Les franchises débarquent

D’Yves Rocher à Carré blanc en passant par Jacques Dessange, de plus en plus d’enseignes étrangères s’installent dans le pays.

Publié le 16 mai 2005 Lecture : 3 minutes.

Pendant longtemps, les Algériens qui partaient à l’étranger passaient leurs vacances à faire du shopping. Entre vêtements de marque, cosmétiques et autres produits de luxe, la valise au retour était souvent pleine à craquer. Et pour cause : à Alger on ne trouvait pas de produits de marque, ou si peu, ou bien alors made in Taiwan – selon l’expression locale -, c’est-à-dire contrefaits. Mais depuis peu, les enseignes étrangères se multiplient à Alger. En 2003, Yves Rocher était l’un des premiers français à s’afficher en centre-ville. Avec l’entreprise algérienne BEDP chargée de la représentation exclusive et de la gestion du réseau de franchises du groupe, Yves Rocher a ouvert d’autres magasins. Onze d’entre eux vantent désormais la beauté « bio », dont cinq à Alger, deux à Oran, un à Tizi-Ouzou, Béjaïa, Sétif et Hassi Messaoud. Qu’importe si les tarifs sont sensiblement les mêmes qu’en France, la clientèle existe. À Alger, elle représenterait entre 4 000 et 6 000 personnes. Un chiffre qui a incité le groupe de coiffure et d’esthétique Dessange International à s’implanter dans la capitale. Il y a quelques semaines s’ouvrait ainsi dans le quartier d’El-Biar « le plus grand espace beauté d’Alger ».
« C’est une excellente chose, commente Hind Benmiloud. L’arrivée de vrais professionnels va changer l’image de l’Algérie. » Avocate d’affaires, Hind Benmiloud est aussi une franchisée convaincue. C’est elle qui a géré le projet d’implantation de Carré blanc, une première dans le domaine textile en Algérie. « J’ai choisi délibérément Carré blanc parce que la politique du groupe en matière de franchise est particulière, poursuit Hind Benmiloud. Il n’y a pas de royalties. Les marges se font sur le prix d’achat. » Voilà qui règle le problème majeur du franchiseur, à savoir le transfert des royalties. En Algérie, ce transfert est soumis à la réglementation des changes, qui ne permet qu’un transfert limité. « La réglementation de la Banque d’Algérie, en date de 1995, requiert l’accord de la Banque », explique Jean-Pierre Andrieux, avocat associé à CMS Bureau Francis Lefebvre, l’un des premiers cabinets d’affaires en France spécialisé dans la consultation, le conseil, la négociation et la défense des entreprises. « Il faut déposer un dossier auprès d’une banque primaire qui le transmet à la Banque centrale. C’est cette dernière qui décide si elle autorise ou non les transferts. » Or, dans la plupart des cas, la réponse est négative. À en croire Ali Touati, vice-gouverneur de la Banque d’Algérie qui répondait à des hommes d’affaires du Medef (Mouvement des entreprises de France) en déplacement à Alger en février dernier, l’Algérie accepterait plus volontiers les transferts qui concernent les contrats d’assistance technique que ceux des redevances de marques. « Le problème des royalties est temporaire, estime Hind Benmiloud. Étant donné le nombre de conventions qui lient l’Algérie à d’autres partenaires économiques, et notamment la France, cela va changer. Les verrous vont complètement sauter, surtout si l’Algérie adhère à l’OMC d’ici à la fin de l’année. » En attendant, il n’existe pas de cadre juridique précis relatif à la franchise. Un simple contrat entre les deux parties suffit. Mais devant la multiplication des enseignes étrangères, le gouvernement algérien cherche à établir une loi qui régisse spécifiquement la franchise, en tenant compte des freins à l’investissement. « L’autre problème, d’ordre fiscal, est moindre, mais significatif, poursuit Jean-Pierre Andrieux. Il concerne les redevances de franchise ou d’assistance technique qui sont imposées à la source, de 24 %. Cela représente un coût non négligeable. Quand on sait que toute entreprise qui démarre est fragile, cette retenue à la source pèse sur le franchisé. »
Reste que la franchise a encore de beaux jours devant elle. Après le groupe de restauration Flo qui vient de s’installer à Alger avec un premier restaurant Hippopotamus, Celio devrait ouvrir un magasin en juin prochain dans le nouveau quartier de Sidi Yahia, bientôt suivi par Geneviève Lethu. D’autres enseignes étrangères sont sur les rangs, comme Speedy ou encore les cosmétiques Laroche-Posay, dont l’arrivée est prévue sur le marché en septembre prochain. « Nombre de franchiseurs s’intéressent à l’Algérie, conclut Jean-Pierre Andrieux. De la même manière, nombre d’entreprises algériennes s’intéressent à la franchise. Au travers de mes contacts professionnels, je sens le même besoin de développer cette formule. C’est un élément non négligeable dans les relations économiques entre la France et l’Algérie, d’autant que les types de consommation sont proches. » De là à voir s’ouvrir un – vrai – magasin Louis Vuitton rue Didouche-Mourad…

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