Rwanda: pas de « participation directe » de la France au génocide, selon Kouchner
L’ex-chef de la diplomatie française Bernard Kouchner, artisan du rapprochement entre Paris et Kigali en 2010, a nié dimanche sur RFI toute « participation directe » de la France au génocide de 1994 au Rwanda, comme l’en a à nouveau accusé le président rwandais.
Dans une interview à Jeune Afrique parue dimanche, M. Kagame a accusé la France d’avoir joué, de même que l’ex-puissance coloniale belge, un « rôle direct dans la préparation du génocide » qui a fait environ 800. 000 morts essentiellement dans la minorité tutsi, et d’avoir participé « à son exécution même ».
« Je n?aime pas qu?on emploie le mot « participation », exactement « participation directe » (. . . ) Ça, je crois que ce n?est pas vrai », a déclaré M. Kouchner interrogé à Kigali par Radio France Internationale (RFI), estimant les propos de M. Kagame « malvenus », à la veille du lancement des célébrations du 20e anniversaire du génocide.
La France a annulé sa participation aux cérémonies qui démarrent lundi, après les accusations de M. Kagame, une décision qui marque un nouveau coup d’arrêt à la normalisation des relations entre les deux pays, empoisonnées par le soupçon malgré la réconciliation officielle de 2010.
« On peut accuser beaucoup la France sur les erreurs politiques qui ont été commises, sur la façon dont cela s?est déroulé, sûrement (. . . ) mais +participation directe+, ça je n?y crois pas », a poursuivi M. Kouchner, qui fut le ministre des Affaires étrangères de Nicolas Sarkozy, premier et seul président français à s’être rendu au Rwanda depuis le génocide.
Le président Sarkozy avait, sans pour autant présenter d’excuses, reconnu en février 2010 de « graves erreurs d’appréciation » et une « forme d’aveuglement » de la France, qui en 1994 était l’alliée du régime extrémiste hutu à l’origine du génocide et dont le rôle à l’époque reste controversé.
De son côté, l’ex-président de la mission parlementaire française d’information sur le génocide du Rwanda, Paul Quilès a de son côté qualifié d’ »ignomineuses » les accusations de M. Kagame.
« Je pense que les victimes, la mémoire du génocide du Rwanda méritent mieux qu?une accusation, que je considère comme ignominieuse (. . . ) au regard des faits », a déclaré l’ancien ministre socialiste de la Défense, également sur RFI.
« M. Kagame est en difficultés (. . . ) internationales avec les Etats-Unis, avec même le Conseil de sécurité (de l’ONU), à la suite de ses ingérences dans l?est (de la République démocratique) du Congo, à la suite d’attentats qui se sont produits, notamment en Afrique du Sud ? c?était fin 2013 ? et sur lesquels M. Kagame a eu une position plus qu?ambiguë », a expliqué M. Quilès.
« Donc la communauté internationale est en train de prendre ses distances avec lui et il détourne l?attention de ses difficultés internationales », a poursuivi M. Quilès, dont la « mission parlementaire d’information sur le génocide » qu?il présidait avait conclu en 1998 à « une erreur globale de stratégie » de la France mais rejeté une implication dans les massacres.
Kigali a longtemps bénéficié, dans ses relations diplomatiques, du sentiment de culpabilité de la communauté internationale restée inerte face aux massacres, mais est depuis quelques mois la cible de sévères critiques, venant même de ses plus proches alliés, Etats-Unis en tête.
Le Rwanda est notamment accusé de déstabiliser l’est de la République démocratique du Congo (RDC) et d’être impliqué dans les meurtres ou tentatives de meurtre de dissidents rwandais réfugiés en Afrique du Sud.
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