Lassiné Diawara, investisseur touche-à-tout

Banquier, industriel, propriétaire foncier… Lassiné Diawara multiplie les casquettes. Portrait d’un businessman dont le parcours a basculé après sa rencontre avec Vincent Bolloré.

Blaise Compaoré, Djibrill Bassolé, Jean-Marie Compaoré… Lassiné Diawara est bien introduit. © Ahmed Ouaba pour J.A.

Blaise Compaoré, Djibrill Bassolé, Jean-Marie Compaoré… Lassiné Diawara est bien introduit. © Ahmed Ouaba pour J.A.

Publié le 20 mai 2014 Lecture : 4 minutes.

La boucle ferroviaire ouest-africaine, Lassiné Diawara ne pense plus qu’à ça. « L’homme de Bolloré » – comme on le surnomme parfois – maîtrise parfaitement ce sujet hautement stratégique pour la sous-région et le groupe français.

Sur les murs de son vaste bureau situé avenue Kwame-Nkrumah, dans le quartier des affaires de Ouagadougou, le businessman burkinabè, 65 ans, a d’ailleurs accroché deux photos : l’une du président Blaise Compaoré, l’autre de Vincent Bolloré… Et un poster de train, symbole de ce qui demeure l’un des pans les plus importants de son « petit » empire, Sitarail. La société gère le chemin de fer reliant Abidjan à Ouagadougou. Avant d’atteindre, demain, Niamey puis Cotonou.

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Bio express

1949 – Naissance à Bobo-Dioulasso
1974-1982 – Secrétaire général de la CCIA de Haute-Volta
1984 – Nommé économiste à la CEAO
1986 – Rencontre avec Vincent Bolloré
1990 – Président du conseil d’administration (PCA) de la Macubig
1997 – PCA de BOA Burkina
2009 – 1er PCA africain de Sitarail
2014 – Développe un complexe commercial et de loisirs de 4 000 m2 

Issu d’une lignée de commerçants originaires de Bobo-Dioulasso et actifs jusqu’au Mali, l’homme d’affaires est né dans une famille aisée.

« L’ami Vincent »

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Au milieu des années 1980, alors qu’il travaille pour la Communauté économique de l’Afrique de l’Ouest (CEAO, l’ancêtre de l’UEMOA, l’Union économique et monétaire ouest-africaine), il rencontre « son ami » Vincent Bolloré, qui lui met le pied à l’étrier.

Aujourd’hui à la tête de l’une des plus grandes fortunes du pays, « il est au centre des affaires », reconnaît un proche.

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Le premier vice-président de la Chambre de commerce et d’industrie forme un tandem avec Alizéta Ouédraogo, présidente de l’organisme et puissante opératrice économique, surnommée « belle-mère nationale » par les Burkinabè en raison de ses liens de parenté avec la famille Compaoré : elle n’est autre que la belle-mère de François, frère et très influent conseiller économique du chef de l’État.

« Son indéniable connaissance du secteur informel et des commerçants qui s’y sont bâti une fortune et mon implication dans le secteur structuré de l’économie sont complémentaires », juge Lassiné Diawara.

Réseaux

On le dit homme de réseaux parce qu’il a ses entrées au palais de Kosyam, fréquente le ministre des Affaires étrangères Djibrill Bassolé, Mgr Jean-Marie Compaoré ou le nouvel opposant Roch Marc Christian Kaboré – ancien dauphin de Blaise qui a claqué la porte du parti au pouvoir en début d’année.

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À cette remarque, il éclate de rire : « Tout ça est vrai ! » Et il ajoute : « Je suis un ami des bons et des mauvais jours. Je ne renie pas mes amitiés même si, parfois, nos approches politiques divergent. » Arguant de la nécessité d’entretenir des relations privilégiées avec les autorités administratives et politiques pour faire entendre le secteur privé, Lassiné Diawara inspire confiance. « Il est méthodique et tient parole », confirme le patron d’un établissement financier.

Résultat : il est incontournable ou presque. Banquier, industriel, propriétaire foncier, il multiplie les casquettes. Il préside ainsi les conseils d’administration de Bank of Africa (BOA) Burkina Faso, de Mabucig – Manufacture burkinabè de cigarettes appartenant au britannique Imperial Tobacco – ou de Bolloré Africa Logistics Burkina Faso, sociétés dont il possède des parts minoritaires. Il est aussi au tour de table d’Onatel, l’opérateur téléphonique national, de Tedis Pharma, la société burkinabè de distribution de produits pharmaceutiques, de la télévision BF1… et il détient 97 % du manutentionnaire Sageci tout en contrôlant la société d’investissement Amila.

Jeunes pousses

« Dans mes activités, je privilégie la participation au capital, explique Lassiné Diawara. Même si je suis minoritaire, j’essaie d’être l’actionnaire burkinabè de référence. »

Avec un certain succès : ses seules parts dans BOA Burkina, cotée à la Bourse régionale, sont valorisées à une quinzaine de millions d’euros. Le patrimoine immobilier de celui qui possède une exploitation de 300 ha dépasserait les 5 milliards de F CFA (7,6 millions d’euros). « Je perçois des dividendes substantiels », avoue-t-il. Selon une évaluation réalisée par J.A., ses revenus annuels pourraient avoisiner plusieurs centaines de millions de F CFA, uniquement en dividendes. Ce qui lui permet de dépenser chaque année 50 millions de F CFA pour la communauté : dans la réalisation d’une école et d’un collège à Séguéré de Sarfalaye ou d’une maternité à Kienfangué, par exemple.

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Mais son grand objectif social, c’est aider les jeunes entrepreneurs à se lancer. « Mon passage dans une institution d’appui au secteur privé [il a été secrétaire général de la Chambre de commerce, d’industrie et d’artisanat de Haute-Volta] m’a donné l’habitude de soutenir l’émergence d’une classe d’hommes d’affaires moderne et informée », concède-t-il.

Dans la plus pure tradition des businessmen burkinabè, qui, depuis le patriarche Oumarou Kanazoé, ont toujours pris soin de parrainer de jeunes pousses en les finançant ou en leur ouvrant des portes. Kader Cissé, jeune patron du groupe Africom, le décrit comme un homme d’affaires hors pair et humble.

Dans quelques mois, Lassiné Diawara lancera les travaux d’un grand complexe commercial et de loisirs de 4 000 m2 dans la capitale. Il a déjà dépensé 50 millions de F CFA pour réaliser des études techniques aujourd’hui achevées. Ce projet de 2 milliards de F CFA est mené par l’un de ses fils – il a quatre enfants -, qui a émigré aux États-Unis et veut désormais investir dans son pays. Lassiné Diawara contribue également au développement du futur complexe hôtelier de Koubri, porté par un autre de ses fils. Une façon de passer le relais en douceur, tout en restant à l’affût d’investissements avisés.

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