Haro sur les pharisiens !

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  • Tshitenge Lubabu M.K.

    Ancien journaliste à Jeune Afrique, spécialiste de la République démocratique du Congo, de l’Afrique centrale et de l’Histoire africaine, Tshitenge Lubabu écrit régulièrement des Post-scriptum depuis son pays natal.

Publié le 8 août 2012 Lecture : 2 minutes.

Le 20 juillet, les sénateurs libériens ont voté comme un seul homme un amendement à la Constitution qui interdit le mariage homosexuel. Ce texte intelligent a été déposé par une certaine Jewell Taylor, ci-devant épouse de… Charles Taylor. Par ailleurs, actuellement à l’étude à l’Assemblée nationale, un projet de loi devra criminaliser les relations sexuelles entre personnes du même sexe. Tous sont d’accord, y compris la chef de l’État, Ellen Johnson-Sirleaf. Le projet de loi passera. Les gays et lesbiennes libériens n’auront qu’à bien se tenir : leurs ébats seront passibles de cinq ans de prison.

Mais que disent ceux qui s’arrogent le droit de régenter la vie sexuelle des autres et affirment que la « sodomie volontaire » est un délit ? Ils assènent, un trémolo dans la voix : « L’homosexualité ne fait pas partie de notre existence en tant que peuple. » Ou encore : « Nous n’avons jamais été cela. » Qu’en savent-ils au juste ? J’ai eu un débat sur la question avec un ami brazzavillois. Pour lui, l’homosexualité a été introduite en Afrique par les Occidentaux le long des villes côtières et elle ne fait pas partie de nos traditions. Donc, il faut la combattre, sinon nous risquons de disparaître. Les homosexuels n’ont pas le droit de revendiquer quoi que ce soit. Ils n’ont qu’à vivre discrètement.

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Mais lorsque je rétorque à mon ami que les hétérosexuels ne se cachent pas, eux, il me répond : « Ce n’est pas la même chose, ils représentent la norme. » Soit. Faut-il pour autant que nos goûts et préférences se ressemblent ? Comme si cela ne suffisait pas, une association dénommée Rassemblement de la jeunesse camerounaise se met en évidence pour proposer l’instauration d’une journée mondiale contre l’homosexualité au nom, notamment, « de la sainte Bible, de la nécessité de préserver l’espèce humaine » et « des atteintes graves faites à l’humanité, à nos traditions, à notre culture africaine en général et camerounaise en particulier ». Je m’interroge : qu’est-ce que c’est que la culture africaine ? Le christianisme et l’islam n’ont-ils pas été imposés à l’Afrique ? Serions-nous, en tant qu’Africains, des êtres extraordinaires ? Arrêtons de nous raconter des inepties. Laissons les homosexuels, cette infime minorité, vivre leur vie, revendiquer leurs droits en tant qu’êtres humains. Battons-nous plutôt pour le développement de nos pays. Battons-nous contre la corruption.

Tous ces inquisiteurs se placent d’un point de vue anal : l’homosexualité est, donc, une « impureté ». Ils sont persuadés que les gays sont des « malades » à extirper de la société. Mais ces hommes et ces femmes, en plus des sens, ont aussi des sentiments. Au nom de quelle morale va-t-on leur interdire de prendre leur pied comme ils l’entendent ? Aujourd’hui, dans moult pays africains, à cause d’un excès de zèle ahurissant, l’homosexualité est un délit passible de la peine capitale (Mauritanie), d’emprisonnement (quatorze ans, en Gambie) ou d’une expulsion du territoire (Somaliland). Trop, c’est trop : ce qui se passe entre deux adultes ne nous regarde pas. 

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