Le Niger est engagé dans une course contre la montre

Le pays est engagé dans une course contre la montre pour éviter le décrochage. Le gouvernement, qui baisse les dépenses publiques et augmente les impôts pour tenter d’assainir les finances publiques, a d’autant plus besoin de l’aide des bailleurs internationaux que la situation sécuritaire se dégrade. Décryptage.

Manifestation contre le programme présidentiel, le 4 mars, à Niamey. © BOUREIMA HAMA/AFP

Manifestation contre le programme présidentiel, le 4 mars, à Niamey. © BOUREIMA HAMA/AFP

ProfilAuteur_AlainFaujas

Publié le 28 février 2018 Lecture : 3 minutes.

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Niger : et pourtant, il tient bon

En première ligne contre le terrorisme, le pays parvient à maintenir son économie à flot. Difficile, en revanche, de progresser sur le front du développement social. De Niamey à Agadez, il avance, mais à petits pas.

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Édito. Le Niger parviendra-t-il à se développer suffisamment pour fournir à ses millions de jeunes les emplois qui les dissuaderont de rejoindre les rangs des migrants ou ceux des terroristes ? Pourra-t-il mener de front la lutte contre Boko Haram ou l’EI et investir dans une industrie agro­alimentaire qui permettrait de créer un peu plus de valeur sur place ? Comme le prédit – ou l’espère – le FMI, sera-t-il capable de porter sa croissance à 7,2 % à l’issue de son Plan de développement économique et social 2017-2021 tout en accueillant 300 000 réfugiés sur son sol ?

Si l’on fait, en ce début de 2018, le point sur cette course contre la montre, la partie demeure incertaine. Incontestablement, le rythme de croissance s’accélère (voir tableau). La pluie a été généreuse l’an dernier ; la production et les prix du pétrole se sont gonflés ; le crédit bancaire a progressé, et l’apurement des arriérés publics à l’égard du secteur privé est enclenché. L’économie du voisin nigérian a redémarré. L’inflation semble devoir demeurer autour de 2 %, et la balance des paiements devrait, selon le FMI, avoir été positive en 2017. Les réserves de change sont en voie de reconstitution.

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Courage

Le gouvernement a pris les problèmes à bras-le-corps. Le déficit budgétaire menaçait de déraper ? Pour le faire baisser de 4,5 % en 2017 à 3,9 % en 2018, il a augmenté les tarifs de l’électricité et réintroduit une TVA de 5 % sur les produits de première nécessité. Il a gelé les traitements et les recrutements dans la fonction publique. Tout en améliorant l’efficacité de ses administrations fiscale et douanière, il a créé une taxe d’habitation et un impôt minimum sur les plus-values en capital et sur les transactions immobilières.

On peut aussi mettre à son actif la montée en puissance du tribunal de commerce, créé en avril 2016 pour traiter les litiges commerciaux. On espère la mise en œuvre vigoureuse de la loi prévoyant une scolarité obligatoire jusqu’à 16 ans pour les filles, mesure déterminante pour retarder l’âge du mariage et faire reculer le taux de croissance faramineux de 3,9 % par an.

Le mélange réduction des dépenses-hausse des impôts affecte une population très pauvre

Ce courage incontestable pour changer les pratiques et les mentalités se trouve contrecarré par l’intensification des attaques terroristes, à l’Est comme à l’Ouest. L’insécurité nuit au commerce du bétail, des poivrons et des produits de la pêche, exportés vers le Nigeria par la région de Diffa. Elle oblige le gouvernement à des dépenses massives en faveur de la sécurité qui ont atteint 271 milliards de F CFA (plus de 413 millions d’euros) et 6,3 % du PIB en 2016, au détriment, notamment, des budgets sociaux.

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Les vents contraires demeurent forts. Le mélange réduction des dépenses-hausse des impôts affecte une population très pauvre, d’où un mécontentement qui s’exprime par des grèves et des manifestations. La chute des cours de l’uranium, due au gel de nombreux programmes nucléaires dans le monde, a contraint la Somaïr, filiale nigérienne du groupe français Areva, à licencier plusieurs centaines de salariés en octobre 2017 et repousse sine die l’ouverture de la mine d’Imouraren, qui devait doubler la production nationale.

Le Niger a plus que jamais un besoin urgent du renforcement de l’aide des bailleurs de fonds et de l’apport des investisseurs internationaux. La conférence de la Renaissance, organisée en décembre 2017 à Paris, a permis de récolter la somme record de 23 milliards de dollars de promesses de financements. Pourvu qu’elles soient tenues, et vite !

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