Ebanega : « Au Gabon, un footballeur qui se blesse et ne peut plus jouer se retrouve à la rue »
L’international gabonais du CA Bastia Rémy Ebanega a créé avec Axel N’Guéma, un ancien joueur, l’Association nationale des footballeurs professionnels au Gabon (ANFPG). Le défenseur des Panthères veut notamment inciter ses compatriotes évoluant au pays à faire valoir leurs droits, alors que le championnat, plusieurs fois reporté depuis le mois d’août, devrait démarrer le 21 mars… en théorie. Interview réalisée le 23 février.
Jeune Afrique : Pourquoi avez-vous décidé de créer l’ANFPL ?
Rémy Ebanega : Le championnat est professionnel au Gabon depuis 2013. L’an dernier, nous avons donc décidé, avec Axel N’Guéma, de mettre sur pied ce syndicat, dans un but bien précis : imposer une charte du football gabonais, et donc aider les joueurs à avoir des droits et à les faire valoir. Car à la date d’aujourd’hui, les clubs professionnels de Ligue 1 et Super D2 font à peu près ce qu’ils veulent.
Comment fonctionnent financièrement les clubs ?
Il y a une dotation de l’État de 50 millions de F CFA qui est répartie entre les clubs avant chaque saison. Lesquels doivent assurer aux joueurs un salaire minimum de 400 000 francs CFA. Ensuite, les clubs sont supposés trouver d’autres ressources. Seulement, la situation actuelle est loin d’être conforme à ce qui était prévu, à tel point que le football gabonais semble moins bien organisé que lorsqu’il n’était que semi-professionnel. Cela fait des mois que le coup d’envoi du championnat est retardé, et on ne nous donne pas de vraies raisons. Il doit débuter le 21 mars, mais rien n’est sûr.
Dans mon pays, car je l’ai vécu, on est capable de faire signer un contrat vierge à un joueur, ce qui permet à un président de club de mettre ce qu’il veut dessus.
Quelles sont les conséquences de cette situation ?
Ces reports successifs ont des conséquences catastrophiques. Certains joueurs, qui accusent déjà des arriérés de salaires et de primes de la saison 2013-2014, ne sont pas payés, ou pas régulièrement, depuis qu’ils ont repris l’entraînement en juillet dernier. Et leurs dirigeants expliquent cela par le fait qu’ils ne jouent pas de matches officiels ! Mais à qui la faute ? Ni la fédération, ni la Ligue nationale de football (Linaf) ne donnent d’explications.
Cela signifie-t-il que des joueurs sont dans une grande précarité ?
Il y a des joueurs qui ont de plus en plus de difficultés à payer leur logement et même à nourrir leur famille. Au Gabon, les joueurs n’osent pas parler, car ils peuvent subir des pressions. Et dans mon pays, car je l’ai vécu, on est capable de faire signer un contrat vierge à un joueur, ce qui permet à un président de club de mettre ce qu’il veut dessus, y compris qu’untel ou untel est lié à vie à son club !
Nous voulons sensibiliser les joueurs sur le fait qu’ils ont des droits, ce qu’ils ignorent. Nous leur fournissons une assistance juridique. Savez-vous que si un joueur se blesse gravement, il n’a pas de sécurité sociale, ni assurance maladie ? En gros, s’il ne peut plus rejouer, il se retrouve à la rue, car son club le rejette ! Nous voulons changer cela et imposer une vraie charte.
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Propos recueillis par Alexis Billebault
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