Tourisme : à l’heure du circuit « des hauts lieux de la révolution »
À l’occasion de la Bourse internationale du tourisme, le 17 février à Milan (Italie), l’agence de voyages tunisienne Expédition a annoncé le lancement du « premier circuit guidé des hauts lieux de la révolution ». Sur les traces des émeutes sanglantes, pourrait-on sous-titrer…
À l’origine de cette initiative qui fleure bon l’opportunisme, Souheil Mouldi, un patron tuniso-américain de 48 ans qui, en 2008 déjà, avait irrité les tenants du religieusement correct en créant un circuit du vin. Cette nouvelle initiative peut paraître choquante alors que le pays lutte encore contre les spectres de l’ancien régime. Mais, sur le fond, l’idée est-elle si incongrue ? On pourrait après tout se réjouir que vingt-trois années de bénalisme n’aient pas fait de la Tunisie une planète à part. Soweto ou Tchernobyl ne voient-ils pas chaque jour débarquer leur lot de curieux ? Quoi de plus naturel pour des lieux mythiques qui ont marqué notre histoire ? « Une manière de perpétuer le souvenir de la révolution, comme d’autres le font pour l’Holocauste à Auschwitz », justifie Mouldi, un brin provocant.
Bientôt sans doute, les Tunisois devront s’habituer à voir les touristes remonter l’avenue Bourguiba jusqu’au ministère de l’Intérieur, symbole de la répression policière du régime Ben Ali, flâner sur les avenues de Paris et Habib-Thameur, où, au plus fort de l’insurrection, les manifestants fuyaient les tirs à balles réelles. La place du gouvernement, la tour de verre du Rassemblement constitutionnel démocratique (RCD) – le parti du président déchu –, les abords du palais de Carthage et des villas du clan Trabelsi figurent aussi parmi les temps forts de cette visite de quatre à cinq heures, facturée une trentaine d’euros. S’y ajoute, pour les inconditionnels, un circuit en option aux sources de la révolte, dans les villes de Sidi Bouzid, Thala ou Kasserine.
En souvenir de leur périple, Mouldi prévoit de remettre à ses clients un CD-ROM de photos des événements. Des clichés pris par des anonymes qu’il pense glaner sur internet car, glisse-t-il, « elles sont libres de droits ».
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