par les réticences du gouvernement à décaisser des subventions, et parfois à signer les contrats avec l’encadrement technique de l’équipe nationale. L’actuel sélectionneur Tom Saintfiet a d’ailleurs attendu plus de deux mois pour signer son contrat, en juillet 2015. Il est donc nécessaire d’apaiser les rapports entre l’État et la fédération. Le nouveau bureau de la Fédération togolaise de football (FTF) y parviendra-t-il ?
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