Libye: le conflit met les femmes enceintes à rude épreuve

A la principale maternité de Benghazi, fief de la rébellion dans l’Est libyen, fausses couches et naissances prématurées ont explosé depuis le début du conflit, et le personnel se débat pour accueillir les parturientes.

Libye: le conflit met les femmes enceintes à rude épreuve © AFP

Libye: le conflit met les femmes enceintes à rude épreuve © AFP

Publié le 26 avril 2011 Lecture : 2 minutes.

« Nous manquons de lits, d’instruments et de produits antiseptiques », se désole Fairouz Sahed, responsable des sages-femmes et des infirmières à la maternité de l’hôpital Al-Jamahiriya.

Au deuxième étage, Helen Hali Omegwe, 26 ans, une réfugiée africaine qui vivait auparavant sur le port en attendant son évacuation, vient de donner naissance à des jumeaux. Elle est allongée, épuisée, sur une civière, des filets de sang séché sur les mollets. « S’il vous plaît, je veux ma soeur. Je veux mes vêtements », gémit-elle.

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Les femmes sont réparties dans trois pièces: les accouchements, les fausses couches et les césariennes, et comme tous les lits sont occupés, certaines doivent se contenter de s’assoir sur une chaise.

« Nous avons eu une patiente séropositive mais nous ne l’avons découvert qu’après l’accouchement, alors nous avons tout nettoyé et stérilisé autour d’elle », raconte Mme Sahed.

Mais les produits antiseptiques sont rares et donc réservés à la stérilisation du matériel opératoire. En salle d’accouchement, on se contente d’eau et de savon.

Avant que la révolte engagée mi-février contre le régime du colonel Mouammar Kadhafi ne dégénère en conflit armé, la maternité accueillait en moyenne 30 à 40 femmes par jour. « Maintenant, nous en recevons parfois jusqu’à 62, ce n’est pas normal », affirme Mme Sahed.

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Cette augmentation est attribuée à la fermeture de plusieurs cliniques privées à Benghazi, mais aussi à l’afflux de femmes venant d’Ajdabiya (160 km au sud de Benghazi), transformée en ville fantôme après de violents combats entre rebelles et pro-Kadhafi, ou même de Misrata (à plus de 700 km à l’ouest de Benghazi), devenue un champ de bataille depuis des semaines.

Mais un autre phénomène inquiète le personnel: le pic de césariennes, de naissances prématurées, de morts foetales et de fausses couches depuis le début de la répression de la contestation 17 février.

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« Depuis le début des événements, le nombre de fausses couches est monté en flèche », explique Basma al-Qutraini, 36 ans.

« Avant, nous avions un ou deux cas par jour », ajoute-t-elle, mais depuis la mi-février, ce chiffre est passé à une moyenne de huit par jour, et l’hôpital a eu à prendre en charge 450 fausses couches depuis cette date.

Un nombre important d’accouchements prématurés a également été enregistré, dû, comme pour les fausses couches, à l’anxiété des futures mamans dont le mari est au front ou qui dorment sous le bruit incessant des tirs.

« Beaucoup de femmes accouchent avant terme en période de guerre, en raison de la peur », relève Maria Tesi Genesi, une sage-femme de 45 ans, originaire des Philippines et qui a décidé de rester à Benghazi, quelle que soit la situation.

« Trop de femmes pleurent, pleurent. Je leur demande +vous souffrez+? et elles répondent +non mon mari est loin et se bat+ », dit-elle.

Seule une poignée d’entre elles ont la chance d’avoir un homme qui les attend. La plupart des maris sont sur le front ou contribuent d’une manière ou d’une autre à « la révolution ».

« Je suis si fatiguée, je n’ai pas vu mon mari, il est en mer pour apporter de l’aide aux rebelles de Brega », explique Niadia Mohammed Bachir, 42 ans, sur le point de donner naissance par césarienne à un neuvième enfant.

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