« Dix ans, ça suffit ! »

Publié le 17 juin 2003 Lecture : 2 minutes.

Illustre homme d’État du XXe siècle, Winston Churchill a laissé sa marque et quelques formules, dont celle-ci (que je transcris sous une forme plus accessible que celle qu’il a utilisée) : « La démocratie ? Un très mauvais système de gouvernement. Mais tous les autres sont pires. »
Churchill n’a pas défini la démocratie à laquelle il se réfère. Mais, en bon Britannique, il visait sans doute le gouvernement de la majorité dans le respect des droits des minorités.

Churchill est mort avant que le système démocratique ne parte à la conquête du monde : après être venue à bout de la féodalité, la démocratie a, au cours du XXe siècle, défait le fascisme, le nazisme et le communisme. Elle a occupé le champ de bataille laissé vide, devenant ainsi une idéologie universelle (à laquelle n’osent s’opposer que les islamistes, et encore, pas tous), le symbole du « politiquement correct ».

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On lui a accolé de nombreux critères : le suffrage universel, les droits de l’homme, dont, en particulier, celui de croire à ce que l’on veut ou de ne croire à rien, la libre circulation des personnes, des idées et des biens, le droit d’écrire et de lire, l’égalité entre les sexes, jusqu’à la liberté des moeurs la plus complète, etc.
Aussi nombreux soient-ils, ces critères ou caractéristiques ne font pas la démocratie, n’en rendent pas compte. Il arrive que tous (ou la plupart) soient réunis dans un pays sans qu’on puisse dire que la démocratie y règne.

J’ai cherché le signe auquel on reconnaît la démocratie achevée et crois l’avoir trouvé. Je le soumets, en tout cas, à votre examen critique : dans un pays vraiment démocratique, le chef de l’exécutif, qu’il soit président ou Premier ministre, peut difficilement se maintenir au pouvoir plus de douze ans. Lorsqu’il atteint quatorze ans, comme François Mitterrand, ou seize ans, comme Helmut Kohl, c’est un tour de force et cela peut être considéré comme l’exception qui confirme la règle. C’est d’ailleurs malsain, comme le montre l’exemple de ces deux cas exceptionnels.
Il est donc de règle, dans les pays où la démocratie est installée, que les électeurs se lassent au bout de dix à douze ans du pouvoir qu’ils ont mis en place par leur vote (« Dix ans, ça suffit ! »). Ils aspirent au changement, réclament l’alternance et l’obtiennent en se rendant aux urnes.
Le signe indiscutable auquel on reconnaît une démocratie vivante et saine est donc l’alternance rapprochée : dix, douze ou, au maximum, quatorze à quinze ans.

Lorsque l’alternance prend un rythme plus lent ou le visage d’une fausse alternance (le même parti envoie au pouvoir un candidat puis un autre), la démocratie est, à tout le moins, imparfaite.
Dans les cas où le chef de l’exécutif fait des pieds et des mains pour se maintenir au pouvoir vingt ans ou plus, on a quitté les rivages de la démocratie : le système a la couleur, l’odeur, et peut-être le goût, de la démocratie, mais ce n’est plus la démocratie.

Le continent africain compte une dizaine de présidents qui sont au pouvoir depuis plus de vingt ans, dont trois depuis plus de trente ans.
L’Europe : zéro.

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