« Comment ça va à Ramallah ? »

Publié le 18 juin 2003 Lecture : 2 minutes.

Lundi 2 juin. C’est la dernière semaine de cours. Jeudi soir, je suis en vacances ! À l’école, seuls les plus petits ont encore cours. Pour les autres, ce sont les examens. Lundi, pas d’examen de français au programme, donc journée plutôt cool. Je rentre chez moi en début d’après-midi. Des cours à préparer pour demain, papote au téléphone avec les copines sur notre éternel sujet de conversation : « C’est comment la situation chez toi ? » Et moi de raconter les mésaventures de mes collègues : trois d’entre eux sont de Jérusalem, mais ont le malheur de travailler à Ramallah, à 15 km de chez eux. Car depuis trois semaines, malgré une situation internationale qui semble s’améliorer un peu, ici, c’est de pire en pire : les check-points sont fermés, et chaque matin, depuis trois semaines, mes collègues courent d’un point de contrôle à l’autre pour tenter d’en trouver un ouvert. Ils finissent en général par passer par la montagne : quelques kilomètres de marche à travers les champs d’oliviers en se cachant des Jeep ! Tout ça pour venir enseigner… L’une est prof de maths pour les plus petits, un autre prof de langue arabe et le troisième prof d’histoire… J’ai assisté à un cours d’histoire dispensé aux élèves de première : Holocauste… Ben oui…

Bref, tout va bien et nulle part je ne vois d’amélioration. Bien sûr, je dois faire preuve de mauvaise volonté… Il y a une dizaine de jours, je suis allée rendre visite, le soir, à des amis qui habitent à un quart d’heure à pied de chez moi. Dîner, puis thé, puis café… Je les quitte finalement assez tard et décide, par pure paresse, de prendre un taxi. Il est environ 23 h 30. Une Jeep. Des soldats. L’un d’eux hurle en hébreu. Le chauffeur s’arrête, répond en arabe, langue que ne comprend pas le soldat… Pour ajouter à la cacophonie, je choisis de m’exprimer en français et je tends mon beau passeport. Faut quand même ouvrir le coffre, au cas où… On risque une chose, devenue banale ici depuis un an : la confiscation des clés de la voiture. Il semble que ce soit le nouveau jeu préféré des soldats de Tsahal. On confisque les clés, ou, variante, on les jette dans le caniveau. Bon, ils ne sont pas idiots, hein, les Palestiniens… Ils ont tous plusieurs doubles de clés sur eux ! On a de la chance, on repart, contents. Dix mètres plus loin, un autre taxi immobilisé, un autre soldat. Et puis un Palestinien, le chauffeur. Agenouillé devant la voiture, les mains liées dans le dos, les yeux bandés, un canon de fusil entre les omoplates… Le soleil décline lentement à l’horizon. Je vais faire des courses au supermarché du coin. Le check-point de Qalandia (qui permet d’entrer ou de sortir de Ramallah) est totalement bouclé en raison du couvre-feu. Des Jeep patrouillent à Ramallah en hurlant en arabe : « Mam’noou attajawwal ! » (« interdit de circuler »).
« Les Israéliens parlent de paix en anglais et font la guerre en hébreu. » C’est une phrase que j’entends souvent ici. Et que je comprends de mieux en mieux.

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