Côte d’Ivoire : quand Alassane Ouattara recadre son Premier ministre
Les retards enregistrés par le gouvernement ivoirien dans la réalisation de son programme – le discours de politique générale n’a même pas encore été prononcé – suscite l’ire du chef de l’État , Alassane Ouattara. Principale cible du recadrage présidentiel : le Premier ministre, Jeannot Ahoussou Kouadio.
Fini la complaisance. Le président ivoirien, Alassane Ouattara, montre de plus en plus de signes d’agacement et d’impatience envers son Premier ministre, Jeannot Ahoussou Kouadio, au sujet des lenteurs de l’exécution du programme du gouvernement. « Ouattara souhaiterait que le rythme impulsé par lui soit suivi par le chef du gouvernement et ses ministres. Ce qui n’est pas souvent le cas. Alors, parfois, on assiste à des scènes de rappel à l’ordre », confirme un conseiller à la présidence.
Lors d’un conseil extraordinaire des ministres, le 27 juin à Yamoussoukro, le président a ainsi sèchement recadré le gouvernement. Selon plusieurs témoins, Gnénéma Coulibaly, le ministre des Droits de l’homme et des libertés publiques, a commencé par tenter de faire un compte rendu d’un voyage à Génève pour la 19e session du conseil des droits de l’homme des Nations Unies. Mais le chef de l’État ne lui en a pas laissé le temps. « Monsieur le ministre, le conseil des ministres n’est pas le lieu pour faire des compte rendus de voyages. Nous sommes ici pour prendre des décisions pour la conduite des affaires du pays », a tranché Ouattara. Puis ce fut au tour d’Ahoussou de subir les foudres du courroux présidentiel.
Le lapsus d’Ahoussou
Car celui-ci voulait relater son périple aux États-Unis, au Canada et au Brésil. Le président lui a alors coupé tout net la parole, lui demandant de lui adresser une note écrite au sujet des péripéties de sa mission sur le continent américain. Visiblement déstabilisé, Ahoussou a repris la parole pour faire un exposé sur l’initiative PPTE dont la Côte d’Ivoire avait atteint le point d’achèvement la veille. Il a alors a rendu un hommage à l’ex-chef de l’État, Henri Konan Bédié, et à l’ensemble du gouvernement, tout en omettant de citer son prédécesseur, Guillaume Soro. Pire, s’adressant à Alassane Ouattara, Ahoussou a laissé échapper un gros lapsus en l’appelant « Monsieur le Premier ministre », ce qui a suscité un grand froid dans la salle, avant que l’intéressé ne lui précise qu’il n’était « plus Premier ministre depuis bien longtemps ».
Avec le calme qu’on lui connaît, le successeur de Laurent Gbagbo a poursuivi en rendant un hommage appuyé à son ancien chef de gouvernement, Guillaume Soro, et a demandé aux ministres d’accélérer les chantiers en cours. Puis, lors du conseil des ministres du 4 juillet au palais présidentiel du Plateau, à Abidjan, Ouattara a réitéré sa volonté de voir les choses prendre de la vitesse. Résultat : la présentation de la politique générale du gouvernement devant les parlementaires, qui avait été retardée, a été annoncée pour le 16 juillet.
« Il y a actuellement une espèce de malaise entre Ouattara et son Premier ministre. Nous espérons que cette situation sera passagère. Homme d’action, le président ne comprend pas le relâchement du gouvernement », commente un haut diplomate d’une chancellerie occidentale à Abidjan, qui a récemment rencontré le chef de l’État. Joint également par Jeune Afrique, une source proche de la Primature ne souhaite pas confirmer ces informations, se bornant à décrire « la complicité » qui règnerait au sommet de l’éxécutif.
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Par Baudelaire Mieu, à Abidjan
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