Le défi de l’eau
Pour faire face au manque de ressources, le Sud a entrepris de vastes travaux d’assainissement.
Le plan d’autonomie du Sahara occidental est la grande affaire du moment : élaboré par le Conseil royal consultatif pour les affaires sahariennes (Corcas), ses détails seront dévoilés dans le courant du mois devant le Conseil de sécurité des Nations unies. Les provinces du Sud, stratégiques pour le Maroc, sont l’objet de toutes les attentions. Politiques, bien sûr, mais aussi économiques, sociales et environnementales. C’est le champ d’intervention de l’Agence du Sud (Agence pour la promotion et le développement économique et social des provinces du Sud), structure créée par Mohammed VI pour aménager de façon concertée les régions méridionales du royaume, qui font l’objet d’un contentieux territorial avec les Sahraouis du Front Polisario. « Les défis à relever sont immenses. Mais, compte tenu des contraintes du milieu, nous sommes, plus que d’autres, obligés de marcher sur des ufs, explique Ahmed Hajji, son directeur. Car l’écosystème est fragile, tant sur la bande littorale que dans les zones oasiennes. En outre, sous l’influence des mutations qu’il a connues ces dernières années, il se dégrade rapidement. La région, désertique, connaît un déficit structurel en eau. Aussi avons-nous fait de l’assainissement et de la réutilisation des eaux usées notre priorité. »
L’agence s’est dotée d’un schéma directeur pour l’assainissement liquide financé par une enveloppe de 320 millions de DH (2,8 millions d’euros). Les travaux, concernant les villes de Dakhla, Laâyoune, Boujdour, Assa et Zag, initialement prévus pour se dérouler sur deux ans et demi, accusent un léger retard et dureront probablement quatre ans. Principale difficulté rencontrée : l’acheminement des hommes et du matériel dans des zones enclavées.
« L’assainissement en milieu désertique constitue, à bien des égards, une expérience pionnière, note Ahmed Hajji. Nous n’avons pas véritablement d’exemples des pratiques à suivre. » Il était cependant urgent de s’attaquer au problème. À Laâyoune, ville qui a connu une croissance vigoureuse mais anarchique au cours des dix dernières années, les eaux usées étaient en effet déversées directement dans le lit de l’oued (rivière), alors qu’à Dakhla, le réseau existant débouchait dans la baie. Une politique globale de l’assainissement consistant en une réhabilitation et une extension du réseau d’évacuation des eaux usées a été mise en place dans la capitale et dans les principales villes du Sud. Ce qui n’est pas allé sans provoquer quelques grincements de dents du côté de certains élus locaux, qui estiment ce choix « politiquement improductif », car pas assez « visible », et auraient préféré que l’agence se concentre en priorité sur les questions d’habitat. Du côté des responsables, on assume ce choix, inscrit dans une logique de développement durable.
Le déficit de la ressource hydrique – contenue dans des nappes phréatiques et fossiles – constitue l’autre caractéristique des écosystèmes sahariens. Le dessalement d’eau de mer, une technique bien maîtrisée, est une alternative efficace au pompage. Elle est de surcroît très adaptée, car le régime des vents très soutenu permet d’avoir recours à l’énergie éolienne, nettement moins onéreuse que les hydrocarbures. C’est dans cette voie que se sont engagées les autorités, qui ont mis en place plusieurs unités le long de la côte. À Laâyoune, les techniques de dessalement pourvoient déjà aux deux tiers de la consommation urbaine en eau. La nappe de Foum el-Oued, dont le niveau avait commencé à baisser dangereusement après la construction, en 1995, d’un barrage en amont de l’oued Sakia El Hamra (avec une retenue de 110 millions de m3), devrait bientôt retrouver son étiage d’antan, grâce à la construction d’un canal pour le transfert des eaux du barrage. Son coût est estimé à 60 millions de DH. Doté d’un débit de 5 m3 par seconde, cet ouvrage de 9 kilomètres devrait permettre l’acheminement par gravitation de l’eau stockée dans le barrage vers l’aval, dans la zone d’infiltration et d’alimentation de la nappe de Foum el-Oued. Les travaux devraient prendre fin d’ici à un an et demi.
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