Moncef Ghachem

À 60 ans, le marin-poète n’a cessé de célébrer la mer à travers son uvre.

Publié le 16 juillet 2007 Lecture : 2 minutes.

Si vous croisez du côté de Sidi Bou Saïd un homme au chapeau vissé sur le crâne, vêtu d’un pull rayé, le visage buriné par le soleil et l’esprit ailleurs, c’est lui. Ce promeneur solitaire est un poète de la mer. À 60 ans, Moncef Ghachem a une uvre derrière lui, couronnée par le prix Senghor pour la poésie en 2006, ainsi que de nombreuses traductions en arabe, dont celles des recueils de René Char, Henri Michaux ou Michel Butor. S’il est là, sur les cottages de Sidi Bou Saïd, ce n’est pas pour longtemps. Toutes les semaines, il repart à Mahdia, la ville où il est né, pour pêcher la sardine.
Toutes les années qu’il a passées comme agent du ministère des Affaires étrangères ou de la Culture, il ne les compte pas, ni celles où il a écrit pour la presse locale. « C’était juste un gagne-pain », précise-t-il. Car celui qui a eu plusieurs métiers n’a qu’une passion : la mer. Petit garçon, il maniait déjà les rames et lançait le filet. Chez lui, la grande bleue, c’est un atavisme. Il est né au milieu d’une famille de pêcheurs, son père pratiquait ce métier dès l’âge de 6 ans, et son grand-père était surnommé le « Bey de la mer », parce qu’il savait affronter les vagues.

C’est dire si la mer imprègne la vie de Moncef. Et il faut l’écouter parler d’elle, user des mots qui la désignent, énumérer par dizaines les noms des poissons, évoquer les mille précautions à prendre pour que ce « fauve serein et calme », associé dans sa culture familiale au naufrage, ne vous dévore pas. Car « la mer peut être avide, sans gain ni prise, elle peut être sévère et manger les hommes. Il ne faut rien lui demander, il faut tout lui arracher et s’estimer heureux quand on rentre avec sa part de poissons sans avoir essuyé sa colère ». Et de renchérir : « J’adore les différents mouvements de la mer. Elle est sereine, confiante comme de l’huile dans une jarre, puis elle n’est plus que vague houleuse, prise d’assaut par le vent. » Lorsque Ghachem se tait, il récite en son for intérieur les poètes grecs qu’il a appris par cur. Ou bien il égrène les vers de Lorand Gaspar, qui lui a permis, le premier, de publier dans sa revue Alif. Avant qu’il ne lève les yeux sur vous et vous dise sur le ton de la confidence : « Vous savez, il se passe toujours quelque chose en mer : un éclat de poisson, une seiche qui s’approche des rochers côtiers, une voile à l’horizon qui annonce le vent du Nord Tout ce que la mer peut avoir comme abondance et profusion. » Et le marin-poète de conclure : « La mer apprend aux pêcheurs à parler peu. »

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