Côte d’Ivoire : les cinq freins à une éventuelle alliance PDCI-FPI
L’éventualité d’une alliance entre le Front populaire ivoirien (FPI de Laurent Gbagbo, principal parti d’opposition) et le Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI, parti d’Henri Konan Bédié, membre de la mouvance présidentielle) est désormais sur la table en Côte d’Ivoire. Pour l’instant, cinq raisons rendent pourtant cette liaison hypothétique.
La rencontre le mercredi 24 janvier entre Henri Konan Bédié, président du Parti démocratique de Côte d’Ivoire, et Pascal Affi N’Guessan, président de l’une des deux tendances du Front populaire ivoirien, a été un signe interprété comme une éventuelle future alliance du PDCI et du FPI.
« En ce qui concerne une alliance avec le PDCI-RDA, c’est notre volonté, c’est notre aspiration, parce qu’en Côte d’Ivoire, le jeu politique se déroule autour de la question des alliances. Les deux partis qui se mettent ensemble sont assurés de gagner l’élection présidentielle. » Initiateur de la rencontre avec Bédié, Affi N’Guessan milite ouvertement pour cette alliance. Seulement voilà, plusieurs obstacles rendent, pour l’instant, cette alliance hypothétique.
1. Opposition historique
Historiquement le PDCI et le FPI ont toujours été opposés. Laurent Gbagbo a été le premier opposant à se porter candidat, en 1990, face à Félix Houphouët-Boigny, l’un des « pères fondateurs » du PDCI.
En 2000, après le coup d’État qui a porté au pouvoir le général Robert Gueï, les deux partis alors dirigés par Laurent Gbagbo et Laurent Dona Fologo ont tenté de créer un Front patriotique, après la mort de fait du Front républicain (alliance du FPI et du Rassemblement des républicains – RDR d’Alassane Ouattara).
Cette alliance a duré le temps d’une conférence de presse conjointe…
2. Opposition idéologique
La deuxième raison est liée aux idéologies des deux partis. Le FPI est un parti se réclamant de la gauche socialiste, tandis que le PDCI se range dans le champs d’un centre-droit libéral.
Seul point idéologique commun entre les deux formations : les idées nationalistes, qui ont été défendues par les deux partis au cours de leur histoire.
3. Opposition politique
La troisième raison est politique et se résume aux courants internes qui traversent les deux partis. Si la tendance du FPI conduite par Affi est prête à nouer une alliance avec le PDCI, il n’est pas sûr qu’au PDCI, tout le monde soit favorable à ce rapprochement.
Certes, certains responsables de ce parti, à l’instar de Noël Akossi Bendjo, le puissant maire du Plateau (commune d’Abidjan) ont apporté publiquement leur soutien à la rencontre début janvier, entre les jeunes des deux formations politiques, qui a précédé la rencontre entre Affi et Bédié.
« Au PDCI, de nombreux militants ne sont pas encore disposés à valider une alliance avec le FPI, j’en fais partie », confie un délégué départemental du PDCI, ancien député.
La grande inconnue de l’équation reste la réelle position de Bédié, sur la question de l’alliance. Le vieux dirigeant (84 ans), encore combatif, a fermement rappelé qu’il est le seul qui « dicte la ligne politique du parti ». Et il n’a encore rien laissé paraître de ses intentions.
4. Opposition tactique
La quatrième raison est d’ordre tactique. Le PDCI a bien conscience que s’il noue une alliance avec la tendance minoritaire – trois députés à l’Assemblée nationale sur 255 – du FPI, au pire le RDR cherchera à nouer une alliance improbable avec la tendance, théoriquement majoritaire, du FPI conduite par Aboudramane Sangaré, au mieux il renforcera son alliance avec l’Union pour la démocratie et la paix en Côte d’Ivoire (UDPCI d’Albert Toikeusse Mabri, avec ses six députés) et des petits partis de la mouvance présidentielle, comme le Mouvement des forces d’avenir (MFA d’Azoumana Moutayé).
5. Opposition stratégique
La dernière raison est en rapport avec l’objectif stratégique des deux partis. Dans l’absolu, tous les deux aspirent à diriger le pays, en s’offrant la présidence de la République, en 2020.
Cependant, pour le FPI toutes tendances confondues, cet objectif passe par l’utilisation d’un moyen qui laisse jusque-là le PDCI indifférent : la libération de Laurent Gbagbo, détenu depuis plus de six ans à la Cour pénale internationale (CPI).
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