Éthiopie : un mort et 154 blessés dans une explosion lors d’un meeting

Au moins une personne a été tuée et 154 blessées samedi par l’explosion d’une grenade lancée au milieu d’une foule immense venue écouter le Premier ministre éthiopien Abiy Ahmed dans le centre d’Addis Abeba.

Des milliers de personnes réunies le 23 juin 2018 sur la place Meskel d’Addis Abeba pour soutenir le Premier ministre Abiy Ahmed. © afp.com/SAMUEL HABTAB GEBRU

Des milliers de personnes réunies le 23 juin 2018 sur la place Meskel d’Addis Abeba pour soutenir le Premier ministre Abiy Ahmed. © afp.com/SAMUEL HABTAB GEBRU

Publié le 23 juin 2018 Lecture : 3 minutes.

Devant des dizaines de milliers de personnes réunies sur la place Meskel, Abiy Ahmed venait de finir son discours et saluait la foule quand l’explosion s’est produite, provoquant un mouvement de foule vers l’estrade et des scènes de confusion, a constaté un journaliste de l’AFP.

Le Premier ministre a quitté précipitamment les lieux sain et sauf. Il a ensuite annoncé que plusieurs personnes avaient été tuées dans l’explosion, a rapporté la radio-télévision proche du pouvoir Fana Broadcast Corporate.

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« Toutes les victimes sont des martyrs de l’amour et de la paix », a déclaré Abiy Ahmed, selon Fana. Le Premier ministre a estimé que l’incident avait été planifié par des groupes cherchant à discréditer le rassemblement et son programme de réformes. Son chef de cabinet, Fitsum Arega, a indiqué sur Twitter que l’explosion avait été provoquée par une grenade. À 15h00 locales (12h00 GMT), le ministre de la Santé Amir Aman a porté le bilan à un mort et 154 blessés, dont 10 dans un état critique, sur son compte twitter.

Il s’agissait du premier discours public à Addis Abeba de Abiy Ahmed depuis sa nomination en avril. Il en avait fait plusieurs en province, et celui-ci devait être le plus symbolique de sa campagne pour expliquer ses réformes.

Depuis sa prise de fonctions, après plus de deux années de manifestations antigouvernementales ayant coûté son poste à son prédécesseur Hailemariam Desalegn, il a impulsé des changements majeurs, libérant nombre d’opposants emprisonnés et initiant une libéralisation de l’économie.

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Il a aussi décidé de mettre un point final au différend avec l’Érythrée et opéré un important remaniement de responsables sécuritaires.

Ce rassemblement avait débuté dans le calme. Des spectateurs brandissaient des drapeaux du Front de libération oromo (OLF), un groupe armé rebelle, et une ancienne version du drapeau éthiopien, symbole des manifestations antigouvernementales.

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La police, qui par le passé arrêtait quiconque agitait de tels drapeaux, laissait cette fois faire.

Dans son discours, Abiy Ahmed, vêtu d’un tee-shirt vert et d’un chapeau, a exprimé sa gratitude à la foule et a vanté les vertus de l’amour, de l’harmonie et du patriotisme. « L’Éthiopie sera à nouveau au sommet et les fondations en seront l’amour, l’unité et le rassemblement », a-t-il notamment déclaré.

Réformes et tensions

Après l’explosion, des dizaines de personnes ont envahi la scène dans la confusion totale, et commencé à lancer des objets divers vers la police en criant: « À bas, à bas Woyane », ou « Woyane voleur », en référence au surnom péjoratif utilisé pour qualifier le gouvernement, selon le journaliste de l’AFP.

Des échauffourées ont commencé à éclater entre spectateurs et des pierres ont été lancées en direction des journalistes, qui ont dû s’abriter. La police s’est d’abord gardée d’intervenir.

Des spectateurs ont ensuite arraché un drapeau éthiopien, pour le remplacer par un drapeau de l’ethnie oromo et un drapeau éthiopien ancienne version, en criant: « C’est le drapeau que nous voulons ».

Après ces incidents, des dizaines de milliers de personnes ont continué à chanter dans le calme et à manifester leur mécontentement à l’égard des autorités. La police est finalement intervenue en lançant des gaz lacrymogène pour disperser la foule. A 12H30 (09H30 GMT), la place était complètement vide en dehors d’une forte présence policière, selon un journaliste de l’AFP.

Le nouveau Premier ministre a pris les rênes du pays à un moment où, selon de nombreux observateurs, la coalition au pouvoir depuis 1991, et à laquelle il appartient, s’est retrouvée dos au mur.

Confrontée au plus important mouvement de protestation en 25 ans et à la mobilisation des deux principales ethnies du pays (oromo et amhara), le pouvoir a d’abord répondu par la répression (plus de 1.000 morts, un état d’urgence de 10 mois), avant de lâcher du lest, avec la démission du Premier ministre Hailemariam Desalegn en février, puis la nomination de Abiy Ahmed.

Et même si ce dernier, premier chef du gouvernement éthiopien issu de l’ethnie oromo, était perçu lors de sa nomination comme un rénovateur, peu d’observateurs s’attendaient au train de réformes des dernières semaines.

Pour les analystes, la mise en œuvre de ces mesures ne se fera pas sans susciter des tensions. La promesse de Abiy Ahmed de rétrocéder à l’Érythrée des portions de territoires frontaliers a ainsi déjà suscité en Éthiopie la réprobation des Tigréens, très influents dans les cercles du pouvoir avant sa nomination.

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