Burkina : ce que la justice reproche au colonel Barry

Interpellé vendredi dernier par la gendarmerie à Ouagadougou, le colonel Auguste Denise Barry, proche de l’ancien Premier ministre sous la Transition, Yacouba Isaac Zida, en fuite au Canada, a été écroué mercredi soir à la Maison d’arrêt et de correction de armées (Maca), où sont incarcérés les auteurs présumés du putsch raté de 2015. Il pourrait être inculpé formellement dans les prochains jours.

Le colonel Auguste Denise Barry sur le plateau de la RTB en septembre 2017. © Capture d’écran/Youtube /RTB

Le colonel Auguste Denise Barry sur le plateau de la RTB en septembre 2017. © Capture d’écran/Youtube /RTB

Publié le 4 janvier 2018 Lecture : 3 minutes.

Ironie du sort : le colonel Auguste Denise Barry, ancien ministre de l’Administration territoriale et de la Sécurité sous la Transition politique, croupit depuis mercredi 3 janvier 2018 à la Maca, aux côtés des auteurs présumés du coup d’État raté de mi-septembre 2015 perpétré par le général Diendéré et l’ex-Régiment de Sécurité présidentielle. Soupçonné d’avoir fomenté une tentative de déstabilisation du pouvoir du président Roch Marc Christian Kaboré, celui qui dirigeait jusqu’ici le Centre d’études stratégique en défense et sécurité (CESDS) pourrait être inculpé formellement dans les prochains jours.

Mais peu d’informations filtrent sur le détail des faits reprochés au colonel Barry ou sur d’éventuelles complicités dans les milieux civil et militaire. Si plusieurs sources sécuritaires affirment sous couvert de l’anonymat, que l’ancien ministre de la Sécurité était prêt à passer à l’acte, le flou subsiste sur les contours du projet dont Barry est soupçonné d’être l’instigateur. Vendredi, le procureur militaire a publié un communiqué sur cette affaire qui défraie la chronique au Burkina, indiquant que l’intéressé était soupçonné « d’atteinte à la sûreté de l’État » et qu’une information judiciaire avait été ouverte contre lui pour les chefs de « complot et d’incitation à la commission d’actes contraires à la discipline et au devoir ».

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Pas de nouvelles arrestations

D’après une source judiciaire, jointe par Jeune Afrique, la tentative de déstabilisation pouvait déboucher sur deux possibilités : coup d’État ou rébellion. « Si on attaque le pays, c’est une déstabilisation. Idem si l’on vise les autorités. Mais jusqu’ici, ces dernières ne sont pas précises dans leurs déclarations », déclare cette source, s’étonnant que ce soit une seule personne qui soit inquiété. « Il n’y a pas eu de nouvelles arrestations pour le moment. Le dossier est désormais entre les mains du juge », a déclaré mercredi à Jeune Afrique une source proche de l’enquête.

Le think-thank de Barry préparait activement la publication d’un rapport sur le terrorisme au Burkina Faso

Outre l’accusation de déstabilisation, Barry pourrait se voir également reprocher l’atteinte au moral de la troupe ou encore la divulgation de secret militaire. En effet, son think-thank, après avoir organisé un forum en septembre dernier sur la sécurité, préparait activement la publication d’un rapport sur le terrorisme au Burkina Faso. Le document, produit par une cinquantaine d’experts, analyse le phénomène  – qui a fait en deux ans 133 tués – sous les prismes sociologique, anthropologique et historique, dressant un sombre tableau marqué par la montée des attaques contre les forces armées dans le Nord.

Le rôle trouble de Yacouba Issac Zida

Le rapport pointe par ailleurs du doigt le sous-équipement et le manque criard d’effectifs des forces armées qu’il attribue à la fois au régime de l’ex-président, Blaise Compaoré, à la Transition politique conduite par Michel Kafando et aujourd’hui au pouvoir du président Kaboré. D’après nos informations, les enquêteurs ont entendu dans le cadre de ce dossier sensible l’ancien chef d’état-major adjoint de la gendarmerie, le colonel Serge Alain Ouédraogo, et perquisitionné les locaux du CESDS à Ouaga 2000, le quartier chic de la capitale burkinabè.

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Yacouba Isaac Zida n’est pour l’instant pas mis en cause dans le projet d’atteinte à la sûreté de l’État. C’est même le colonel Ouédraogo, lui aussi un proche de l’ancien Premier ministre, qui aurait alerté les autorités sur les projets prêtés à Barry.

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