RDC: le combat de « Maman Parité » pour les femmes en politique

« 30% de femmes élues »: l’espoir né d’une promesse du président congolais Joseph Kabila a beau avoir été déçu un soir de janvier par un vote du Parlement, « Maman Parité » se bat pour qu’il soit atteint aux prochaines élections.

RDC: le combat de « Maman Parité » pour les femmes en politique © AFP

RDC: le combat de « Maman Parité » pour les femmes en politique © AFP

Publié le 21 mars 2015 Lecture : 3 minutes.

Dans les locaux de l’Observatoire de la parité en RDC qu’elle dirige depuis Bukavu, capitale du Sud-Kivu dans l’est de la République démocratique du Congo, Espérance Mawanzo – de son vrai nom – présente l’opération « clinique électorale » que son ONG vient de lancer.

« Soyez candidate aux élections locales ou provinciales » d’octobre 2015, peut-on lire sur les tracts fraîchement imprimés.

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L’objectif affiché est d’atteindre « 30% de femmes élues » dans les assemblées qui seront constituées à l’issue de ces scrutins.

Le président Kabila s’était engagé en octobre 2013 à instituer pour les partis politiques l’ »obligation (. . . ) de présenter sur chaque liste de candidats » au moins 30% de femmes et de réserver « un siège pour lequel la compétition ne serait ouverte qu’aux femmes » dans les circonscriptions en offrant au moins trois.

Ces deux dispositions figuraient dans le projet de modification de la loi électorale examiné en janvier au Parlement et à l’origine de violences ayant fait, selon les sources, de 27 à 42 morts, essentiellement à Kinshasa.

Le texte était contesté par l’opposition, qui y voyait une manoeuvre pour permettre à M. Kabila, au pouvoir depuis 2001, de se maintenir à son poste au-delà du terme de son mandat en 2016.

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La loi finalement adoptée, en l’absence de la quasi-totalité des députés d’opposition, ne lève pas les craintes exprimées autour du projet et a été débarrassée des deux dispositions favorables aux femmes.

Pire, soutient « Maman Parité », elle est franchement « sexiste » car elle impose une condition de diplôme pour les candidats ainsi que des frais de dépôt de candidature, non remboursables, d’un montant d’environ 100 dollars pour les élections locales.

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– ‘Les hommes nous sous-estiment’ –

Dans un pays où la scolarisation des filles est encore loin d’être une évidence et où les femmes n’ont bien souvent pas voix au chapitre lorsqu’il s’agit du budget familial, ces deux mesures sont « discriminatoires », estime cette petite femme ronde aux cheveux courts et grandes lunettes.

Plus généralement, la sous-représentation des femmes en politique est le reflet du statut inférieur qui leur est très souvent assigné.

En voyageant dans les vertes collines du Sud-Kivu, on ne peut qu’être frappé à la vue de ces colonnes de femmes et filles fléchissant sous le poids des fardeaux de bois ou de produits des champs qu’elles portent sur le dos. Pas un homme pour faire un tel travail.

« Les hommes nous sous-estiment », dit une avocate aidant l’association, expliquant qu’il est pratiquement impossible qu’un homme accepte de se faire défendre par une femme.

Sous le couvert de l’anonymat, elle dénonce le harcèlement sexuel de la part de confrères comme de magistrats. Et « lorsque nous gagnons un procès, on nous accuse d’avoir couché avec le juge ».

La « clinique électorale » veut aider les femmes tentées par la politique, quelle que soit leur tendance.

Alors qu’approche l’ouverture du dépôt des candidatures mi-avril, « nous accompagnons les femmes par des conseils (sur la façon de) constituer leurs dossiers, (. . . ) faire leur campagne et (. . . ) être en contact avec les médias », ajoute « Maman Parité ». « Ce sont des choses qu’ils ne font pas au sein des partis politiques ».

Financée par des fonds étrangers, son ONG dispose de relais dans le pays, mais c’est principalement au Sud-Kivu, dans l’Est meurtri par les conflits armés depuis 20 ans, qu’elle semble en mesure de soutenir réellement les candidates.

L’objectif des 30% ne sera sans doute pas atteint en 2015. Qu’importe. La question féminine, « on n’en parlait pas il y a 15 ans » et « aujourd’hui les décideurs savent que les femmes ne vont pas rester les bras croisés », dit Mme Mawanzo. « Dans 10 ans, 15 ans, on aura un autre Congo ».

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