Agathe Habyarimana libérée et placée sous contrôle judiciaire

La femme du président rwandais assassiné le premier jour du génocide en 1994, Agathe Habyarimana, a été arrêtée en France mardi, avant d’être libérée et placée sous contrôle judiciaire. Le Rwanda a émis un mandat d’arrêt international contre elle et souhaite son extradition pour la juger pour son implication présumée dans la planification du génocide.

Juvenal Habyarimana et sa femme Agathe le 14 avril 1977 à l’Elysée lors d’un voyage officiel © AFP

Juvenal Habyarimana et sa femme Agathe le 14 avril 1977 à l’Elysée lors d’un voyage officiel © AFP

Publié le 3 mars 2010 Lecture : 3 minutes.

Publié le mardi 2 mars 2010 à 17h25 et mis à jour le mercredi 3 mars à 08h30

La veuve de Juvénal Habyarimana, l’ancien président rwandais assassiné en avril 1994, a été interpellée mardi 2 mars dans l’Essonne (région parisienne) peu avant 8 heures, avant d’être libérée et placée sous contrôle judiciaire par le parquet général de Paris. Elle a dorénavant interdiction de quitter le territoire français et devra se présenter une fois par mois au commissariat.

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La demande d’arrestation émanait des autorités rwandaises, qui l’accusent d’être impliquée dans la planification du génocide rwandais de 1994. Selon des sources proches du dossier, Kigali avait émis un mandat d’arrêt international à son encontre et demande son extradition pour qu’elle soit jugée au Rwanda. Agathe Habyarimana doit désormais se présenter à la chambre d’instruction de la cour d’appel de Paris dans un délai de 10 jours ouvrables. La cour devra donner ou non son accord pour une extradition. "Mme Habyarimana ne va pas consentir à être extradée", a déjà indiqué son avocat, Me Philippe Meilhac.

A Kigali, le ministre rwandais de la Justice, Tharcisse Karugarama, s’est réjoui de cette arrestation et a exhorté la France à renvoyer la veuve de l’ex-président devant la justice rwandaise, en dépit de l’absence d’un traité d’extradition entre Paris et Kigali. Mais de son côté, Léon Habyarimana, l’un des ses fils, a souligné qu"on ne s’exile pas par plaisir. On a assassiné son mari", a-t-il assené. Il a indiqué faire confiance à la justice française "tant que la politique ne s’en mêle pas".

Cinq jours après la visite de Sarkozy

Cet événement intervient cinq jours à peine après la visite de Nicolas Sarkozy au Rwanda. Qualifiée d’historique par les observateurs, puisqu’aucun président français ne s’était rendu sur place depuis le génocide, la rencontre entre Paul Kagame et le chef de l’Etat français a scellé la réconciliation entre les deux pays, après trois ans de brouille diplomatique.

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Evacuée dès les premiers jours du génocide vers la France par des militaires français, puis installée en France à partir de 1998, Agathe Habyarimana est souvent présentée comme membre de l’"akazu", le premier cercle du pouvoir qui a fomenté le génocide, ce qu’elle a toujours nié. L’attentat contre l’avion transportant son époux le 6 avril 1994 est considéré comme le signal déclencheur du génocide, qui fit environ 800.000 morts, essentiellement des membres de l’ethnie tutsie selon le bilan de l’ONU. Selon un rapport d’enquête rwandais publié en janvier, le président aurait été assassiné par des membres de sa propre ethnie -des Hutus. Cette hypothèse contredit la théorie à laquelle croit fermement le juge français Jean-Louis Bruguière, qui a délivré des mandats d’arrêt contre neuf hauts responsables rwandais soupçonnés d’être impliqués dans cet attentat. Selon lui, les auteurs de l’attentat sont des membres du Front patriotique rwandais (FPR, actuellement au pouvoir).

Si la justice française a autorisé l’extradition de plusieurs Rwandais soupçonnés d’être impliqués dans le génocide vers le Tribunal pénal international (TPIR) d’Arusha, elle s’est en revanche opposée à trois reprises à des extraditions vers Kigali, jugeant que la justice rwandaise n’était pas à même de garantir un "procès équitable" et l’accès à une justice indépendante. La demande d’asile d’Agathe Habyarimana a été définitivement rejetée par le Conseil d’Etat français en octobre dernier. En effet, elle fait également l’objet d’une enquête à Paris à la suite d’une plainte la visant notamment pour complicité de génocide. Pourtant, la veuve de l’ancien président n’a pas encore été entendue à ce stade par les juges d’instruction chargées du dossier. (avec AFP)

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