Bénin: « Actu Matin » fait carton plein
Pour avoir osé l’impertinence, l’émission de Canal 3 est très vite devenue incontournable. Le pari était pourtant risqué…
"Actu Matin, c’est notre label", lance fièrement André Dossa, 32 ans, rédacteur en chef à Canal 3, à Cotonou. En cette fin de matinée, c’est le calme plat sur le plateau d’Actu Matin, qui accueille chaque jour, de 7 heures à 9 heures, une équipe de journalistes et leurs invités pour débattre de l’actualité. Cette émission créée en 2007, en même temps que la chaîne, est vite devenue un rendez-vous de référence pour nombre de Béninois. Et si, comme dans la plupart des pays africains, les mesures d’audience régulières sont quasi inexistantes, son succès reste vérifiable "par les discussions qu’elle provoque sur les réseaux sociaux et dans l’opinion en général", explique André Dossa.
Sur la forme pourtant, Actu Matin n’a rien de révolutionnaire. C’est même un format directement inspiré d’émissions françaises telles que Télématin, diffusée depuis bientôt trente ans sur la chaîne publique France 2. Citant son patron, Malick Gomina – qui intervient aussi dans l’émission -, le rédacteur en chef ajoute : "On ne peut pas réinventer la roue, il s’agit de partir de quelque chose d’existant et d’y ajouter notre touche personnelle." Laquelle se résume simplement : jeunesse et impertinence maîtrisée.
En effet, comme leur rédacteur en chef, les journalistes d’Actu Matin ont, pour la plupart, moins de 30 ans. "Au départ, nous n’avons pas été compris, se souvient André Dossa. On nous prenait pour des jeunes malpolis, qui donnaient leur opinion sur tout et critiquaient beaucoup. Les gens n’étaient pas forcément prêts à voir des juniors traiter l’information de cette façon, car c’était un positionnement réservé jusque-là aux aînés de la profession."
>> Lire aussi : Bénin – médias : chaînes privées recherchent financements
Actu Matin, suspendue pour deux semaines
Au point de faire sortir plusieurs fois de ses gonds le président de la République, Thomas Boni Yayi. En novembre 2012, par exemple, Actu Matin – tout comme l’émission L’Arbre à palabres, également diffusée sur Canal 3 – est suspendue d’antenne pour deux semaines par la Haute Autorité de l’audiovisuel et de la communication (HAAC) pour avoir "violé le code de déontologie de la presse béninoise en son article 8, notamment l’exigence d’équilibre dans le commentaire".
S’il avoue jouir d’une certaine liberté éditoriale pour le contenu de l’émission, "en comparaison de certains confrères", le journaliste concède que celle-ci n’est pas totale. "Il ne faut pas nuire à l’image de la chaîne, et on doit veiller à ce que ses enjeux commerciaux ne soient pas mis en péril, étant donné qu’il s’agit d’une entreprise privée."
_______________
Par Haby Niakaté
La Matinale.
Chaque matin, recevez les 10 informations clés de l’actualité africaine.
Consultez notre politique de gestion des données personnelles
Les plus lus – Culture
- Émigration clandestine : « Partir, c’est aussi un moyen de dire à sa famille qu’on...
- RDC : Fally Ipupa ou Ferre Gola, qui est le vrai roi de la rumba ?
- Fally Ipupa : « Dans l’est de la RDC, on peut parler de massacres, de génocide »
- À Vertières, les esclaves d’Haïti font capituler les troupes de Napoléon
- Les « maris de nuit », entre sorcellerie et capitalisme