Tunisie : Youssef Chahed et l’UE veulent rassurer sur l’accord de libre-échange

Jean-Claude Juncker et Youssef Chahed le promettent : l’accord de libre-échange complet et approfondi (Aleca) entre la Tunisie et l’Union européenne sera signé en 2019. Pourtant, le chemin semble encore long pour une adoption pleine et entière.

Youssef Chahed, chef du gouvernement tunisien, devant l’Assemblée des représentants du peuple. © Hassene Dridi/AP/SIPA

Youssef Chahed, chef du gouvernement tunisien, devant l’Assemblée des représentants du peuple. © Hassene Dridi/AP/SIPA

CRETOIS Jules

Publié le 25 avril 2018 Lecture : 3 minutes.

« Cet accord est très délicat. Nous nous sommes mis d’accord pour qu’il soit mis en oeuvre étape par étape », a indiqué Youssef Chahed, le Premier ministre tunisien, en visite à Bruxelles du 23 au 27 avril, à propos de l’accord de libre-échange complet et approfondi (Aleca) entre la Tunisie et l’Union européenne, soulignant la différence de niveau de développement entre les deux partenaires. Le Premier ministre a malgré tout assuré que l’Aleca serait signé avant la fin de l’année 2019.

Durant sa visite, Youssef Chahed s’est entretenu mardi 24 avril avec Federica Mogherini, la haute représentante de l’UE aux Affaires étrangères, et Jean-Claude Juncker, le président de la Commission européenne. Le Premier ministre tunisien a également annoncé l’augmentation du quota d’exportation d’huile d’olive en Europe de 30 000 tonnes supplémentaires sur deux ans, soit 95 000 tonnes. Une importante décision pour la Tunisie, deuxième exportateur mondial. Chahed a enfin rencontré Antonio Tajani, le président du parlement européen, qui, lors d’une visite à Tunis en octobre 2017, avait déjà longuement insisté sur l’intérêt pour Tunis de signer l’accord.

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Une société civile réticente

Si ce dernier avait tant insisté par le passé, c’est que l’Aleca suscite des réticences au sein de la société civile, à la gauche de l’Assemblée des représentants du peuple (ARP) mais aussi chez certains bourguibiens, ainsi que du côté de différents décideurs économiques. Tunis même, engagée dans des négociations avec les Européens au sujet de l’Aleca depuis octobre 2015, a pu paraître réticente à signer, à l’instar de Rabat.

L’Aleca sera une étape supplémentaire dans les liens entre la Tunisie et le marché européen. Une intégration plus poussée que celle mise en place en 1995 avec l’accord d’association entre la Tunisie et l’Union européenne. L’Aleca permettrait de libéraliser le commerce des services, de simplifier les barrières douanières et de protéger l’investissement. Les produits tunisiens devront également se mettre aux normes européennes.

L’économiste Abdeljalil Bedoui dénonçait déjà en 2016 les conditions de l’UE. « L’obligation de la stabilité financière et la facilitation de l’investissement étranger sans contrepartie profite aux pays européens et non à l’économie tunisienne », avait-t-il alors déclaré à Jeune Afrique.

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Un calendrier serré

À ces considérations, s’ajoutent des questions de calendrier. L’Aleca, avant d’être adopté, devrait être discuté à l’ARP. Or 2019 est une année électorale. Les élus auront-ils le temps d’examiner de fond en comble l’accord puis de trouver un consensus durant une année agitée ? Rien n’est moins sûr.

Enfin, confronté à de multiples oppositions, il n’est pas certain que le gouvernement de Youssef Chahed se risque à cliver au sujet de l’accord, alors même que lors du récent mouvement social, les manifestants n’ont pas caché leurs accents protectionnistes ou leur défiance à l’égard des grandes institutions internationales. Dans ce cadre, la promesse faite de signer l’Aleca d’ici 2019 ressemble plus à une intention.

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Des aides financières de l’UE depuis 2011

Youssef Chahed a également indiqué avoir discuté avec Jean-Claude Juncker « d’une meilleure gestion des aides financières de l’UE ». Si l’aide de l’UE à la Tunisie s’élève à 300 millions d’euros en 2018, elle s’échelonnait à près de 10 milliards d’euros de 2011 à 2020. Le soutien financier de l’UE implique toutefois des conditions.

En attendant, le Premier ministre poursuivra sa visite au Luxembourg et aux Pays-Bas. L’UE est le premier partenaire commercial de la Tunisie. Sur les onze premiers mois de l’année 2017, les exportations tunisiennes vers l’UE ont représenté 74,5 % des exportations totales et 53,7 % des importations tunisiennes l’ont été en provenance de l’UE. Des chiffres en hausse.

Les liens économiques restent forts, tout comme le soutien politique. Le chef de l’État tunisien a indiqué que des équipes de l’UE viendront observer le processus démocratique tunisien lors des élections municipales du 6 mai. Jean-Claude Juncker sera en visite à Tunis les 23 et 24 juillet.

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