Swaziland: les enseignants en grève contre un régime inflexible
Les élèves du lycée St Mark’s de Mbabane jouent aux échecs ou tricotent en classe faute de professeurs, ceux-ci étant en grève depuis plus d’un mois pour obtenir des augmentations, mais aussi des réformes démocratiques. En vain pour l’instant.
« Notre but ultime est la démocratie », déclare Sibongile Mazibuko, présidente de l’Association nationale des enseignants du Swaziland, pour qui le roi Mswati III, le dernier monarque absolu d’Afrique, est le principal problème du pays. « Il crée la pauvreté lui-même! », lance-t-elle.
Les enseignants se sont mis en grève le 22 juin, exigeant des augmentations de salaires. Les autres fonctionnaires les ont brièvement rejoints, mais leur mouvement s’est essoufflé après que les infirmières ont été contraintes de reprendre le travail par la justice.
Des manifestations sporadiques ont attiré des centaines de personnes dans les rues, systématiquement accueillies par la police avec des balles en caoutchouc, des canons à eau et des matraques.
La plupart des enseignants vont désormais à l’école uniquement pour signer les registres de présence. Ils ne font pas cours.
La police a arrêté 41 d’entre eux, et le syndicat a dépensé près de 150. 000 emalangeni (15. 000 euros) en frais juridiques, selon Mme Mazibuko.
« Les manifestations ne sont plus possibles. Nous allons plutôt poursuivre la grève et occuper les locaux », précise-t-elle.
Leurs exigences financières sont a priori modestes: une augmentation de 4,5% quand l’inflation atteint les 9%.
Un Etat au bord de la faillite
Mais l’Etat swazi est au bord de la faillite.
Le Fonds monétaire international (FMI) a exhorté le gouvernement à réduire sa masse salariale, avant de retirer son équipe faute de progrès dans les réformes exigées.
Des enseignants en grève ont vu leur salaire réduit comme peau de chagrin. Certains ont reçu des lettres de licenciement et ont été menacés de prison s’ils ne se rendaient pas au travail, note le porte-parole du gouvernement Percy Simelane.
« Même si l’argent arrivait maintenant, il serait très difficile d’augmenter les salaires », affirme-t-il à l’AFP.
Les enseignants soulignent que les députés se sont bien augmentés eux-mêmes de 30% en 2010.
« Les enfants des hommes politiques sont à l’étranger. Les enfants du roi sont à l’étranger. Ils ne vont pas investir dans l’éducation pour les pauvres! », accuse Sibongile Mazibuko.
Si les autorités aiment donner l’image d’un paisible royaume attaché à ses traditions où le monarque est aimé de ses sujets, la multiplication des manifestations ces derniers mois et leur répression par les forces de l’ordre ternissent ce tableau.
Les fonctionnaires contestent désormais ouvertement Mswati III qui réclame des sacrifices à son peuple alors que lui-même mène grand train et ne tolère aucune opposition.
Pour le porte-parole du gouvernement, le Swaziland n’a pas besoin de réformes.
« Nous sommes l’une des sociétés les plus démocratiques de la région », affirme-t-il, justifiant la violence policière contre les manifestants par « des provocations ».
Même sans enseignants, la vie poursuit son cours au Swaziland, loin des regards. La plupart des fonctionnaires sont au travail. Tout simplement aussi parce qu’ils ont du mal à joindre les deux bouts.
Quelque 60% des 1,1 million de Swazis vivent avec moins de 2 dollars par jour et, selon le Programme alimentaire mondial (PAM), le quart de la population ne mangera pas à sa faim cette année.
« Le roi aime son peuple. Je ne pense pas qu’il puisse créer des conditions dans lesquelles des gens souffriraient de la faim », affirme Percy Simelane.
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