Remaniement dans l’armée en RDC : Sylvestre Ilunga demande des explications à Félix Tshisekedi

Le Premier ministre congolais affirme que les ordonnances présidentielles portant sur les remaniements au sein de l’armée, notamment la mise à l’écart du général John Numbi, auraient dû être cosignées par lui. Une nouvelle montée de tension au sein de la coalition au pouvoir.

Le Premier ministre congolais, Sylvestre Ilunga, avec le président Félix Tshisekedi. © Présidence RDC

Le Premier ministre congolais, Sylvestre Ilunga, avec le président Félix Tshisekedi. © Présidence RDC

Publié le 22 juillet 2020 Lecture : 3 minutes.

Sylvestre Ilunga a sollicité mardi une rencontre avec Félix Tshisekedi pour « tirer au clair » ce qu’il qualifie de « situation préoccupante ». Le Premier ministre congolais affirme dans un communiqué avoir pris connaissance « à sa grande surprise » des ordonnances présidentielles portant sur les nominations au sein de l’armée rendues publiques vendredi.

Le chef du gouvernement, qui était ce jour-là en déplacement à Lubumbashi, explique que ces ordonnances ont été contresignées par le vice-premier ministre, ministre de l’Intérieur, Gilbert Kankonde Malamba, qui assurait son intérim, alors que cela « relève de la compétence exclusive attachée à la qualité du Premier ministre ».

la suite après cette publicité

Bras de fer FCC-Cach

Sylvestre Ilunga insiste en outre sur le fait que son contreseing constitue « le gage de l’équilibre des pouvoirs entre le président de la République et le Premier ministre, qui est l’émanation de l’Assemblée nationale ».

En filigrane de cette prise de distance publique inédite du Premier ministre vis-à-vis d’une décision présidentielle, le bras de fer entre le Front commun pour le Congo (FCC, de Joseph Kabila) et la Coalition pour le changement (Cach, de Félix Tshisekedi) : Sylvestre Ilunga, issu du FCC, remet en effet en cause la légitimité de la signature de Gilbert Kankonde Malamba, qui est, lui, issu de l‘UDPS (le parti de Tshisekedi, membre du Cach).

La direction du FCC a d’ailleurs enfoncé le clou, dans un communiqué publié dans la foulée de celui du Premier ministre congolais, dans lequel elle estime que le ministre de l’Intérieur aurait dû se contenter du « traitement des affaires courantes et non à la signature des actes de haute portée juridique ». « Le FCC en déduit que les projets de ces ordonnances étaient préparés plusieurs mois plus tôt, et qu’aucune urgence ne justifiait le contreseing d’un intérimaire non habilité ».

Numbi dénonce sa mise à l’écart

Le large remaniement au sein de l’armée, qui a été rendu public sur la chaîne national vendredi dernier, a notamment débouché sur la mise à l’écart du général John Numbi. Très controversé, le gradé est notamment suspecté d’avoir joué un rôle dans l’assassinat, en juin 2010, de Floribert Chebeya, l’ancien président de l’ONG La Voix des sans-voix, ainsi que de son chauffeur, Fidèle Bazana.

la suite après cette publicité

Depuis sa mise à l’écart, ce fidèle de Joseph Kabila refuse de quitter son bastion du Katanga et de rentrer à Kinshasa. Mardi, il a reçu la visite d’une délégation de notables katangais proches du FCC,  conduite par l’ancien gouverneur du Haut-Katanga, Jean-Claude Kazembe, membre du Parti pour la reconstruction et la démocratie (PPRD, le parti de Kabila). John Numbi a profité de l’occasion pour protester de sa « loyauté », affirmant avoir « joué un rôle important dans la passation pacifique du pouvoir ».

« Je suis victime d’une chose : ma manière de faire correctement mon travail », a-t-il. « Le président Félix Tshisekedi n’a pas arrêté, dans toutes les réunions, de dire qu’il compte sur la rigueur légendaire du général John Numbi. Cela a créé des ennemis, des jaloux », a-t-il déclaré, estimant que sa mise à l’écart était le fruit de « fausses  accusations ».

la suite après cette publicité

Washington réclamait de longue date la mise à l’écart de ce général placé sous sanctions américaines et européennes depuis 2016. Si il a été remplacé à son poste d’inspecteur général des FARDC, les forces armées congolaises, par Gabriel Amisi, dit « Tango Four », un autre officier sous sanctions, son éviction a été saluée par Tibor Nagy, l’assistant du secrétaire d’Etat pour les Affaires africaines, qui y voit « l’engagement du président Tshisekedi pour l’amélioration des droits de l’homme et la professionnalisation des forces armées congolaises. »

La Matinale.

Chaque matin, recevez les 10 informations clés de l’actualité africaine.

Image

La rédaction vous recommande

Contenus partenaires