Investissements étrangers en Algérie : le casse-tête du 51/49

En vigueur depuis 2009, la règle qui exige une participation nationale majoritaire dans les projets d’investissements étrangers va être assouplie. Mais pas question de l’abolir.

Le Parlement algérien le 12 novembre 2008. © AP/SIPA

Le Parlement algérien le 12 novembre 2008. © AP/SIPA

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Publié le 7 décembre 2016 Lecture : 3 minutes.

Vue d’Alger. © Omar Sefouane pour Jeune Afrique
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L’Algérie à l’heure africaine

Le gouvernement et les entreprises cherchent de nouveaux partenaires, de préférence sur le continent. Un tournant majeur que vient consacrer le Forum africain d’investissements et d’affaires, organisé par l’État et le patronat du 3 au 5 décembre.

Sommaire

L’Algérie tente d’aimer – enfin ! – l’entreprise privée et l’investissement étranger. Il était temps ! Si l’on en croit les statistiques de la Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement, la petite Tunisie – pourtant plongée dans les turbulences – a attiré au fil des ans 32,9 milliards de dollars d’investissements étrangers, alors que l’Algérie, presque quatre fois plus peuplée, en comptabilise seulement 26,2 milliards. Pour la seule année 2015, les étrangers ont misé plus de 1 milliard de dollars sur la Tunisie, mais ils en ont retiré 587 millions d’Algérie.

La faute à des réglementations tatillonnes, dont la règle dite « 51/49 » (51 %- 49 %), prévue par l’article 4 bis du code de l’investissement depuis 2009, est le symbole. Son alinéa 2 précise : « Les investissements étrangers ne peuvent être réalisés que dans le cadre d’un partenariat dont l’actionnariat national résident représente 51 % au moins du capital social. » Oui à l’apport de capital, non au pouvoir de piloter l’entreprise algérienne à sa guise. Pas très rassurant pour la bonne gestion et le retour sur investissement.

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Une norme peu encourageante

« Cette règle est très répandue dans le monde, et nous sommes favorables aux législations qui protègent les industries stratégiques et les secteurs sécuritaires, analyse Ventzislav Kotetzov, de la division de l’investissement et des entreprises de la Cnuced. Mais quand elle couvre tous les investissements étrangers et dans tous les secteurs, ce n’est évidemment pas très encourageant. » Pour le PDG de la compagnie algérienne Alliance Assurances, Hassen Khelifati, les choses vont dans le bon sens.

« Il y a un consensus pour revoir cette règle, qui est en passe d’être assouplie, explique-t‑il. Elle doit continuer à protéger les secteurs stratégiques ou les grands monopoles publics, mais pas les PME. Par ailleurs, il faut relativiser son importance : en effet, avant qu’elle soit instituée, les étrangers ne se bousculaient pas pour venir en Algérie. Même si nous ne sommes pas encore dans une situation optimale, l’environnement des affaires s’améliore. »

Un expert français minimise, lui aussi, les dégâts de la règle 51/49. « Quand on choisit bien son partenaire algérien, le fait de ne pas détenir la majorité du capital n’est pas grave, car celui-ci laisse son investisseur étranger piloter, puisqu’il a en effet surtout besoin de son savoir-faire. En contrepartie, grâce à sa connaissance du terrain, le joint-venture bénéficiera de biens immobiliers à prix réduit et de crédits à très bas taux et se verra faciliter l’inévitable parcours du combattant politico-administratif ! »

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Suppression de la loi

Le FLN, au Parlement, et le Forum des chefs d’entreprise (FCE), sur la place publique, demandaient à cor et à cri que l’épouvantail du 51/49 soit retiré du code de l’investissement et fixé chaque année par la loi de finances.

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« Il faut un peu de discernement, plaide Brahim Benabdeslam, vice-président du FCE. Pour les bijoux de famille, c’est 100 % du capital que doit conserver l’État ! En revanche, dans le tourisme, le secteur tertiaire ou les PME, il faut supprimer cette règle. C’est en bonne voie, car elle a été extirpée du code de l’investissement et, comme nous le demandions, la loi de finances discutée chaque année permettra de l’adapter, en souplesse, à la situation économique du moment. »

Il est urgent que le gouvernement algérien complète cette mesure phare et qu’il mette fin, par exemple, à l’obligation de recourir au financement local des investissements. Il restera à persuader l’Administration, les douanes et les banques publiques de ne pas annihiler ces efforts de modernisation comme elles le font encore trop souvent par peur ou par paresse, y compris à l’égard des entreprises purement algériennes.

Changement de ligne

Le nouveau code de l’investissement a été adopté par le Parlement en juillet et est entré en vigueur à la mi-août. La clause 51/49 en est « extirpée », mais elle est maintenue dans le droit algérien et sera désormais ajustée dans le cadre de la loi de finances annuelle. Le code introduit quant à lui de nouvelles facilités (assouplissement de certaines procédures) et des mesures incitatives : franchise de TVA ; exonérations fiscales et douanières ; exemptions, pour les nouvelles activités, de l’impôt sur le bénéfice des sociétés et de la taxe sur l’activité professionnelle pendant trois ans ; exonération, pour une durée de dix ans, de la taxe foncière sur les biens immobiliers entrant dans le cadre de l’investissement, etc. Il prévoit des avantages supplémentaires pour les « activités privilégiées », à savoir l’industrie, l’agriculture et le tourisme. (C. M.)

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