Qui sont les femmes d’affaires les plus influentes d’Afrique ?
Dans un monde économique encore très masculin, elles sont de plus en plus nombreuses à accéder à des postes stratégiques au sein de grands groupes. Jeune Afrique vous présente les dirigeantes les plus puissantes d’Afrique francophone, dans un dossier spécial à découvrir dans son édition 2930, en kiosques du 5 au 11 mars.
Féminiser le monde des affaires… C’est loin d’être gagné. Il suffit de visiter les salons professionnels, d’assister aux conférences où se succèdent les panels d’experts ou de fréquenter les cocktails donnés par les entreprises pour le constater. Les dirigeantes d’entreprise sont encore trop rares. Mais les choses commencent à évoluer. Grâce à leurs compétences, à leur pugnacité et à leur endurance, de plus en plus de femmes s’imposent à des postes d’influence dans les groupes africains.
Pour leur donner plus de visibilité et saluer leur réussite, Jeune Afrique a établi le premier classement des dirigeantes les plus puissantes d’Afrique francophone. Elles sont cinquante, toutes numéro un, deux ou trois de leur entreprise, travaillent au Maghreb ou dans des pays subsahariens, dans des secteurs variés.
Dynastie familiale
Un bon nombre d’entre elles, épouses ou filles de fondateurs, prolongent une dynastie familiale. Si elles ne sont pas toutes à l’origine de leur fortune, elles ont toutes prouvé leur capacité à s’entourer de collaborateurs efficaces et à faire fructifier leurs intérêts.
Parmi elles, un grand nombre de Marocaines se trouvent à la tête des plus grands groupes, à l’image de Miriem Bensalah-Chaqroun – patronne des patrons du royaume, présidente-directrice générale des Eaux minérales d’Oulmès et administratrice vice-présidente de Holmarcom –, ou Mama Tajmouati, qui a succédé à son époux à la tête du conglomérat Ynna Holding. Au sud du Sahara, les héritières sont aussi nombreuses, comme Janine Kacou Diagou, que son père prépare depuis plusieurs années à sa succession à la tête de l’assureur NSIA, ou encore Anta Babacar Ngom Bathily, qui, à seulement 32 ans, préside depuis un an l’agro-industriel Sedima.
Les femmes ont souvent une vision perfectionniste. Elles veulent se prouver beaucoup de choses, et cela conduit à la performance
Au-delà de ces destins singuliers, c’est la politique des entreprises qui a fait évoluer les mentalités. Ces dernières années, les industries des services financiers et des télécoms ont largement montré la voie. Citi, Ecobank, Oragroup, BGFI, Bank of Africa, Saham, mais aussi Orange, MTN, Millicom ou Inwi ont promu des femmes à des postes de direction. Et toutes les dirigeantes interrogées font preuve d’une volonté d’accroître la présence des femmes au plus haut niveau.
Reflet des leaders économiques africains
Notre classement reflète aussi le poids des économies. Les entreprises marocaines sont les plus nombreuses, devant les tunisiennes, puis viennent les camerounaises, les ivoiriennes, les sénégalaises… Seule l’Algérie déroge à la règle, avec une seule représentante, par ailleurs épouse de l’un des hommes d’affaires les plus puissants du pays.
Les dirigeantes sollicitées sont cependant unanimes : la guerre pour la parité est très loin d’être gagnée. Car, à diplôme et cursus égaux avec leurs homologues masculins, le « plafond de verre » reste pour les femmes une réalité. « Même si nous montrons notre capacité à diriger, on ne nous accorde pas assez souvent cette possibilité », témoigne la Camerounaise Rebecca Enonchong, directrice d’AppsTech, une société spécialisée dans les logiciels de gestion d’entreprise.
D’après les données fournies en août 2016 dans le rapport « Women Matter » (« les femmes comptent ») du cabinet américain McKinsey au sein des 210 sociétés africaines cotées dans 24 Bourses, les femmes n’occupent que 5 % des postes de directeur exécutif et 15 % seulement des sièges dans les conseils d’administration. C’est mieux qu’en Asie, qu’en Amérique latine et même qu’en Europe pour les directrices exécutives, mais beaucoup reste à faire.
Le succès féminin dans les entreprises
Entreprendre reste pour la plupart des femmes le parcours de la combattante. En RD Congo, par exemple, elles ne peuvent pas posséder de terres ni enregistrer la raison sociale de leur entreprise sans l’aval de leur mari. Pourtant, en Afrique comme ailleurs, elles ont toutes les qualités pour réussir en tant qu’entrepreneuses. « Les femmes ont souvent une vision perfectionniste des choses, avec une organisation plutôt efficace. Elles veulent se prouver beaucoup de choses, et cela conduit à la performance », remarque Salwa Idrissi Akhannouch, PDG et fondatrice d’Aksal, groupe marocain spécialisé dans la distribution et l’immobilier commercial.
Et les résultats parlent d’eux-mêmes. « Les sociétés dont le conseil d’administration compte plus de 31 % de femmes ont, toutes choses égales par ailleurs, un Ebit [bénéfice avant intérêts et impôts] supérieur de 20 % à la moyenne du secteur. Pour celles dont les conseils sont à 100 % masculins, la tendance est plutôt inverse : l’Ebit est inférieur de 17 % », mentionne le rapport de McKinsey.
Nos interlocutrices veulent y croire : plus visibles à la tête des entreprises, les femmes inciteront les plus jeunes à se projeter à des postes de responsabilité, et cela se répercutera sur l’ensemble de la société. Jusqu’au jour où, comme chez le spécialiste de l’immobilier Sipres, chez qui les femmes représentent 69 % des collaborateurs, on sera contraint de procéder à une discrimination positive en faveur des hommes.
L’édition digitale du J.A. n° 2930 est accessible ici:
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