L’adieu aux armes s’éternise

Un an après la conclusion de l’accord de paix, des désaccords subsistent entre le gouvernement et les représentants de la rébellion. Mais les négociations se poursuivent.

Publié le 29 mars 2004 Lecture : 3 minutes.

Un an après la signature à Brazzaville, le 17 mars 2003, d’un accord de paix entre le gouvernement et le Conseil national de la résistance (CNR), le mouvement rebelle dirigé par Frédéric Bitsangou, alias « pasteur N’toumi », les armes se sont tues. Mais elles n’ont toujours pas été déposées. Le pasteur boude la résidence aménagée à son intention (pour 60 millions de F CFA) dans le quartier de Bacongo, à Brazzaville, et continue de vivre à Loukouo, à 200 km à l’ouest de la capitale, entouré, dit-on, d’un millier d’hommes en armes.
Dans une lettre datée du 23 janvier qu’il a fait parvenir au président Denis Sassou Nguesso par le canal de l’ambassadeur du Gabon à Brazzaville, N’toumi a, une nouvelle fois, posé des préalables à son installation dans la capitale et au désarmement de ses hommes. D’abord, la formation d’un gouvernement d’union nationale, dont son mouvement serait naturellement partie prenante, et la reconnaissance du CNR en tant que parti politique. Ensuite, la conclusion d’un accord définissant son statut « postconflit », la fixation d’un quota de miliciens appelés à intégrer la force publique et le retour au pays de tous les exilés politiques.
L’ampleur de ces exigences n’affecte apparemment pas la volonté du gouvernement de parvenir à la paix. Au mois de février, deux groupes de travail paritaires ont été mis en place. L’un est chargé d’organiser la démobilisation, le désarmement et la réinsertion (DDR) des combattants ; l’autre de définir le statut du chef rebelle. Ce dernier groupe est dirigé par Alphonse Nzoungou, un Kongo de Boko, dans le Pool, la région d’origine du pasteur. Personnalité neutre et respectée, Nzoungou fut ministre de la Justice sous Sassou I, puis ministre de l’Intérieur dans le gouvernement de transition d’André Milongo.
Cet aréopage, qui se réunit régulièrement depuis la mi-mars, rassemble des membres du Comité de suivi de la convention pour la paix et la reconstruction du Congo et deux représentants du CNR : Florent Nkounkou et Tondo Rock. Le chef de l’État suit de près l’avancement de ses travaux, dont sont tenus informés le délégué de l’Union européenne (qui a débloqué 731 000 euros pour la réinsertion du millier d’hommes du CNR encore en armes) et le représentant-résident de l’ONU. Depuis peu, l’ambassadeur du Gabon y est également impliqué, sur l’insistance subite de N’toumi, qui, il y a quelques semaines, réclamait plutôt l’implication de Robin Renee Sanders, la représentante des États-Unis à Brazza.
La paix est donc plus que jamais à l’ordre du jour, à Brazzaville. « Cette fois, précise un membre du Comité de suivi, les rebelles ont un interlocuteur unique, ce qui permet de faire l’économie des conflits de compétences auxquels on a assisté depuis un an. » Isidore Mvouba, le ministre d’État chargé de la Coordination de l’action gouvernementale, qui préside le Comité de suivi de l’accord du 17 mars 2003, se serait en effet heurté, à plusieurs reprises, à l’état-major de l’armée. Et notamment au général Gilbert Mokoki, le responsable de l’opération Espoir lancée le 20 décembre 2003, après que des désordres ont éclaté dans la capitale, sans doute à l’initiative des rebelles. Commandant de la gendarmerie, celui-ci connaît bien le pasteur N’toumi, avec lequel il a négocié l’accord de cessez-le-feu de 1999.
Sur le front extérieur, la discrète médiation entreprise en avril 2002 par le pasteur français Jean-Arnold de Clermont entre Sassou et ses opposants en exil (Pascal Lissouba, Bernard Kolélas et Jacques Joaquim Yhombi Opango) a du plomb dans l’aile. Le fait qu’elle ait été révélée, à la mi-février (voir J.A.I. n° 2249), a contrarié le chef de l’État. Un an après la signature d’un document censé conduire au rétablissement de la paix, les fruits n’ont donc pas encore tenu la promesse des fleurs.
À l’initiative de Clermont, une rencontre secrète était prévue le 30 mars, à Paris, entre des représentants de Sassou et des émissaires de Lissouba, Yhombi et Kolélas. A-t-elle pu se tenir ? Nous l’ignorons à l’heure où ces lignes sont écrites, mais ce sera indiscutablement un test.

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