Niger : l’ancien putschiste Salou Djibo peut-il revenir à la présidence ?
Salou Djibo a été investi candidat à la présidentielle par son parti le 28 juin. Que peut espérer l’ancien président de la transition ?
Est-ce l’heure du retour, tant annoncé, pour le général Salou Djibo ? L’ex-chef de la junte au pouvoir de février 2010 à avril 2011 a été investi dimanche 28 juin candidat du parti Paix Justice Progrès (PJP) pour la présidentielle, dont le premier tour est prévu le 27 décembre 2020.
« C’est avec humilité (…) que j’ai accepté de porter les couleurs de notre parti en tant que candidat à l’élection présidentielle », a-t-il déclaré au Palais des Sports de Niamey. Salou Djibo s’était retiré de la scène politique en 2011, occupant ensuite un poste à la Cedeao, à la tête de la task force pour la libre circulation des personnes et des biens.
Le général quatre étoiles résidait à Abuja, au Nigeria, mais séjournait souvent à Ouagadougou, au Burkina Faso, où sa seconde épouse travaillait. Il prenait également part aux différentes cérémonies honorifiques au Niger, aux côtés du président Mahamadou Issoufou, dont il était resté proche.
Retour
Mais Salou Djibo préparait également un retour au premier plan de la vie politique de Niamey. Le 15 mai 2019, il avait annoncé se mettre en retraite anticipée de l’armée, sans révéler davantage ses intentions. Toutefois, il espérait déjà s’aligner dans la course au fauteuil de chef de l’État.
« Salou Djibo pensait avoir conclu une sorte de pacte avec Issoufou, qu’il avait aidé en 2011 »
Selon nos informations, le jeune retraité, 55 ans depuis le 15 avril dernier, a un temps espéré obtenir les faveurs de Mahamadou Issoufou pour la prochaine élection. « Salou Djibo pensait avoir conclu une sorte de pacte avec Issoufou, qu’il avait aidé en 2011 », explique un proche de l’ex-putschiste. « Issoufou devait lui renvoyer l’ascenseur une fois effectué ses deux mandats ».
Mais Mahamadou Issoufou, contrairement aux rumeurs ayant circulé tout au long du début de l’année 2019, choisira de soutenir un autre aspirant à sa succession, son ministre de l’Intérieur, Mohamed Bazoum, président du Parti nigérien pour la démocratie et le socialisme (au pouvoir). Ainsi, en août 2019, alors que Bazoum était déjà en pré-campagne avec le soutien du président, Salou Djibo créait son propre parti, Paix Justice Progrès (PJP), dont son neveu, Mamadou Keïta Mamoudou, prenait la tête du bureau politique.
Un parti construit autour d’anciens de la transition
Officiellement en retrait, Salou Djibo plaçait Hamma Hamadou, un autre de ses proches, au poste de secrétaire général. Ancien directeur général des impôts et ami du général – ils sont natifs du même village de Namaro, dans la région de Tillabéry -, ce dernier faisait jusqu’au 28 juin figure de porte-parole de Salou Djibo.
Mais la campagne de l’ancien putschiste est désormais entrée dans une nouvelle phase. Désormais président du bureau politique et candidat pour la présidentielle, Djibo a nommé le 28 juin Hamma Hamadou à la tête des militants de la région de Niamey, l’une des plus stratégiques et des plus disputées. Son ex-ministre du Commerce, de l’Industrie et de la Promotion des jeunes entrepreneurs, Hamid Ahmed, devient le nouveau secrétaire général.
Enfin, l’ancien Premier ministre de la transition, Mahamadou Danda, devient quant à lui président d’honneur du PJP. Originaire de Tahoua, il aura fort à faire pour y rallier des électeurs, dans une région qui fait figure de fief du président Mahamadou Issoufou et de son ministre de la Défense, Issoufou Katambé.
Que peut espérer Salou Djibo ?
Quelle stratégie pour le nouveau candidat du PJP ? Lors de sa cérémonie d’investiture, le général était entouré du favori de la majorité présidentielle et du PNDS, Mohamed Bazoum, d’Ibrahim Yacouba, candidat pour la présidentielle du côté de l’opposition et du MPN Kishin Kassa, mais aussi des opposants Mahamane Ousmane et Seyni Oumarou.
« Djibo tente d’incarner une troisième voie », explique un politologue nigérien. « Il espère, d’une part, prendre des voix au PNDS en y séduisant les anti-Bazoum et, d’autre part, gagner du terrain sur le Moden Fa-Lumana d’Hama Amadou« , poursuit notre source. Mais le pari n’est pas gagné. « Tant que le président Issoufou soutient Mohamed Bazoum, le PNDS va rester uni », assure un cadre du parti au pouvoir.
« Même à Tillabéry, où il espère faire ses meilleurs scores, nous le battrons facilement », conclut ce responsable du PNDS. Au sein du parti du président, certains affirment même que la candidature de Salou Djibo pourrait être vue d’un bon œil du côté du pouvoir : « S’il prend des voix au Lumana, c’est le PNDS qui sortira gagnant ».
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