Ahmed Dini Ahmed

L’ancien Premier ministre djiboutien est décédé le 12 septembre.

Publié le 20 septembre 2004 Lecture : 3 minutes.

Ahmed Dini Ahmed, grande figure de la vie politique djiboutienne, éphémère Premier ministre durant les six premiers mois de l’indépendance du pays, en 1977, est décédé le 12 septembre à l’hôpital militaire français de Djibouti. Cette disparition est un coup dur pour l’opposition, dont le défunt fut un leader charismatique, à la veille d’une échéance importante : l’élection présidentielle, prévue en avril 2005.

Ahmed Dini Ahmed, afar, est né en 1932 dans la région du mont Mabla, dans le nord du pays. Après une formation de technicien de la santé, il s’engage en politique à l’âge de 26 ans. Une année plus tard, en 1959, il devient vice-président du Conseil de gouvernement de la Côte française des Somalis, la plus haute autorité institutionnelle locale. Il occupe cette fonction quelques mois avant de briguer un mandat de député territorial. Durant les années 1960, Ahmed Dini occupe plusieurs postes au sein du Conseil de gouvernement. Le tournant de sa carrière politique intervient en 1973 quand, en compagnie de Hassan Gouled Aptidon, un Issa, il lance la Ligue populaire africaine (LPA), mouvement qui prend, deux années après sa création, une option indépendantiste. Dini et Aptidon deviennent ainsi les deux pères fondateurs de la nation djiboutienne.
En 1977, l’indépendance est proclamée dans ce qui était devenu le territoire français des Afars et des Issas. La présidence de la toute nouvelle République est confiée à Aptidon qui nomme, en juin 1977, Ahmed Dini Premier ministre. Mais le parcours commun des deux hommes tourne court. Aptidon concentre tous les pouvoirs, rognant sans limites sur les prérogatives de son compagnon de lutte. Dini, qui n’est pas homme à se taire, tente de contenir la boulimie de pouvoir d’Aptidon. Au bout de six mois, il rend le tablier en dénonçant la mainmise de la communauté issa, une des deux grandes composantes ethniques, sur la vie institutionnelle du pays, au détriment des Afars.

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Djibouti vit alors à l’ère du parti unique. Dini se retire à Tadjourah, capitale des Afars, mais ne dispose d’aucune tribune politique pour exprimer ses points de vue. À la fin des années 1980, le mouvement contestataire afar prend la forme d’un Front pour la restauration de l’unité et la démocratie (Frud). Ahmed Dini rejoint, en 1990, cette organisation, qui se transforme en rébellion armée, puis en prend la tête en 1992.
La guerre civile est une catastrophe pour Djibouti, qui voit tous ses efforts de lutte pour le développement ruinés. Aptidon charge son chef de cabinet, Ismaïl Omar Guelleh, de négocier avec les rebelles. Des pourparlers sont engagés et aboutissent à un accord de paix. Le Frud rejoint la coalition au pouvoir, mais pas Dini, qui conteste les clauses de l’accord.
Désormais, le Frud se scinde en deux, Dini prenant la tête de la tendance qui maintient l’option de la lutte armée. En 1999, Aptidon s’éclipse de la scène politique, et Ismaïl Omar Guelleh lui succède à l’issue d’un scrutin pluraliste. Ahmed Dini, toujours en rébellion, n’entre pas dans la course à la succession d’Aptidon. L’opposition présente un candidat unique, dénué de tout charisme, une véritable bénédiction pour Guelleh. Ce dernier, arrivé aux affaires, ne désespère pas d’obtenir un cessez-le-feu total avec le Frud d’Ahmed Dini. Il confie à Mohamed Dileita, alors ambassadeur de Djibouti à Addis-Abeba, aujourd’hui Premier ministre, de négocier directement avec Dini, qui est exilé à Paris.
Des accords de paix sont signés dans la capitale française, le 12 mai 2001. Dini retourne à Djibouti et crée un parti, l’Union pour l’alternance démocratique. En septembre 2002, il affronte le suffrage universel lors des premières législatives pluralistes de l’histoire du pays. Nouvel échec, mais sa participation donne du souffle à la vie politique djiboutienne. La prochaine présidentielle promettait un débat passionnant entre le vieux routier de la lutte pour l’indépendance et un président sortant dont le bilan est loin d’être négatif. Mais le destin en a décidé autrement. Une longue maladie a fini par emporter Ahmed Dini, à qui le pays tout entier a rendu un vibrant hommage.

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