Robinson Jean Louis : « Il n’y avait jamais eu une telle fraude à Madagascar »

Candidat à la présidentielle malgache, Robinson Jean Louis, donné perdant selon les résultats provisoires du second tour face à son rival Hery Rajaonarimampianina, sort de sa réserve et dénonce des fraudes massives. Entretien.

Robinson Jean Louis, candidat à la présidentielle magache. © AFP

Robinson Jean Louis, candidat à la présidentielle magache. © AFP

Publié le 7 janvier 2014 Lecture : 3 minutes.

Cinq jours après l’annonce des résultats provisoires du second tour de l’élection présidentielle par la Commission électorale nationale indépendante pour la transition (Ceni-t), Robinson Jean Louis sort de son silence. Crédité de 46,50% des voix par la Commission électorale (contre 53,50% à son rival, Hery Rajaonarimampianina, proche du président de la transition Andry Rajoelina), le candidat soutenu par l’ancien chef d’État en exil, Marc Ravalomanana, dénonce des fraudes massives et espère que la Cour électorale spéciale (CES) étudiera de manière "impartiale" la centaine de plaintes que son équipe a déposée devant cette juridiction. Dans le cas contraire, il n’exclut pas d’appeler les Malgaches à descendre dans la rue.

Jeune Afrique : vous contestez les résultats de la Ceni-t et la victoire d’Hery Rajaonarimampianina. Pourquoi ?

la suite après cette publicité

Robinson Jean Louis : Dans l’histoire de Madagascar, il n’y avait jamais eu de fraude d’une telle ampleur. C’est une fraude massive et totale à laquelle nous avons assisté. J’ai des preuves, je les ai transmises à la Cour électorale spéciale (CES, qui a quinze jours, depuis le 3 janvier, pour confirmer ou infirmer les résultats de la Ceni-t, NDLR). Nous demandons l’annulation de centaines de milliers de voix et la disqualification de notre adversaire. Il y a 119 districts à Madagascar, aucun n’a été épargné par la fraude.

Quelle est la nature de ces fraudes que vous dénoncez ?

C’est une fraude monumentale, mais bête : il suffit de recompter tous les bulletins pour s’en rendre compte.

Il y a eu des bourrages d’urnes, des bulletins pré-cochés, des bulletins photocopiés… Dans les coins les plus reculés, les délégués ont dû sortir du bureau de vote avant que l’on signe les procès-verbaux, d’autres ont été menacés. Nous avons des preuves que des procès-verbaux que l’on avait mis dans des enveloppes cachetées n’avaient pas encore été envoyés à la Ceni-t que celle-ci comptabilisait déjà les résultats de ces bureaux de vote : comment est-ce possible !? C’est une fraude monumentale, mais bête : il suffit de recompter tous les bulletins pour s’en rendre compte. C’est ce que nous demandons.

La Ceni-t a refusé ce nouveau décompte.

la suite après cette publicité

Oui, et nous l’avons demandé à la CES. Nous demandons de recompter tous les bulletins : il n’y en a que 4 millions (4 044 391 exactement, NDLR), ce n’est pas beaucoup. Lorsque cela aura été fait, alors nous accepterons les résultats, quels qu’ils soient.

Vous ne faites plus confiance à la Ceni-t ?

la suite après cette publicité

Absolument pas. La Ceni-t a travaillé dans la précipitation. Ses membres ont fait n’importe quoi. Ils ont avalisé des fraudes massives préparées depuis des mois. J’accuse le chef du service informatique d’être un escroc.

Et la CES ?

Il est difficile de ne pas avoir confiance en une cour de justice. Nous demandons qu’elle soit impartiale. Nous demandons à la communauté internationale qu’elle l’exige. Et nous appuyons la demande des militaires qui souhaitent participer au recomptage des voix.

Appellerez-vous à descendre dans la rue ?

Non, pas maintenant. Nous respectons la loi. Nous attendons d’abord de voir ce que dit la justice, et après nous verrons. Mais les gens ici sont en colère. La population de Madagascar est malheureuse.

Existe-t-il des divergences au sein de votre équipe ? Certains affirment que vos relations avec Marc Ravalomanana sont tendues…

Marc Ravalomanana m’a soutenu, je l’en remercie, mais ce n’est pas lui qui m’a présenté, je me suis présenté tout seul comme un grand. Comme dans tous les partis, il y a des radicaux, d’autres moins, et des pacifistes. Moi, je me situe au milieu : nous avons besoin de sagesse, mais de force aussi. Nous ne sommes pas des extrémistes. Nous demandons simplement la transparence. C’est l’avenir de Madagascar qui est en jeu.

_________

Propos recueillis par Rémi Carayol

 

La Matinale.

Chaque matin, recevez les 10 informations clés de l’actualité africaine.

Image

Contenus partenaires