Péché de chair et charia

Adultère, Noor est condamnée à la lapidation. Une humanitaire française décide de la sauver. La plus libre des deux n’est pas celle que l’on croit.

Publié le 16 juillet 2007 Lecture : 2 minutes.

La photo comme le titre sont trompeurs. Sept Pierres pour la femme adultère exhibe en couverture une femme voilée, comme on en voit beaucoup ces temps-ci sur les publications européennes. Le titre fait penser à un ouvrage de plus sur le malheur des musulmanes, avec, au menu, des lapidations et des mariages forcés qui constituent le fonds de commerce des livres à la mode. Il n’en est pourtant rien à la lecture du dernier roman de la Libanaise Vénus Khoury-Ghata, où l’écriture est d’une telle intensité, le style si épuré que nous savons déjà que nous sommes en territoire de littérature.
En racontant l’histoire de Noor, condamnée pour adultère et sauvée par une humanitaire occidentale, Vénus Khoury-Ghata entreprend une immersion dans le village de Khouf (« la peur », en arabe) situé dans un pays musulman jamais nommé, une bourgade oubliée par les dieux, souffrant de sécheresse, de misère et d’analphabétisme. Elle suit l’itinéraire comme la psychologie de deux femmes : Amina, condamnée à la marginalité ; Noor, aux prises avec la fatwa punissant celles qui osent aimer en dehors du mariage. Mais Vénus Khoury raconte surtout le face-à-face de deux mondes différents, l’un nanti, l’autre démuni. En contrepoids de l’histoire des deux villageoises, elle suit le parcours de l’humanitaire française abandonnée par son amant et seule comme toutes les femmes en définitive. Ce jeu de miroirs permet de remettre en question les convictions de la narratrice, de lui faire percevoir la souffrance à travers le filtre féminin et non celui des préjugés et des alibis culturels.
Arabe chrétienne, Vénus Khoury ne tombe pas dans l’exotisme, ni ne se drape du manteau de la charité, elle se moule encore moins dans le personnage du sauveur hollywoodien. Bien au contraire, c’est à la lumière du drame des autres qu’elle analyse le drame de l’Étrangère. Il en résulte non pas un discours sur les femmes musulmanes, mais un roman féminin, non pas un pamphlet contre l’homme mahométan, mais un tableau de la lâcheté des hommes, en général, non pas un réquisitoire contre une culture, mais un regard lucide sur soi chevillé à l’Autre. Tout cela est décrit avec tant de justesse et de brio que l’on pardonne volontiers et le titre et la photo !

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