Le repentir de « l’Emir aux yeux bleus »

Dans un entretien à Jeune Afrique depuis sa cellule de la prison de Salé, Richard Robert passe aux aveux. Son seul souhait : purger sa peine en France.

Publié le 15 avril 2009 Lecture : 2 minutes.

Richard Robert, alias Yacoub, alias Abou Abderrahmane, également connu comme « l’Émir aux yeux bleus » ou le « Mollah de Saint-Étienne », s’est-il enfin décidé à dire la vérité ? En tout cas, il le prétend, dans un entretien téléphonique à Jeune Afrique depuis sa cellule de la prison de Salé. Mais la sincérité du propos doit être jugée à l’aune des nombreux revirements de ce Français de 37 ans arrêté au Maroc en juin 2003, quelques semaines après les sanglants attentats-suicides de Casablanca (45morts, le 16 mai 2003). Présenté par les autorités marocaines comme un émir salafiste ayant pour projet de renverser la monarchie, Richard Robert, converti à l’islam depuis sa vingtième année, a été condamné à la réclusion criminelle à perpétuité en septembre 2003, après que le procureur du roi eut requis la peine de mort. Depuis son procès à Rabat et jusqu’à aujourd’hui, le Stéphanois prétendait être victime d’une « manipulation judiciaire et médiatique de la DST marocaine ». Désormais, il plaide coupable, au moins partiellement. « C’est vrai, j’ai travaillé à la constitution d’une cellule salafiste d’une quinzaine de personnes pour créer un maquis islamiste et proclamer un micro-État islamiste dans le Rif, entre Tanger et Oujda. » Alors, pourquoi avoir tout nié en bloc lors de son procès ? Pourquoi avoir mis en avant « une collaboration » avec la DST française pour infiltrer la mouvance islamiste ? D’où est venue cette thèse, développée dans le détail à l’audience, de son noyautage « d’une filière kurde de faux papiers opérant en Belgique » ? « Cela relevait d’une stratégie de défense pour instrumentaliser les médias internationaux, explique Robert. J’ai commis deux erreurs dans ma vie, la première, celle de m’être laissé embarquer dans l’islam, la seconde, d’avoir fait cette déclaration sur la DST à mon procès. »

En grève de la faim depuis le 20 mars, l’Émir repenti dit vouloir renouer avec « sa foi catholique et son identité française » et affirme avoir « perdu 12 kg ». Son seul souhait : « être traité comme un citoyen français ordinaire ». Et, à ce titre, bénéficier de la convention franco-marocaine de 1981, qui permet à un Français condamné au Maroc de purger sa peine dans l’Hexagone. « Si j’avais été jugé en France, j’aurais encouru au maximum dix ans de prison », précise Robert, avec l’assurance d’un expert du code pénal. Son avocat parisien, Me Vincent Courcelle-Labrousse, lui, n’évoque plus le fond du dossier. Il constate simplement que la justice marocaine « oppose la politique du silence » et « la stratégie de l’oubli » à ses demandes répétées de transfèrement en France de son client. Au président Sarkozy, il a écrit pour dénoncer « la frilosité, la gêne et le non-dit » de Paris dans ce dossier. Les derniers aveux publics de Richard Robert, qui semblent valider certaines conclusions des enquêteurs marocains, pourraient permettre à Rabat de reconsidérer enfin son cas. Et de le renvoyer dans son pays d’origine, où il s’est engagé à œuvrer pour éviter à la jeunesse de sombrer dans « l’égarement du salafisme ».

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