Tunisie : regain de crédits malgré une conjoncture difficile

Malgré une conjoncture difficile, les banques affichent de bons résultats. Leur contribution à la relance de l’économie et à l’accompagnement des PME reste toutefois modérée.

Dinar tunisien (image d’illustration). © Flickr/金娜 Kim S

Dinar tunisien (image d’illustration). © Flickr/金娜 Kim S

Publié le 16 novembre 2016 Lecture : 3 minutes.

Tunis, le 10 juillet 2015. © Sophia Barakat pour JA
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Tunisie : en quête de confiance

Loué pour le succès de sa transition démocratique, le pays n’a guère été soutenu sur le plan financier. Et sa situation économique est désormais très difficile. Pour accélérer la reprise, les 29 et 30 novembre, il organise une conférence internationale destinée à rassurer et à réveiller les investisseurs.

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Les banques tunisiennes ne semblent pas être affectées par la morosité ambiante. Malgré l’absence de grands projets et un recul des investissements, leurs indicateurs sont au beau fixe, en particulier ceux des établissements privés, à commencer par la Banque internationale arabe de Tunisie (Biat), qui concentre 17,2 % des dépôts, et Attijari Bank, qui réalise l’une des meilleures performances du secteur.

Les bons chiffres des banques

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Parmi les principaux facteurs influant sur l’activité des banques – dont la politique monétaire et les taux d’intérêt établis par la Banque centrale de Tunisie (BCT), la croissance économique, le besoin de financement du Trésor, les dépôts, le crédit et la qualité des emprunteurs –, la plupart auraient pu avoir une incidence négative sur le secteur.

Pourtant, les banques font preuve de pugnacité commerciale et affichent pratiquement toutes de belles performances : le produit net bancaire (PNB) a progressé de 6,5 % en 2015 et de 9,6 % au premier semestre 2016, tandis que les portefeuilles de titres ont enregistré 31 % de gains supplémentaires en six mois.

Face à un marché volatil et compte tenu de leur capacité à générer de la croissance même par gros temps, les banques deviennent des valeurs refuges. Elles se sont adaptées à un contexte économique sans grande visibilité et ont acquis massivement des bons du Trésor, qui leur ont non seulement permis de fournir des fonds à la trésorerie de l’État, mais aussi d’assurer leur propre refinancement via la BCT, qui réinjecte des liquidités dans leurs circuits. Un phénomène de vases communicants dont elles tirent profit.

On leur reproche d’autant plus de ne pas suffisamment accompagner les PME et de contribuer à l’économie du pays en deçà des attentes. « Les banques ne s’engagent pas assez et ont une vision à court terme, si bien qu’il y a une sorte de divorce entre elles et les entreprises », regrette Dhafer Saïdane, spécialiste du secteur bancaire, enseignant-chercheur à la Skema Business School.

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Les crédits en hausse

Pourtant, au cours du premier semestre 2016, elles ont accordé 66,2 milliards de dinars (plus de 29,5 milliards de dollars) de crédit, soit 3,1 % de plus qu’en 2015. Certains imputent cette progression à une conjoncture exceptionnelle : en mars 2016, les banques ont notamment décaissé près de 0,5 milliard de dinars pour répondre aux demandes de crédits des opérateurs télécoms qui souhaitaient acquérir la licence 4G.

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Cette embellie est également due à des facteurs exogènes. La situation des trois banques publiques – Société tunisienne de banque (TB), Banque nationale agricole (BAN) et Banque de l’habitat (BU) –, largement déficitaires, est en cours d’assainissement et une loi bancaire adoptée en juillet 2016 donne un cadre de bonne gouvernance et de transparence au secteur.

Certains estiment cependant que ces réformes manquent d’audace et qu’il serait temps de diversifier le financement des PME via le marché boursier, de repositionner la BNA sur les projets agricoles et de céder les actifs détenus par l’État dans la BH.

La microfinance a le vent en poupe

Plus de 300 000 Tunisiens bénéficient de microcrédits et près d’un million de personnes y sont éligibles (soit environ 10 % de la population tunisienne), selon les institutions de microfinance (IMF) du pays. Depuis 2011, libéré des freins imposés par l’ancien régime et doté d’une nouvelle réglementation qui veille à sa régulation (lois de novembre 2011 et de juillet 2014), le secteur est en plein essor.

En janvier 2016, en collaboration avec les IMF, l’Autorité de contrôle de la microfinance (ACM) a mis en place une centrale des risques afin de mieux surveiller le surendettement. Le rôle des leaders du secteur – Enda (qui a lancé la microfinance dans le pays en 1995), Taysir et Microcred – apparaît aujourd’hui essentiel dans la lutte contre la pauvreté, le chômage et l’exclusion, d’autant que la création de microentreprises conduit (ou remet) certains acteurs de l’économie parallèle dans le circuit formel.

Ces résultats ont séduit le gouvernement, qui a annoncé fin septembre la création prochaine de cinq fonds publics de microcrédit destinés aux jeunes.

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