Laurent Gbagbo forme son gouvernement sans les barons du FPI
Le gouvernement de Gilbert Marie N’gbo Aké, Premier ministre de Laurent Gbagbo, a été nommé à Abidjan. En sont absents la plupart des barons du FPI, comme Paul-Antoine Bohoun Bouabré, Marcel Gossio, ou Pascal Affi N’Guessan. Et même s’il fait la part belle à de nouvelles personnalités, il récompense les plus fidèles partisans du régime.
Laurent Gbagbo a enfin nommé son premier gouvernement depuis qu’il a été proclamé président samedi dernier, dans la précipitation, après avoir effectué la veille un véritable coup de force institutionnel. Premier constat : la vieille caste des « refondateurs », éminents membres du Front populaire ivoirien (FPI, parti de Laurent Gbagbo) n’a pas été appelée aux affaires. D’aucuns y verront sans doute une volonté de rendre le gouvernement plus populaire et de marquer un changement, les barons du FPI étant souvent critiqués pour leur train de vie ostentatoire…
Ainsi, ni Paul-Antoine Bohoun Bouabré, ex-ministre du Plan et du Développement, ni Marcel Gossio (directeur du port autonome d’Abidjan), ni Pascal Affi N’Guessan (ancien Premier ministre et porte-parole du candidat Gbagbo) ne figurent parmi les trente-trois noms retenus. Seule entorse à ce principe : l’ancien ministre de l’Intérieur, Désiré Tagro, est promu du rang de conseiller spécial de Laurent Gbagbo à celui de secrétaire général de la Présidence avec rang de ministre.
Charles Koffi Diby reste avec Ouattara
Le nouveau ministre de l’Économie et des Finances est Désiré Dallo, l’ancien directeur général du port autonome de San Pedro. Laurent Gbagbo n’a donc pas réussi à retourner Charles Koffi Diby, l’ancien grand argentier ivoirien qui a été nommé le 5 décembre ministre de l’Économie et des Finances par le président élu, Alassane Dramane Ouattara. Diby Koffi n’ayant pas été vu le 6 décembre, lors du conseil des ministres présidé par Guillaume Soro, le chef du gouvernement nommé par Ouattara, les spéculations allaient bon train. Mais l’ancien directeur général du Trésor, qui a négocié toutes les annulations de dette de la Côte d’Ivoire ces dernières années et qui jouit de la considération de la communauté internationale reste fidèle au camp de l’ancien Premier ministre…
Autre poste d’importance : celui de l’Intérieur, confié à Émile Guiriéoulou, l’ex-ministre de la Fonction publique et de l’Emploi dans l’ancien gouvernement Soro II. Ce professeur de sciences économiques à la faculté d’Abidjan, ancien député, est un baron du FPI dans l’ouest du pays.
Le portefeuille ultra sensible de la Défense est quant à lui confié à Alain Dogou, qui a commencé sa carrière politique au cabinet de l’ancien ministre de l’Intérieur Émile Boga Dougou, assassiné aux premières heures de la rébellion, en septembre 2002. Puis il a travaillé, toujours à l’Intérieur, avec Paul Yao N’Dré (actuel président du Conseil constitutionnel). Il devient ensuite conseiller du directeur général de l’Agence nationale de la stratégie et de l’intelligence (ANSI, renseignements). Il est également l’un des trois responsables des écoutes de l’ANSI au palais présidentiel. C’est un membre éminent de l’appareil « sécurocrate » de Laurent Gbagbo.
Sang neuf
Deuxième constat qu’on peut tirer de la composition du gouvernement Gbagbo : la fidélité au pouvoir se trouve bien récompensée dans ce qui ressemble fortement à une opération « sang neuf ». Ainsi, même si on l’attendait à l’Intérieur, Charles Blé Goudé remporte le portefeuille de la Jeunesse et de la Formation professionnelle. À la tête de son cabinet de communication politique (Leader’s Team Communication), le chef controversé des « patriotes » a réussi une mobilisation exceptionnelle de la jeunesse du FPI lors de la campagne présidentielle.
