Fantômes de Lions

Publié le 16 février 2004 Lecture : 2 minutes.

Le Sénégal avait été la révélation de la Coupe du Monde 2002. La bande à Bruno Metsu (le charismatique et chevelu entraîneur des Lions de la Téranga) était parvenue à se hisser en quarts de finale. Les joueurs, par leur talent et leur générosité sur le terrain, leur gentillesse et leur sens de la fête en dehors, avaient enchanté la terre entière. Ils étaient devenus, à l’égal des Camerounais, les symboles et porte-drapeaux du continent. On peut passer au travers d’un match, et même d’une compétition. Le 7 février 2004, en quarts de finale, les coéquipiers d’El-Hadji Diouf ont chuté contre la Tunisie. Ces choses-là arrivent. C’est le sport. Mais les débordements auxquels cette partie a donné lieu n’ont en revanche qu’un rapport très lointain avec le sport. Graves dans l’absolu, ils le sont plus encore quand la responsabilité première en incombe à ceux qui avaient été et se devaient d’être les ambassadeurs du football africain.

Le match, jusque-là disputé mais correct, a basculé à la 65e minute, après l’ouverture du score pour la Tunisie. Diouf, qui pinaillait déjà depuis un moment et s’épuisait à faire de grands gestes au lieu de se replier et d’aider à défendre, s’est alors précipité vers l’arbitre, pour le molester. Le banc sénégalais s’est levé comme un seul homme pour protester, une énorme échauffourée a éclaté, et la partie a été interrompue de longues minutes. L’arbitre émirati, Ali Busjaim, dépassé par les événements, n’a pas osé sévir et adresser à Diouf le carton rouge qui aurait immédiatement calmé les esprits. Et, dans un stade noyé sous le brouillard, plus par la faute d’un phénomène météo très inhabituel que par celle des quelques fumigènes balancés sur le terrain par des énergumènes, on a vu les gestes d’une violence et d’une vulgarité invraisemblables se multiplier. Diouf, disjoncté, littéralement « à côté de ses pompes », provoquait incident sur incident, imité notamment par Pape Bouba Diop. Le sympathique héros du 31 mai 2002, buteur providentiel contre la France, avait-il vraiment besoin d’aller insulter le banc tunisien, bousculer Nabil Maâloul, l’entraîneur adjoint des « Rouge et blanc », ou encore agresser Santos au moment où ce dernier quittait le terrain pour être remplacé ?
Les Sénégalais ont raté leur sortie. Incapables de jouer sur leur valeur, ils ont tenté de masquer par leurs outrances des lacunes criantes sur le terrain. Privés de leur stratège Khalilou Fadiga, convalescent, et orphelins de Bruno Metsu, leur inclassable coach, parti monnayer ses talents aux Émirats, ils ont été l’ombre d’eux-mêmes. Ironie de l’histoire, les Lions de la Téranga ont péché par suffisance, comme les Français en 2002, parce qu’ils n’ont pas su se remettre en question à temps. Et aussi parce que leur entraîneur actuel, Guy Stephan, bien qu’il ne soit pas seul responsable de ce naufrage, n’a pas su trancher dans le vif, et écarter, ne serait-ce que momentanément, des joueurs comme Diouf, qui ont plus desservi le collectif qu’autre chose…

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