Ebola : émeute dans un quartier de Monrovia placé en quarantaine, la police tire à balles réelles
La population de West Point, un quartier de la capitale du Liberia, Monrovia, a réagi avec des jets de pierre et des cris à sa mise en quarantaine, mercredi, alors qu’un couvre-feu général a été décrété mardi. Les tirs de la police et de l’armée ont fait au moins quatre blessés.
À Monrovia, capitale du Liberia, les 75 000 habitants du quartier de West Point se sont réveillés encerclés par un cordon de militaires et de policiers lourdement armés, mercredi 20 août. Pendant la nuit, le secteur a été placé sous quarantaine, de même que celui de Dolo Town, plus au sud. Cette décision a été prise la veille par la présidente Ellen Johnson Sirleaf, afin de maîtriser la propagation du virus Ebola. Le même jour, les autorités ont également imposé un couvre-feu sur l’ensemble du pays.
La fuite de 17 patients d’un centre pour malades d’Ebola, retrouvés depuis, et le pillage de draps et de matelas souillés ont augmenté le risque de nouvelles contaminations. Les patients avaient quitté les lieux pour échapper à l’assaut du centre par des jeunes le week-end dernier, à Westpoint. Plutôt que de rouvrir l’établissement, la présidente du Libéria a ordonné la mise en quarantaine du quartier. Les habitants de West Point ont réagi par des jets de pierres et des cris de colère.
Tables, chaises et fils barbelés
Les incidents ont éclaté mercredi quand des policiers sont venus évacuer une représentante de l’État résidant dans le quartier avec sa famille. D’autres témoins affirment que les affrontements ont commencé après le blocage des routes dans le quartier. Tôt dans la matinée, les forces de sécurité ont installé des tables, des chaises et des fils barbelés sur les voies.
Les soldats ont d’abord utilisé des gaz lacrymogènes pour disperser la foule puis ils ont ouvert le feu. Quatre habitants ont été blessés par balle avant d’être évacués, selon des témoins oculaires et le correspondant de l’AFP. Aucun bilan de source médicale sur leur état n’a pu être obtenu dans l’immédiat.
Le calme est revenu dans l’après-midi mais la tension restait vive autour de West Point, où militaires et policiers étaient aux aguets. "Les soldats utilisent des balles réelles", a déclaré le porte-parole de l’armée Dessalines Allison, ajoutant que ces derniers "ont suivi les instructions. Ils n’ont pas tiré sur des citoyens pacifiques."
Une désinformation totale
Ignorant tout du blocus, les résidents de West Point n’ont pas pu se rendre au travail ni s’approvisionner. "Nous avons découvert le blocus ce matin. Nous sommes sortis et nous ne pouvions aller nulle part", raconte Barry, 45 ans, employé dans un bureau de change.
La désinformation amplifie la crainte et la psychose des habitants. L’un d’entre eux est persuadé que le gouvernement a bouclé le quartier afin d’y apporter le virus Ebola, selon Reuters.
"Je n’ai plus rien à manger"
Conséquence de la quarantaine : le prix de certains produits de base, comme l’eau en poudre, a flambé. Sur les radios locales, plusieurs résidents ont même signalé un doublement des prix.
Pour calmer les tensions, les autorités ont commencé à distribuer à West Point des tonnes de riz, de l’huile et des aliments de première nécessité. "Je n’ai plus rien à manger et nous avons très peur", dit Alpha Barry, un habitant du quartier originaire de Guinée et père de quatre jeunes enfants.
"C’est inhumain, ce que fait cette dame [la présidente du Liberia, Ellen Johnson Sirleaf, NDLR]. On ne peut pas nous enfermer subitement sans nous prévenir, comment nos enfants vont-ils manger?", a déclaré par téléphone à l’AFP un autre résident, Patrick Wesseh.
Dans le centre de Monrovia, la plupart des magasins étaient fermés, y compris à Waterside, le plus grand marché de la capitale.
(Avec AFP)
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