Le bois se meurt

La destruction progressive du poumon vert menace la biodiversité du pays, pourtant l’une des plus riches du Bassin méditerranéen.

Publié le 16 avril 2007 Lecture : 2 minutes.

Les écologistes crient au loup. Dans un avenir proche, la forêt marocaine pourrait ne plus être qu’un lointain souvenir. Entre 1969 et 2003, l’arganeraie, un écosystème qui n’existe qu’au Mexique et au Maroc, s’est réduit de plus de 4 000 hectares. Même constat pour le thuya, le cèdre ou le chêne-liège, dont la surface a régressé de 40 000 hectares (ha) au cours des quarante dernières années. Au total, l’équivalent de 31 000 ha de forêt, sur les 9 millions recensés dans le royaume (12 % de la superficie du territoire national), disparaît tous les ans. Si bien que 93 % des terres du Maroc sont concernées – à des degrés divers – par la désertification !
Les conséquences sont dramatiques. Outre l’éradication progressive du « poumon vert » marocain qui permet d’absorber une partie des gaz à effet de serre, la destruction de la forêt favorise l’érosion, perturbe le cycle de l’eau et appauvrit la biodiversité. Lessivés par les pluies, les sols perdent en stabilité et en fertilité, les barrages s’envasent, les nappes phréatiques se rechargent de moins en moins, et certaines espèces animales et végétales s’éteignent. Ces dernières décennies, la panthère tachetée, le singe magot de Barbarie, la truite de Pallary et l’oryx algazelle, pour ne citer qu’eux, auraient disparu ou seraient en voie d’extinction. Un véritable « écocide », « une richesse incommensurable qui se perd à tout jamais ! » se désolaient les membres du Groupe d’étude et de recherches des écologistes sahariens (Geres), lors de la création de leur association en 2004. Avec 39 écosystèmes et 4 500 espèces de plantes et de vertébrés identifiées, dont 20 % sont endémiques, le Maroc est, en effet, le deuxième pays méditerranéen le plus riche par sa biodiversité, derrière la Turquie.
La sauvegarde de ce patrimoine nécessite de mettre un terme à différentes pratiques : les abus du droit d’usage et la surcharge pastorale, notamment, « trois à cinq fois supérieure à ce que peut aujourd’hui supporter la forêt », affirme le docteur Abdeladim Lhafi, haut-commissaire aux Eaux et Forêts et à la Lutte contre la désertification. « Aujourd’hui, dès qu’un orage se déclenche, tous les troupeaux convergent sur une même zone de pâturage », explique-t-il. Coupe illégale de bois de feu, défrichements et mises en culture ou en pâture non autorisés, incendies non maîtrisés : près de 29 000 délits sont constatés chaque année dans les sous-bois ou à proximité. Au total, le coût global que constitue la dégradation de la forêt est estimé à 2,9 milliards de dirhams par an (environ 170 millions d’euros).
Plusieurs programmes ont été mis en place pour tenter de mettre un terme à la déforestation : reboisement (de l’ordre de 37 000 ha/an), programmes maison-énergie et bois-énergie (voir pp. 62-63), réintroduction d’espèces, développement des sources de revenus alternatives à l’élevage, sécurisation du domaine forestier par délimitation de parcelles protégées, aménagement des bassins versants… Pas moins de 152 sites d’intérêt biologique et écologique couvrant 2,5 millions d’ha ont par ailleurs été identifiés. Parmi eux, 10 ont été déclarés parcs nationaux, et 24 classés « Ramsar », du nom du traité international pour la sauvegarde des zones humides présentant une grande richesse écologique.

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