A l’heure du choix

Six hommes sont en lice pour succéder à Omar Kabbaj. Revue de détail.

Publié le 16 mai 2005 Lecture : 5 minutes.

Les six candidats en lice et leurs états-majors ne chôment pas en cette fin de campagne électorale pour rallier les derniers soutiens. Mais le suspense tire à sa fin… Le 19 mai au plus tard, on devrait connaître le nom du septième président de la BAD à l’issue de l’assemblée annuelle de l’institution, à Abuja. Revue des candidats en présence, de leurs soutiens présumés et de leurs ambitions.

Kingsley Y. Amoako
Le poulain de Kufuor
Secrétaire exécutif de la Commission économique des Nations unies pour l’Afrique (CEA), un poste qu’il occupe depuis 1995, le Ghanéen Kingsley Y. Amoako jouit d’une forte expérience. Né en 1944 à Accra, d’un père fonctionnaire, Amoako a poursuivi un cursus économique à l’université de Legon, au Ghana, puis à la prestigieuse faculté de Berkeley, en Californie. Avant d’intégrer la Banque mondiale et d’y faire une carrière de vingt ans. John Kufuor, le président ghanéen, a fortement soutenu la candidature de son poulain en sollicitant l’appui de ses pairs. Amoako est parrainé par trois pays africains (Zambie, Éthiopie et Ouganda) et bénéficierait du soutien de plusieurs autres États actionnaires (Royaume-Uni, Canada, Algérie, Égypte, Afrique du Sud). Il souhaite faire de la BAD la première institution financière du continent et inscrire au rang de ses priorités le développement des petites et moyennes entreprises. Handicap : Amoako ne maîtrise pas le français, et deux ressortissants ouest-africains ont déjà occupé le poste de président de la BAD.

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Donald Kaberuka
Un spécialiste des marchés
À 53 ans, Donald Kaberuka, ministre rwandais des Finances et de la Planification économique depuis 1997, a remis son pays sur les rails de la croissance à la faveur d’importantes réformes économiques. Également coprésident du comité ministériel des pays pauvres très endettés (PPTE), il bénéficie d’une bonne image auprès des grands argentiers africains. Né à Biyumba, dans le nord du Rwanda, il n’a que 8 ans lorsqu’il prend le chemin de l’exil avec ses parents. Direction : l’Ouganda, puis la Tanzanie. Après un doctorat d’économie à la faculté de Glasgow, il entame une carrière d’enseignant-chercheur à l’université de Sussex, au Royaume-Uni. Puis fait ses armes à la Bourse de Londres (Liffe) et à la Lloyds Bank, avant de rejoindre l’Organisation interafricaine du café (OIAC) à Abidjan, en 1987. Ce spécialiste des matières premières souhaite donner un nouveau souffle à la BAD en diversifiant les actions et en décentralisant les pouvoirs, sans mobiliser davantage de cofinancements. Il est parrainé par le Kenya et les Seychelles, et bénéficierait notamment du soutien de la Libye, des États-Unis, de la Suède, de la Belgique, des Pays Bas et du Japon. « Kaberuka apparaît comme un outsider sérieux… même si l’hostilité de certains pays comme la République démocratique du Congo constitue un handicap », estime le bimensuel Construire l’Afrique, de Cheick Ousmane Diallo.

Olabisi Ogunjobi
L’homme du sérail
Le Nigérian Olabisi Ogunjobi, vice-président de la BAD chargé de la microfinance et des opérations de la Banque en Afrique centrale et occidentale, dispose de plusieurs atouts : le « poids électoral » de son pays (8,98 % des droits de vote), le soutien actif du président Olusegun Obasanjo, le parrainage de cinq pays (Sénégal, Bénin, Sierra Leone, Mauritanie et Gambie) et, enfin, la tenue de l’élection au Nigeria même, à Abuja. Mais il pourrait être pénalisé par les nombreux lièvres après lesquels court le chef de l’État nigérian, qui désire notamment obtenir un poste de représentant de l’Afrique au sein du Conseil de paix et de sécurité des Nations unies. Âgé de 58 ans, marié et père de trois enfants, Olabisi Ogunjobi est titulaire d’un master en développement international de l’université de Bradford, au Royaume-Uni. Il a occupé le poste d’économiste à la Banque centrale du Nigeria avant de rejoindre la BAD en 1978 au sein de laquelle il fera carrière, ce qui ne constitue pas forcément un avantage. La mauvaise image laissée par l’ancien président de la Banque, Babacar Ndiaye, qui a fait toute sa carrière au sein de l’institution, est encore dans tous les esprits. Par ailleurs, le Nigeria – selon un accord non écrit – occupe un poste de vice-présidence de la BAD depuis 1964, un privilège que le pays perdrait une fois admis à la présidence.

Theodore F. Nkodo
Pragmatisme et continuité
Docteur en économie, le Camerounais Theodore Nkodo intègre la Banque mondiale comme « jeune professionnel » en janvier 1971, à 26 ans tout juste. Il y grimpera progressivement les échelons et occupera diverses fonctions de chef de division. En janvier 1997, il rejoint la BAD comme directeur général des projets. Nommé vice-président en janvier 2002, Nkodo décide, en février 2005, de briguer la succession de Kabbaj… Un pari ambitieux pour celui qui se veut le continuateur des réformes et le garant de l’intégrité financière de l’institution. D’autant qu’il n’est parrainé que par le Burundi et qu’il pourrait être handicapé par son expérience politique limitée (lire aussi pp. 110-112).

Casimir Oyé Mba
Le francophone
Casimir Oyé Mba, ministre gabonais de la Planification et de la Programmation du développement, est le candidat d’Omar Bongo Ondimba. Il est parrainé par le Congo-Brazzaville, le Cap-Vert, le Burkina, l’Angola, la Guinée-Bissau et le Maroc. Et bénéficierait notamment du soutien de la Côte d’Ivoire, du Mali, de la France, de la Tunisie, de la Libye et de l’Algérie. Âgé de 63 ans, Oyé Mba est marié et père de six enfants. Licencié en droit et en économie à l’université française de Rennes, il a effectué l’essentiel de sa carrière en Afrique centrale. Il a été Premier ministre du Gabon et a dirigé la Banque des États de l’Afrique centrale (BEAC). Malgré son brillant parcours, Oyé Mba part avec un léger handicap : il travaille essentiellement en français, alors que l’anglais est désormais la langue la plus utilisée au sein de la BAD et celle des milieux des affaires et de la finance.

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Simba Makoni
Double handicap
Simba Herbert Stanley Makoni, 55 ans, docteur en chimie, ancien ministre des Finances du Zimbabwe, a peu de chances d’accéder à la présidence de la BAD, même s’il bénéficie du parrainage de plusieurs États membres de la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC). D’abord parce que son pays figure sur la liste des six « avant-postes de la tyrannie » dénoncés par les États-Unis. Ensuite parce que lui-même fait partie des hiérarques du régime de Robert Mugabe frappés de sanctions par l’Union européenne, depuis février 2002. Il lui est notamment interdit de voyager à l’étranger. Comment, dans ces conditions, prétendre diriger la BAD ? En 1980, il est élu député de la première Assemblée nationale. En 1993, il se voit confier le poste de PDG d’un groupe de presse et d’édition. En 2000, il rejoint le gouvernement comme ministre des Finances, puis crée, en 2002, sa propre agence de consultants, qui opère dans différents pays d’Afrique australe.

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