Gabon – Augustin Moussavou King : « Je ne pourrai jamais me rallier à un ancien membre du PDG »
Programme électoral, union de l’opposition, ambiance de campagne… À quelques jours de l’élection présidentielle au Gabon, le 27 août prochain, les candidats qui affronteront Ali Bongo Ondimba expliquent leurs propositions à Jeune Afrique. Parmi eux, Augustin Moussavou King.
Le leader du Parti socialiste gabonais (PSG) sera à nouveau sur la ligne de départ. Car comme d’autres candidats, Augustin Moussavou King, 56 ans, refuse de se ranger derrière Jean Ping, après les ralliements inattendus de Casimir Oyé Mba et de Guy Nzouba-Ndama. « J’irai jusqu’au bout », assure-t-il. Interview.
Jeune Afrique : Le Gabon va-t-il mieux en 2016 qu’en 2009 ?
Augustin Moussavou King : Non. Nous connaissons les mêmes aspérités politiques et économiques. Le Gabon va moins bien qu’en 2009 car le baril de pétrole, c’est-à-dire le poumon de notre économie, s’est effondré. L’indice de développement humain n’a pas changé et les citoyens vivent toujours dans la misère.
Si vous êtes élu, quelle sera votre première mesure ?
Je suis convaincu que mon heure est arrivée. Aujourd’hui, je suis le seul à avoir un projet de société chiffré. La première mesure sera de prendre des décrets pour lancer tout de suite mon projet de cité marchande, c’est-à-dire la construction d’un million de logements et d’un million de commerces pour améliorer tout de suite le quotidien des Gabonais.
J’irai jusqu’au bout
L’opposition est-elle en ordre de bataille pour remporter l’élection ?
Il y a deux types d’opposants. Moi, je suis opposant au système depuis que je suis étudiant. Nous avons d’autres opposants, qui s’opposent beaucoup plus à l’homme Ali Bongo Ondimba qu’au système. Je parle des anciens pédégistes [adhérents au Parti démocratique gabonais, PDG, au pouvoir, NDLR] Jean Ping, Casimir Oyé Mba et Guy Nzouba-Ndama.
J’ai toujours dit que je ne pourrai jamais me rallier à un ancien membre du PDG. Le Gabon est dans cette situation parce que ceux-là ont participé à plonger le pays dans ce marasme. Après avoir si longtemps critiqué et dénoncé cette situation, je ne me vois pas me ranger derrière ceux qui en sont à l’origine. Tant qu’à faire, autant entrer au PDG ! J’irai jusqu’au bout.
Une union de l’opposition est souhaitable si nous pouvons rassembler les convictions. À l’heure actuelle, ce n’est pas possible.
Le Gabon est-il selon vous toujours trop dépendant du pétrole ?
Oui. Le pétrole est l’élément cardinal de notre économie, en dépit de tout ce qui est dit sur la diversification économique. Et je ne vois pas comment le Gabon pourrait remplacer un produit qui compte à lui seul pour 70% de l’économie avec des initiatives comme Graine [programme agricole lancé par Ali Bongo Ondimba, NLDR]. Le président actuel, qui a échoué avec un baril à 115-120 dollars, ne peut pas faire de miracles avec un baril de pétrole à 40 dollars.
Comment qualifieriez-vous l’ambiance de cette campagne électorale ?
J’ai déjà été candidat. Je sais qu’il n’y a pas de campagne sans choc. Il faut simplement que les gens comprennent que la fonction présidentielle est une fonction de dignité. Je voudrais interpeller le chef de l’État pour qu’il montre l’exemple et qu’il se mette au dessus de toutes les critiques, comme il l’a fait au début de son mandat. Car je crois qu’il joue le jeu des insultes et de l’invective, et ce n’est pas bon qu’un chef descende à ce niveau.
Notre problème n’est pas de savoir si Ali Bongo est Gabonais ou pas
Concernant la polémique sur l’acte de naissance, j’ai déjà dit qu’Ali Bongo est Gabonais. Notre problème n’est pas de savoir s’il est Gabonais ou pas. Notre problème est de l’indexer sur le fait que lui-même a dit qu’il a produit un acte de naissance faux.
Nous sommes dans un pays friand de kongossa [rumeurs, NDLR]. Comme je ne suis pas avec les autres, on dit que je suis le candidat d’Ali Bongo. On dit aussi que c’est lui qui financerait ma campagne. C’est faux. Ce climat délétère est entretenu. Peut-on faire mieux ? Je ne sais pas trop, mais il faut affronter la campagne et nous verrons ce que cela va donner.
En matière de diplomatie, quel partenaire souhaiteriez-vous privilégier, si vous accédiez au pouvoir ?
La France, sans aucune doute. Car c’est la nation avec laquelle nous sommes le plus proche et c’est la terre des droits de l’Homme. Par ailleurs, je souhaite mener à bien avec la France mon plan d’alternance, mon plan Marshall. Évidemment, il y en aura d’autres car un projet de 23 000 milliards de Francs CFA [près de 35 milliards d’euros, NDLR] intéresse beaucoup de partenaires.
Êtes-vous partisan d’une réforme du scrutin électoral ?
Oui. Je suis partisan d’un scrutin à deux tours et je suis également favorable à la suppression d’un certain nombre d’institutions de la République que je trouve fantaisistes et qui ne jouent aucun rôle.
Les lois doivent être pratiques et pragmatiques
Lesquelles ?
La Cenap doit par exemple être supprimée, tout comme plusieurs institutions budgétivores.
Par ailleurs, je viens de payer 20 millions au trésor public [les candidats à l’élection présidentielle doivent déposer une caution de 20 millions de francs CFA, soit 30 400 euros, NDLR], mais l’État ne finance pas l’élection présidentielle. C’est une énormité et une incongruité insondable. Il faut mettre en place un mécanisme permettant aux candidats jugés crédibles d’être financés et que l’État participe au financement des candidatures.
Je pense aussi que l’article 10 de la Constitution [qui définit les conditions d’éligibilité pour l’élection présidentielle, NDLR], dont les contours sont diffus, devrait être revu. Au Gabon, il faut être Gabonais depuis quatre générations. C’est trop compliqué : qui sera là pour juger de tout cela et de la quintessence de la génération de quelqu’un ? Les lois doivent être pratiques et pragmatiques.
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