Remaniement gouvernemental en Centrafrique : Nourredine Adam remplacé, Demafouth revient
Le ministre de la Sécurité, Nourredine Adam, a été remplacé par le pasteur Josué Binuoa, ancien fidèle de François Bozizé, selon un décret présidentiel publié jeudi 22 août. Noureddine Adam est nommé président du Comité extraordinaire de la défense des acquis démocratiques (Cedad).
À l’annonce, jeudi 22 août, du remplacement de Nourredine Adam au poste de ministre d’État en charge de la Sécurité, rumeurs et interrogations sont allées bon train. Payait-il au prix fort les débordements en marge de l’opération de Boy-Rabe, deux jours plus tôt ? Était-ce le signe de nouvelles divisions au sein de l’ex-rébellion de la Séléka ?
Officiellement, et selon toute vraisemblance, il n’en est rien. Car Nourredine Adam conserve son titre de ministre d’État et prend la tête du Comité extraordinaire de la défense des acquis démocratiques (Cedad), sorte de services de renseignement. Un poste qui sied mieux à ce militaire taiseux, pas vraiment à son aise dans ce costume de ministre. Son départ était dans les tuyaux depuis plusieurs jours.
Si ce changement a fait grand bruit, c’est qu’il intervient deux jours à peine après l’opération meurtrière de désarmement menée dans plusieurs quartiers du nord de Bangui. Le lourd bilan, 13 morts et 38 blessés, et les pillages qui l’ont accompagnée ont suscité l’ire de la communauté internationale.
Seigneurs de guerre
Considéré comme le cerveau du coup d’État du 24 mars, Nourredine Adam est l’un des hommes fort de Bangui. Parmi les colonels et généraux autoproclamés qui ont mis en déroute François Bozizé et ce qu’il restait de l’armée centrafricaine, il est le plus ancien dans le grade le plus élevé.
Officier trilingue d’une quarantaine d’années, formé à l’académie de police du Caire, son parcours embrasse les dynamiques et les imbrications régionales. Musulman rounga (ethnie du nord de la Centrafrique), fils d’un imam de Bangui, Noureddine Adam est né à N’Dele, au nord-est de la RCA. Il possède de nombreuses attaches à N’Djamena, où réside une partie de sa famille (femme et enfants, ainsi que certains de ses frères) et où il est propriétaire de plusieurs commerces. L’actuel numéro deux de la Séléka a également tissé des liens au Moyen-Orient. D’abord en Israël, où il reçoit une formation de 14 mois des forces spéciales, puis à Abou Dhabi, où il sera garde du corps du cheikh Zayed ben Sultan Al Nahyane pendant quatre ans.
Le choix de son succésseur, le pasteur Josué Binoua, est plus surprenant. Ministre de l’Administration territorial de François Bozizé, il était considéré comme l’un des hommes fort du régime de l’ancien président. L’offensive de la Séléka l’avait propulsé sur le devant de la scène. Rare personnalité de l’ancien régime à s’exprimer, il avait dénoncé à de nombreuses reprises le risque "d’un péril islamique" que portait la rébellion. Après le coup d’État, le pasteur, dont la maison a été pillée lors de l’offensive sur Bangui, était passé dans l’autre camp et avait été nommé ministre conseiller chargé des Affaires religieuses.
Demafouth en charge du DDR
Ce mini-remaniement entérine également le retour aux affaires de Jean-Jacques Demafouth, nommé ministre conseiller à la présidence en charge du programme Désarmement, démobilisation, réinsertion (DDR) en relation avec la Mission internationale de soutien à la Centrafrique (Misca).
Ancien ministre de la Défense sous Ange-Félix Patassé, Demafouth était déjà vice-président de ce comité de pilotage de ce programme DDR. Un poste qu’il occupait également sous François Bozizé.
Dix jours à peine avant la prise de Bangui, le 24 mars, Jean-Jacques Demafouth s’était brièvement réfugié au Tchad. Il avait alors affirmé avoir reçu des menaces de Josué Binoua. "Avant de partir, j’ai eu le ministre de l’Administration du territoire au téléphone qui m’a accusé d’aider les rebelles de la Séléka avec l’appui du Tchad", avait-il déclaré.
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Par Vincent Duhem
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