« Rien ne s’oppose au retour de Ouattara »

Ancien Premier ministre ivoirien

Publié le 18 juin 2003 Lecture : 3 minutes.

Il nous a rendu visite au La dernière fois que Pascal Affi Nguessan est venu au siège de J.A./l’intelligent, c’était en mars 2001. Nommé Premier ministre cinq mois plus tôt, il était entouré d’une délégation de quatre personnes, dont le ministre des Affaires étrangères d’alors, Abou Drahamane Sangaré. Celui-ci l’a encore accompagné ce 30 mai, avec Odette Sauyet (ancien ministre du Commerce intérieur) et Laurent Akoun (secrétaire général adjoint du Front populaire ivoirien).
Entre les deux visites, il y a eu le 19 septembre 2002 (début de l’insurrection armée qui secoue la Côte d’Ivoire jusqu’à ce jour), et l’accord de Marcoussis du 24 janvier 2003 qui a décidé d’un partage du pouvoir dans le cadre de la réconciliation nationale. Sortis du gouvernement à la faveur de la redistribution des postes, Affi Nguessan et Sangaré sont cette fois-ci revenus à J.A.I. en leurs qualités respectives de président et vice-président du FPI. Ils terminaient une « mission de sensibilisation » qui les a amenés, du 13 mai au 1er juin, à rencontrer les dirigeants et leaders de partis politiques de France, d’Allemagne, d’Espagne, de Suisse et de Grande-Bretagne.
Les salutations d’usage terminées, François Soudan sonne la charge par une question sur le bilan de la tournée européenne. « Je crois qu’il a été positif. Rien qu’en France, nous avons mis les choses à plat avec le ministre des Affaires étrangères Dominique de Villepin, sa collègue de la Défense Michèle Alliot-Marie, mais aussi avec nos amis du Parti socialiste », répond l’ancien Premier ministre. Et d’enchaîner, calme, même sur les questions qui fâchent comme les relations tendues entre le pouvoir de Laurent Gbagbo et Dominique de Villepin : « L’écart entre le Quai d’Orsay et Abidjan se réduit. Villepin nous a chaleureusement reçus. La diplomatie française a compris l’erreur de vouloir, pour sortir de la crise, exclure Laurent Gbagbo pour ne composer qu’avec le seul Premier ministre de transition. Il ne peut pas y avoir de solution si celui-ci refuse l’autorité du président, prévue par la Constitution. » Et les autres ministres, ceux du Rassemblement des républicains notamment, restés plusieurs semaines à l’hôtel à Abidjan ? Affi Nguessan n’y va pas avec le dos de la cuillère : « Certains ont besoin de justifier leur présence dans le processus, par un excès de zèle sécuritaire. » Il n’est pas plus tendre avec Guillaume Soro, secrétaire général du Mouvement patriotique de Côte d’Ivoire devenu ministre d’État chargé de la Communication : « Je n’ai rien contre lui à titre personnel. Mais on ne s’improvise pas ministre, il faut au moins connaître la différence entre une loi et un décret. J’ai appris qu’il est passé en catimini en France il y a quelques jours pour suivre une petite formation. »
À 50 ans, l’ingénieur des télécommunications a changé. Moins tendre qu’il y a deux ans, il a dû durcir le cuir pour ne pas finir dans l’estomac des crocodiles du marigot politique ivoirien.
Le « cas » Alassane Dramane Ouattara, récurrent dans le débat politique ivoirien depuis une dizaine d’années, ne pouvait être passé sous silence. « Rien ne s’oppose au retour de Ouattara », lâche-t-il, visiblement embarrassé. Avant de venir à une question qui, semble-t-il, le passionne plus : le FPI, aujourd’hui en proie à des divisions entre « durs » et « modérés », et débordé de toutes parts par des mouvements hétéroclites, dits « patriotes », qui ont essaimé dans la sphère du président Gbagbo à la faveur de la crise. En bon politique, l’ancien Premier ministre récuse la dualité anti- et pro-Marcoussis, et estime, malgré leurs divergences sur certaines questions, avoir de « bons rapports » avec le président de l’Assemblée nationale Mamadou Koulibaly, et n’être point importuné par les multiples déclarations de Simone Gbagbo. Il assure ne pas avoir d’ambition présidentielle, dans une réplique qui sonne déjà comme un slogan de campagne : « Tous derrière Gbagbo en 2005 ! »
Après une heure et demie d’entretien, notre hôte prend congé pour rendre « une visite de courtoisie » à Ouattara, dans le 16e arrondissement de Paris.

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