Présidentielle au Mali : les arguments des candidats qui rejettent déjà les résultats
Alors que les résultats officiels au premier tour de la présidentielle malienne ne sont pas encore connus, une vingtaine de candidats, parmi lesquels les principaux challengers du président sortant Ibrahim Boubacar Keïta, ont dénoncé mercredi les résultats du scrutin qu’ils estiment « émaillé de multiples anomalies ».
Mali : sur un air de campagne présidentielle
Vingt-quatre candidats sont en lice pour l’élection présidentielle du 29 juillet au Mali. Le président sortant, Ibrahim Boubacar Keïta, cédera-t-il sa place ? Soumaïla Cissé, son principal rival, arrivera-t-il à s’imposer ? Quelles alliances les candidats ont-ils nouées ? Retrouvez notre dossier complet.
« Bourrage d’urnes », « achat de votes »… Les mots sont durs. Les accusations sont graves, et les mines également. Dans une salle surchauffée de la maison de la presse de Bamako, Mohammed Aly Bathily, candidat à la présidentielle, prend la parole : « Nous nous demandons si le scrutin du 29 juillet était une consultation électorale ou un marché électoral !». Tonnerre d’applaudissement.
La conférence de presse tourne presque au meeting politique. Soumaïla Cissé, Aliou Diallo, Mamadou Igor Diarra, Housseiny Amion Guindo, Kalfa Sanogo… Ils sont une vingtaine de candidats, ou leurs représentants, à se serrer à la tribune, affichant un front commun. L’objectif : dénoncer d’une même voix les résultats du scrutin, avant même leur publication, qui doit théoriquement être effective dans les cinq jours suivant la tenue du scrutin. Soit au plus tard vendredi.
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« Corruption » et « achat d’électeurs »
Parmi les « graves anomalies » que les challengers du président sortant dénoncent en chœur : « La corruption et l’achat du vote des électeurs », et « l’utilisation abusive des moyens de l’État » au service du candidat IBK.
Sur l’utilisation des moyens de l’État, nous sommes scrupuleux. Nous sommes sur un pied d’égalité avec tous les autres candidats
Joint par Jeune Afrique, Mahamadou Camara, porte-parole d’Ibrahim Boubacar Keïta, s’en défend. « Sur l’utilisation des moyens de l’État, nous sommes scrupuleux. Depuis le 7 juillet, date d’ouverture de la campagne, nous n’avions pas plus de trois sujets dans le JT de l’ORTM [chaîne publique nationale, ndlr]. Nous sommes sur un pied d’égalité avec tous les autres candidats », assure-t-il.
Il réfute également les allégations de corruption d’électeurs, et renvoie l’accusation. « Nous avons même des images sur lesquelles on peut voir des partisans de l’URD [le parti de Soumaïla Cissé, ndlr] corrompre des électeurs ! », accuse-t-il, promettant de « saisir la Cour constitutionnelle après la proclamation des résultats provisoire ».
Publication de la liste des bureaux où le vote n’a pas pu se tenir
Les candidats sont revenus à la charge pour exiger la publication de la liste exhaustive des bureaux où le vote n’a pas pu se tenir. Suite aux incidents et violences qui ont émaillé le scrutin de dimanche, en particulier dans le Nord et le Centre, le vote a en effet été impossible dans 716 bureaux, et des incidents ont été répertoriés dans 20% des bureaux sur l’ensemble du territoire, selon des chiffres publiés par la primature et le ministère de l’Administration territoriale et de la Décentralisation.
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Et les candidats réunis mercredi pour dénoncer les conditions du vote craignent des fraudes, par le biais de la comptabilisation de votes fictifs dans ces bureaux fantômes. Une inquiétude relayée par Cécile Kyengé, chef de la mission d’observation de l’UE, qui a réclamé aux autorités « la liste complète et détaillée de l’ensemble des bureaux où le vote n’a pas eu lieu » et la publication des résultats de chaque bureau sur internet dès que possible.
La Cour Constitutionnelle pointée du doigt
Les vingt candidats unis ont également remis en cause le rôle de la Cour constitutionnelle, coupable à leurs yeux d’avoir eu « une interprétation fantaisiste de la loi ».
La Cour constitutionnelle a manqué d’impartialité et de neutralité et s’est inscrite d’une manière suspecte dans le processus électoral
« Nous récusons la Cour », a même martelé Mohammed Aly Bathily, promettant par ailleurs de porter par écrit ses contestations à la Cour constitutionnelle avant la proclamation des résultats.
« Cette Cour a manqué d’impartialité et de neutralité et s’est inscrite d’une manière suspecte dans le processus électoral », a-t-il accusé. L’ancien ministre de la Justice en veut pour preuve le fait que « la généralisation des procurations s’adosse à l’avis que le gouvernement a demandé à la Cour constitutionnelle. Et c’est la Cour qui a dit qu’il était possible d’en délivrer sur la base d’une commune. »
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Au cœur de cette polémique : la question des procurations. Jeudi 26 juillet, à l’avant-veille du vote, le ministère de l’Administration territoriale et de la Décentralisation avait annoncé qu’il n’était pas nécessaire pour un mandataire d’être inscrit dans le même bureau de vote que la personne dont il détenait la procuration. Il suffisait, à en croire le MATD, que le bureau soit dans la même commune, ambassade ou consulat.
Une directive – en contradiction avec la loi électorale, qui stipule qu’il faut être inscrit dans le même bureau de vote et que « nul ne peut être détenteur de plus de deux procurations » – avait fait bondir l’opposition, déjà très remontée sur la polémique concernant le fichier électoral. L’URD venait en effet de dénoncer l’existence supposée de près de 1,2 millions d’électeurs fictifs.
In extremis, deux jours plus tard, lors de la rencontre des candidats avec le Premier ministre, la directive portant sur les règles de procuration est annulée.
Mais ce retour au texte de la loi est arrivé trop tard, estime Mohamed Aly Bathily : « Les procurations se sont retrouvées en masse dans le processus électoral, sans que l’on puisse les contrôler. » De fait, des observateurs ont fait remonter des cas de « tentative d’utilisation de plus de deux procurations par certains mandataires », citant notamment des cas dans les régions de Kayes, Mopti, Gao et Bamako.
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Front uni, mais avis divergents
Ce dernier point a cependant fait apparaître des divergences. Tous les candidats présents ne partagent pas le même avis : « Seule la déclaration commune engage l’ensemble du groupe, pour le reste, ce sont des commentaires qui n’engagent que celui qui l’a prononcé », a tenu à préciser un membre de l’équipe de campagne de Soumaila Cissé, avant d’assurer : « Nous n’allons pas non plus récuser la Cour constitutionnelle ».
Cette conférence de presse servait surtout « à franchir une étape et afficher devant la presse l’unité des candidats opposés à IBK et de renforcer les liens entre ceux qui pourraient former un front commun contre IBK en cas de second tour », affirme pour sa part une source au sein de l’équipe de campagne de Adp-Maliba. Une rencontre était prévue, ce jeudi après-midi à l’hôtel Sheraton de Bamako, en vue de l’élaboration d’une « stratégie commune » dans la perspective d’un éventuel front contre IBK au second tour.
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Mali : sur un air de campagne présidentielle
Vingt-quatre candidats sont en lice pour l’élection présidentielle du 29 juillet au Mali. Le président sortant, Ibrahim Boubacar Keïta, cédera-t-il sa place ? Soumaïla Cissé, son principal rival, arrivera-t-il à s’imposer ? Quelles alliances les candidats ont-ils nouées ? Retrouvez notre dossier complet.
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