Autre nomination de même acabit : Ahoua Don Melo (Équipement et Assainissement), militant de la première heure au FPI, qui avait réalisé la comptabilité électronique des résultats du candidat Laurent Gbagbo en 2000. Il dirige aujourd’hui le Bureau national d’études techniques et de développement (BNETD), une société d’État en charge des grands travaux de Côte d’Ivoire. Le BNETD détient aussi 75 % de la Société informatique de localisation et de sécurité (Sils), qui devait intervenir dans la compilation électronique du scrutin présidentiel de 2010.
Issa Malick Coulibaly, le directeur de cabinet adjoint de Gbagbo et directeur national de sa campagne présidentielle est quant à lui nommé à l’Agriculture, malgré l’échec de sa stratégie de conquête électorale du Nord. Quant à Alphone Voho Sahi, homme cultivé et ancien journaliste, qui a l’oreille du président (dont il est une plume habile), il est récompensé pour avoir assuré une bonne mobilisation des électeurs à Toulepleu (Ouest). Il obtient donc la Culture. Enfin, l’ex directeur général de la Société des transports abidjanais, Philippe Attié, se voit confier l’Industrie.
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Liste du gouvernement :
1 – Premier ministre – Chef du gouvernement : M. Aké Gilbert Marie N’Gbo (qui est à la fois ministre du Plan et du Développement)
2 – Garde des Sceaux, ministre de la Justice et des droits de l’homme : M. Yanon Yapo
3 – Ministre de la Défense et du Service civique : M. Dogou Alain B. Maurice
4 – Ministre de l’Intérieur : M. Émile Guiriéoulou
5 – Ministre Affaires étrangères : M. Alcide Djédjé Illahiri
6 – Ministre de l’Économie et des Finances : M. Désiré Laurent Dallo
7 – Ministre des Mines et de l’Énergie : M. Augustin Kouadio Comoé
8 – Ministre de la Santé et de la lutte contre le Sida : Mme Christine Adjobi Nebout
9 – Ministre de la Construction et de l’Urbanisme : M. Yapo Atsè Benjamin
10 – Ministre de l’Agriculture : M. Coulibaly Issa Malick
11 – Ministre de l’Équipement et de l’assainissement : Ahoua Don Mello
12 – Ministre des Transports : N’Goua Abi Blaise
13 – Ministre Éducation nationale : Anne-Jacqueline Lohouès Oble
14 – Ministre de l’Enseignement technique : Mme Angèle Gnonsoa
15 – Ministre de l’Environnement et des Eaux et Forêts : M. Koffi Koffi Lazare
16 – Ministre de la Fonction publique : Mme Elisabeth Batcho Djékouri épouse Dagbo
17 – Ministre de la Jeunesse de la Formation professionnelle et de l’Emploi : M. Charles Blé Goudé
18 – Ministre de l’Industrie et du développement du secteur privé : M. Philippe Attey
19 – Ministre de la Femme de la Famille et de l’Enfant : Mme Akissi Danièle Boni Claverie
20 – Ministre des Techniques de l’Information et de la Communication : M. Ettien Amoikon
21 – Ministre de la Communication : M. Ouattara Gnonzié
22 – Ministre de la Culture : Alphonse Voh Sahi
23 – Ministre de la Recherche scientifique : M. Kata Kéké
24 – Ministre des Sports : M. Franck Guéï
25 – Ministre du Commerce : M. Touré Amara
26 – Ministre du Tourisme et de l’Artisanat : Kouamé Secré Richard
27 – Ministre de la Solidarité, de la Reconstruction et de la Cohésion sociale : Mme Anne Gnaoré Tapé
28 – Ministre du Travail : M. Gnamien Messou
29 – Ministre délégué auprès du ministre de l’Économie et des Finances chargé du Budget : M. Koné Katina Justin
30 – Ministre délégué auprès du ministre de l’Éducation nationale chargé de l’Enseignement supérieur : N’Guessan Yao Thomas
31 – Secrétaire d’État chargé de la Vie scolaire et estudiantine : Mme Lago Daléba Lohan Odette
32 – Secrétaire d’État chargé de la Sécurité sociale : George Armand Alexis Ouégnin
33 – Secrétaire d’État chargé des handicapés : Dogbo Djiréké Raphaël
34 – Secrétaire d’État chargé des Victimes de guerre : M. Dosso Charles Rodel Guirandou
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