La Francophonie, un idéal voué à l’échec
Magaye Gaye est directeur général du cabinet de recherche de financement GMCCONSEILS (Dakar, Sénégal).
Au moment où le Sénégal s’apprête à accueillir le 15e sommet de la Francophonie qui coïncide avec les préparatifs de l’anniversaire de la célébration par le Sénégal du grand résistant anticolonial Cheikh Ahmadou Bamba, il est opportun de s’interroger sur l’importance de la Francophonie et son devenir.
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La Francophonie est un nain économique. Sur les 20 pays les plus riches du monde, seuls 2 sont francophones. À ce constat s’ajoutent le déclin progressif de son moteur historique, la France, et le retard considérable accusé par les pays francophones de l’Afrique noire. La France enregistre de faibles taux de croissance, fait face au vieillissement de sa population et à un déficit budgétaire colossal, sans oublier un endettement public hors de proportion (2 000 milliards d’euros). En outre, ce pays subit de plein fouet un discrédit notoire de sa classe politique et de récurrents rappels à l’ordre budgétaire de la Commission de Bruxelles.
Quant aux pays de l’Afrique francophone, ils représentent 8 des 11 pays les plus pauvres au monde, classés par le Pnud. Ils sont dépassés par des États africains anglophones plus responsables et faisant preuve d’une plus grande capacité d’innovation.
Leur retard s’explique par l’inefficacité du modèle post colonial français consistant au maintien des anciennes colonies dans une logique confédérale avec une forte situation de dépendance et d’assistanat. Ces pays sont sans réelle politique monétaire avec un franc CFA arrimé à une devise forte, l’euro, qui les déresponsabilise, hypothèque leur capacité d’exportation et leur développement. Plus de 50 % des réserves en devise (environ 10 000 milliards de FCFA soit 15,2 milliards d’euro en ce moment) sont logés au Trésor français en contrepartie de la garantie de la convertibilité ne contribuent pas au financement de leur économie.
L’anglais deviendra la seule langue officielle de communication internationale.
Parmi les élites, peu aiment leurs pays et se soucient de leur prospérité. Comment comprendre, l’instrumentalisation des anciens chefs d’État africains (Senghor, Bourguiba et Diori) comme fondateurs de la Francophonie en dehors du principal concerné qu’est la France, à un moment où des enjeux d’unification de l’Afrique et de promotion des langues nationales se posaient avec acuité ? Comment concevoir que d’anciens chefs d’État du Sénégal de la trempe de Senghor et Diouf aient choisi de s’installer en France après leur départ du pouvoir ? Comment justifier que plus de 50 ans après les indépendances des rues et places publiques africaines portent encore des noms d’anciens colonisateurs ? Il est à rappeler la déclaration irrespectueuse du président Sarkozy, intimant l’ordre aux autorités tchadiennes d’extrader les membres de l’Arche de Zoé pour qu’ils soient jugés en France "quoi qu’ils aient fait". Au plan diplomatique, la position de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF) semble toujours moduler en fonction de celle de la France. Le cas de la crise burkinabè en est un exemple patent.
De notre point de vue, l’anglais deviendra la seule langue officielle de communication internationale. Le monde anglophone fascine par ses valeurs pragmatiques et "responsabilisantes". En renforçant son positionnement dans de nouveaux métiers d’avenir comme les NTIC, l’anglais représente, dans le subconscient de beaucoup de jeunes, une langue moderne, à la mode, porteuse des valeurs de progrès, d’avenir. Le poids démographique grandissant des Chinois dans le monde, le rôle important que l’arabe est appelé à jouer à la faveur du retour des valeurs religieuses, et une mondialisation multipolaire qui voit l’émergence des puissances comme le Brésil, la Russie, l’Inde, tous arrimés à l’anglais, devraient amener les Responsables francophones à plus de lucidité. Tout pays désireux de jouer un rôle important dans les relations internationales doit adopter l’anglais comme langue officielle. Le monde francophone n’anticipe toujours pas cette réalité irréversible, cette montée irrésistible d’une nouvelle génération d’Africains assoiffée de respect et fortement désireuse de tourner la page.
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