Les Africains invités à coordonner leurs efforts face à la menace jihadiste
Le ministre français de la Défense, Jean-Yves Le Drian, a appelé lundi les Africains à renforcer leur coopération face au défi jihadiste, alertant sur la menace de « déstabilisation » à partir du sud de la Libye et celle de Boko Haram au Nigeria.
« Il faut faire de la coopération la règle et non plus l’exception (. . . ) Une gestion strictement nationale des enjeux de sécurité est une illusion », a déclaré M. Le Drian à l’ouverture du premier Forum international sur la Paix et la Sécurité en Afrique à Dakar.
« La menace se nourrit de l’absence de frontières et de leur porosité. Le sud de la Libye en est aujourd’hui l’exemple le plus dramatique », a-t-il souligné en référence au regroupement de jihadistes dans cette zone depuis l’intervention militaire française au Mali en 2013.
Au même moment, au sommet de la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (Cédéao) à Abuja, capitale du Nigeria confronté au groupe islamiste armé Boko Haram, le président nigérian Goodluck Jonatahan a sonné l’alarme contre « le fléau montant du terrorisme qui menace à présent la paix et la sécurité de notre sous-région, le Sahel ».
« Nous avons assisté à la prolifération croissante des armes légères. Par voie de conséquence, les pays de la région sont aujourd’hui menacés par les rebelles et les terroristes », a-t-il renchéri, appelant à « une alliance régionale, continentale et mondiale plus forte pour débarrasser la région du terrorisme, de la piraterie et de l’extrémisme violent ».
Concernant Boko Haram, qui a signé une série d’attentats sanglants ces dernières semaines et déborde régulièrement des frontières nigérianes, « la question n’est plus de savoir si c’est un problème national ou régional. Les attaques dans le nord du Cameroun nous apportent la réponse. Il faut une réponse régionale concertée et coordonnée », a souligné M. Le Drian.
Illustrant un certain déficit de coopération, le Nigeria, le Niger, le Cameroun et le Tchad tardent à déployer 2. 800 hommes à leurs frontières pour contrer la menace de Boko Haram.
– Contribution africaine à la sécurité –
« L’appropriation par l’Afrique de ses enjeux sécuritaires n’est pas un slogan ou une posture, c’est une réalité », a toutefois noté le ministre français en rappelant la participation de pays africains à nombre de missions de maintien de paix en Afrique.
Le commissaire de l’Union africaine (UA) à la Paix et à la Sécurité, Smaïl Chergui, a relevé de son côté que les pays africains devaient « prendre leur part dans l’effort de financement », au côté des Européens, pour la sécurité du continent.
« La situation sur le continent demeure plus que jamais préoccupante », a relevé le Premier ministre sénégalais, Mohamed Dionne, en évoquant « le terrorisme, la circulation des armes, la faiblesse des institutions et parfois aussi le déficit démocratique ».
Le forum de Dakar a vocation à devenir un rendez-vous annuel à l’image des conférences sur la Sécurité de Munich en Europe, Manama au Moyen-Orient, Halifax au Canada ou celle du Shangri-La à Singapour, axée sur les questions géostratégiques en Asie du Sud-Est.
Mardi, plusieurs chefs d’Etat – dont le Sénégalais Macky Sall, le Malien Ibrahim Boubakar Keïta et le Tchadien Idriss Deby – viendront clôturer les débats.
Depuis la fin de la Guerre froide, l’Afrique a connu une diminution notable des conflits interétatiques, terrain de confrontations Est-Ouest, mais a vu émerger nombre de conflits internes, notamment de guerres civiles, souvent alimentées par le radicalisme religieux et la criminalité organisée.
Elle dispose par ailleurs d’un potentiel économique considérable, avec plus de 5% de croissance en moyenne par an, doublé d’une explosion démographique – 1,1 milliard d’habitants en 2014, 2 milliards attendus en 2050 – annonciatrice de nombreux bouleversements.
Le continent a certes connu la plus forte progression des dépenses militaires dans le monde en 2013, soit 8,3% à 44,9 milliards de dollars, selon les données de l’Institut de recherche sur la paix internationale de Stockholm (Sipri). Mais de nombreux problèmes de formation et de modernisation des armées demeurent.
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