Speed-dating à la marocaine

Publié le 16 juin 2008 Lecture : 3 minutes.

Le speed-dating, c’est quelque chose qui est en train de se développer rapidement ici en Europe – je crois que ça vient d’Amérique, en fait. C’est parti d’un constat banal : on n’a plus le temps de se rencontrer, dans la société moderne. On est tout le temps en train de courir à droite et à gauche, on stresse, on travaille trop – on n’a donc plus l’occasion de rencontrer l’âme soeur.
Nos ancêtres, qui, c’est bien connu, ne fichaient rien, avaient amplement l’opportunité de rencontrer le partenaire idéal – et même plusieurs, c’est peut-être à cause de cela qu’ils étaient polygames.

Le speed-dating, entre nous, je ne veux pas faire de la peine aux Américains, mais il existe déjà depuis un siècle en France, du moins dans la noblesse. Les gens de la haute y organisent des rencontres entre jeunes gens, ils appellent ça des rallyes – ne me demandez pas pourquoi. Seulement, ce dating-là n’est pas speed du tout, il est même très slow, ça dure des après-midi entiers ; mais peu importe, pourvu que le fils du baron et la fille du duc se découvrent des atomes crochus et finissent par se marier et perpétuer la généalogie.
On n’a plus le temps pour ce genre de fariboles au ralenti. Il faut faire vite aujourd’hui. Le speed-dating, ça veut dire que vous vous inscrivez sur une liste et puis, le jour venu, vous allez de table en table faire connaissance de gens du sexe opposé. Vous avez exactement trois minutes – trois minutes ! – pour décider si vous voulez revoir la personne en question – dans ce cas, on échange des numéros de téléphone – sinon, c’est « Hasta la vista, baby », comme dirait Schwarzenegger, et on passe à la table suivante. Ce n’est pas le summum du romantisme, d’accord, mais il paraît que c’est efficace.
Vous me dites :
– Tout ça, je le sais, je l’ai même pratiqué, pourquoi tu nous parles d’un truc vieux comme Madonna ?
OK, mais je parie que vous n’avez jamais entendu parler du village de Cothen, dans la province d’Utrecht ? Avouez !

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Ce week-end, il se passe quelque chose d’insolite à Cothen : la première séance de speed-dating réservée aux Marocains des Pays-Bas. Une petite centaine de postulants se sont inscrits (ça coûte 50 euros) et tout ce beau monde va converger vers le village précité, au grand effroi de ses habitants, qui n’ont jamais vu d’Africain ailleurs qu’à la télé.
Le plus marrant dans ce speed-dating chérifien, ce sont les tables. Sur chaque table se dresse une sorte d’écran en bois qui fait que les deux rosissants candidats à l’amour, assis de part et d’autre de l’écran, n’ont aucun moyen de se voir. Pour l’organisateur, Rachid el H., c’est justement ce qui fait l’intérêt de la chose : puisque les mariages sérieux sont fondés sur autre chose que l’apparence physique, on se passe donc de celle-ci. Les deux tourtereaux aveugles se posent des questions très convenables (« Respectes-tu vraiment les femmes ? Veux-tu des enfants ? Quelle éducation leur donnerais-tu ? Tu sais cuisiner ? »). S’ils sont d’accord sur tout, ils échangent leurs numéros de téléphone au-dessus de l’écran ou sous la table. La suite ne regarde qu’eux.
J’ai chaudement félicité Rachid el H. pour son sens de l’innovation. Au fait, comment a-t-il rencontré sa femme ?
– Je ne l’avais jamais vue, c’est ma mère qui a tout arrangé.
Ceci explique peut-être celaÂÂÂÂÂ

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