Islam, burqa et laïcité
Encore une affaire de voile en France ! Le Conseil d’État a confirmé, le 27 juin, le refus d’octroi de la nationalité française à Faïza M., une Marocaine de 32 ans, mariée à un Français, mère de trois enfants nés en France et présentée comme une femme soumise, vivant quasi recluse, à qui son mari impose le port de la « burqa ». Motif invoqué : « Si Faïza M. possède une bonne maîtrise de la langue française, elle a cependant adopté une pratique radicale de sa religion, incompatible avec les valeurs essentielles de la communauté française, et notamment avec le principe d’égalité des sexes. » Voilà de quoi relancer le débat sur la place des religions en France, un pays qui semble éprouver les pires difficultés à concilier le fait religieux avec les règles élémentaires de la République. Car si le problème se pose ailleurs en Europe, c’est toutefois dans l’Hexagone qu’il est le plus sensible. La décision du Conseil d’État a été accueillie par un concert de louanges, à droite comme à gauche de l’échiquier politique, dans les médias et chez les quelques intellectuels qui ne sont pas encore partis à Saint-Tropez, Ibiza ou sur les îles éoliennes C’est bien là le symptôme du malaise français.
On nous explique doctement que la « pratique radicale » d’une religion est considérée comme un obstacle à l’assimilation. Soit. Mais qui décide du degré de radicalité ? Cette limite imposée concerne-t-elle la quantité de tissu utilisée pour confectionner un voile ? Le nombre de prières par jour ? La durée du jeûne ou encore la taille du chapelet ? Les critères qui permettent de déterminer l’adéquation d’une religion avec les valeurs de cette « vraie » France, si attachée à sa laïcité qu’elle préfère tout interdire plutôt que de faire preuve de tolérance, demeurent un mystère.
Ensuite, on ne peut que constater que c’est presque toujours l’islam qui est mis à l’index : en 2004, lors du vote de la loi interdisant le port de signes religieux ostensibles (il n’a été question que du voile), plus récemment dans l’affaire du mariage annulé pour cause de virginité perdue avant l’heure et sans que le pauvre mari en ait été informé par sa promise. On peut toujours se demander si le Conseil d’État aurait fait preuve d’autant de vigilance dans son combat pour l’égalité des sexes et contre la soumission des femmes dans le cas d’une catholique intégriste, d’une juive ultraorthodoxe ou de l’adepte d’une secte quelconque.
Dernier point troublant dans cette affaire : le mari est français, les enfants sont français, mais on refuse à celle que l’on présente comme la victime de l’obscurantisme de son époux le droit de faire partie de la communauté nationale. Voilà qui devrait remédier à l’isolement de Faïza M. ! On marche sur la têteÂ
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