Gabon – Présidentielle 2016 : la pêche est ouverte !
À l’approche de la présidentielle de 2016, entre démissions fracassantes et ralliements enthousiastes, le parti au pouvoir et l’opposition rassemblent leurs camps. Un article publié dans J.A. nº 2796-2797.
Deux ans avant la fin du septennat d’Ali Bongo Ondimba, les prémices de la campagne pour l’élection présidentielle de 2016 se font déjà ressentir. Fin juillet s’est créé autour de Jean Ping, ex-président de la Commission de l’Union africaine, un Front de l’opposition pour l’alternance. Les opposants répondaient ainsi à la démonstration de force, fin mai, de la coalition formée autour du chef de l’État, rebaptisée Majorité républicaine et sociale pour l’émergence. Depuis six mois, les deux camps multiplient les effets d’annonce.
Tout a commencé en février dernier avec le départ fracassant de Jean Ping du Parti démocratique gabonais (PDG, au pouvoir). Quelques semaines plus tard, Jacques Adiahénot, ancien secrétaire général et ministre, démissionnait à son tour. Ali Bongo décide alors de partir à la "pêche à l’opposant", histoire de démontrer que la majorité dispose elle aussi d’un projet attractif.
La signature de son Pacte social, projet gouvernemental destiné à lutter contre la pauvreté et les inégalités, a été l’occasion d’exhiber ses "prises" politiques. La plus grosse est sans doute l’ancien maire de Port-Gentil, Séraphin Ndaot Rembogo, président du Parti pour le développement et la solidarité sociale (PDS). Un ralliement avant l’heure ? L’intéressé nie. "Accompagner la politique sociale du gouvernement ne veut pas dire que nous approuvons sa politique dans les autres domaines", plaide-t-il.
Pas de doute, la bataille pour le contrôle de l’électorat dans l’Ogooué-Maritime opposera Ping au contingent des "frères ennemis" orungus.
Ce rapprochement pourrait trouver une explication dans la sourde rivalité régionale qui oppose la minorité nkomie, dont est issu Ping, aux Orungus de Ndaot. Que ce dernier rejette l’idée de servir l’ambition présidentielle de Ping, qu’il déteste viscéralement, n’est guère étonnant… Pour le Palais du bord de mer, il n’a du reste pas été difficile d’obtenir le soutien de cet avocat familier de la majorité présidentielle depuis Bongo père. Pas de doute, la bataille pour le contrôle de l’électorat dans l’Ogooué-Maritime opposera Ping au contingent des "frères ennemis" orungus.
>> Lire aussi : Jean Ping et Ali Bongo Ondimba, duel de phrases assassines
L’heure de la revanche a sonné
Autre adhérent enthousiaste de la nouvelle coalition présidentielle, Séraphin Akouré-Davain, le leader de l’Alliance pour le nouveau Gabon (ANG). Cet ancien orthopédiste a conquis la mairie de Lambaréné avant d’être contraint à la démission fin 2010, accusé à tort par une partie de la communauté galoa, l’ethnie locale, d’avoir vendu un masque sacré, issu du patrimoine culturel de la région, à des partenaires chinois.
Pour lui, l’heure de la revanche a peut-être sonné. Et il n’est pas le seul à entrevoir la fin de la traversée du désert : Hervé Ossamané Onouviet (Union démocratique et sociale), Bonaventure Nzigou Manfoumbi (Front d’égalité républicaine), Jean-Valentin Léyama (Dynamique gagnant-gagnant), Victoire Lasseni Duboze (indépendante) et bien d’autres opposants ne se sont pas fait prier pour signer le Pacte social.
> > Lire aussi : Gabon : la présidentielle de 2016, c’est déjà demain
D’autres n’ont pas répondu à l’appel du président, alors que leurs homologues de l’opposition ne souhaitent plus les compter dans leurs rangs. Ainsi Louis Gaston Mayila n’a-t-il pas été convié par Zacharie Myboto à parapher l’acte constitutif du Front de l’opposition pour l’alternance. Mayila faisait pourtant campagne depuis des mois pour obtenir l’unité de l’opposition et une candidature unique. Les initiateurs de la coalition l’ont poliment éconduit : "Tu as un problème avec les jeunes."
"Les gens sont fatigués de ses va-et-vient entre majorité et opposition", a tranché l’un des leaders. Écarté, lui aussi, Pierre-Claver Maganga Moussavou, président du Parti social-démocrate (PSD). Le maire de Mouila a un passé d’opposant "trop égocentré" pour la cohésion du Front. Il pourrait n’avoir d’autre choix que de se joindre au PDG.
Précision
J’ai lu votre article intitulé "Gabon. La pêche est ouverte" (J.A. nº 2796-2797) avec beaucoup d’amusement et un peu de surprise. Que Jeune Afrique se fourvoie dans des analyses que ne renierait pas un apprenti opposant local ne peut qu’inquiéter le lecteur.
Ne me comparez pas aux gens qui viennent dans l’opposition par désoeuvrement : de toutes les personnes que vous citez dans votre article et qui auraient quitté les rangs du parti au pouvoir pour se retrouver dans l’opposition, je suis le seul qui aie démissionné du vivant du président Omar Bongo Ondimba, abandonnant poste et titres alors que j’étais vice-Premier ministre, ministre des Affaires sociales et vice-président du PDG.
Avouez que ce sont là des fonctions, des titres et des honneurs que tous ceux qui se disent opposants aujourd’hui n’auraient jamais eu le courage d’abandonner. Vous évoquez un Front pour l’alternance qui ne m’aurait pas accepté dans ses rangs, mais je ne suis pas un mouton de Panurge. Je ne mets pas la haine et les règlements de compte personnels au nombre des arguments politiques. Dans un avenir pas très lointain, les Gabonais constateront que la création du front est un non-événement.
Louis Gaston Mayila Libreville, Gabon
La Matinale.
Chaque matin, recevez les 10 informations clés de l’actualité africaine.
Consultez notre politique de gestion des données personnelles
Les plus lus – Politique
- Sexe, pouvoir et vidéos : de quoi l’affaire Baltasar est-elle le nom ?
- Législatives au Sénégal : Pastef donné vainqueur
- Au Bénin, arrestation de l’ancien directeur de la police
- L’Algérie doit-elle avoir peur de Marco Rubio, le nouveau secrétaire d’État améric...
- Mali : les soutiens de la junte ripostent après les propos incendiaires de Choguel...