Mali : à Kidal, tout reste à faire

Libérée le 28 janvier, Kidal, la ville du grand Nord, est contrôlée par les rebelles touaregs, bien décidés à ne pas laisser l’armée malienne approcher… Voilà qui promet !

Des hommes du MNLA, le 4 février à Kidal. © Reuters

Des hommes du MNLA, le 4 février à Kidal. © Reuters

Publié le 16 avril 2013 Lecture : 3 minutes.

Il manque de tout à Kidal. Du courant, des vivres, des médecins, des enseignants… Tous ou presque ont fui l’année dernière, comme une partie des habitants, quand les combattants salafistes d’Ansar Eddine, le groupe d’Iyad Ag Ghali, ont bouté l’armée malienne hors de la ville. Mais ses occupants, des Touaregs pour la plupart, semblent s’en accommoder. « Ça va, nous sommes habitués aux pénuries », dit l’un d’eux joint par téléphone. Depuis un mois et demi, le réseau fonctionne à nouveau.

Ce n’est pas la première fois que la place forte des Ifoghas, la plus puissante des tribus touarègues, est coupée du monde. Cité interdite aux étrangers pendant plusieurs décennies, lorsqu’elle abritait un bagne militaire, Kidal a toujours été un cas à part. Une épine dans le pied du Mali, où ont été conçues toutes les rébellions touarègues de ces cinquante dernières années. Aujourd’hui encore, elle fait figure d’exception : alors que la ville a été libérée du joug d’Ansar Eddine le 28 janvier, l’armée malienne n’y a toujours pas mis les pieds. Elle y compte bien quelques soldats, mais ils ne servent qu’à guider les Français et les Tchadiens dans l’Adrar des Ifoghas. Ces derniers ne quittent quasiment pas leur base.

Des volontaires s’improvisent gendarmes et guettent les éventuelles incursions jihadistes, d’autres se prennent pour des instituteurs.

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Sans administration, les habitants s’organisent. Des volontaires s’improvisent gendarmes et guettent les éventuelles incursions jihadistes, d’autres se prennent pour des instituteurs. Le 26 mars, un coordinateur (une sorte de maire provisoire) a été nommé par les notables, avec l’assentiment des deux groupes armés qui ont pris le relais d’Ansar Eddine : le Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA, laïc) et le Mouvement islamique de l’Azawad (MIA, islamiste modéré). L’heureux élu est Mohamed Ali Ag Albassaty, un fonctionnaire qui dit n’appartenir à aucun de ces groupes. « Contrairement à ce qui a été indiqué, je ne suis pas un gouverneur », tient-il à préciser. Il n’est même pas l’homme fort de Kidal. L’autorité morale, c’est toujours l’aménokal, le vieil Intalla Ag Attaher, qui l’exerce, même s’il doit composer avec les groupes armés.

Répressions

De quoi sera fait l’avenir ? se demandent les habitants de Kidal. Bientôt, les Français, qu’ils considèrent comme leurs protecteurs, partiront. Qui les remplacera ? Dans la ville, on ne veut pas entendre parler des Maliens. « Ils vont vouloir se venger », croit savoir un habitant. « Les notables n’ont pas oublié les répressions qui ont suivi les précédentes rébellions. Ils ne veulent pas voir un seul militaire noir [originaires du Sud, NDLR] dans leur ville », indique à Paris un bon connaisseur de la région.

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Le MNLA et le MIA, qui travaillent désormais main dans la main, le clament haut et fort : « Nous sommes prêts à nous battre. » À Bamako, le ton est tout aussi virulent… Officiellement, si l’armée n’est pas à Kidal, c’est par manque de moyens. Mais l’état-major malien n’est pas pressé d’y envoyer ses rares soldats en mesure de se battre alors que les rives du fleuve Niger ne sont toujours pas pacifiées. « Pour l’instant, ce n’est pas prévu », confirme un colonel. Mais des officiers, à commencer par les Bérets rouges tout juste reconstitués, ne cachent plus leur volonté d’en découdre avec ceux qui, bien plus que les jihadistes, sont perçus comme les « vrais ennemis » du Mali : les indépendantistes touaregs. « Tombouctou, Gao et Ménaka ont été libérés. Il ne reste plus que Kidal », s’irrite l’un d’eux. « Si on ne monte pas, c’est parce que la France ne veut pas », ajoute une source sécuritaire malienne. À court terme, le MNLA est considéré par Paris comme un allié dans la traque aux jihadistes. À plus long terme, dans la perspective d’une réconciliation nationale, il est perçu comme « un interlocuteur inévitable », selon les termes d’un diplomate.

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