Le hijab est-il islamique ?

Publié le 17 janvier 2006 Lecture : 2 minutes.

La Tunisie, qui a donné naissance, dès le milieu du XIXe siècle, à une lignée de penseurs réformistes (Khaïreddine Pacha, Ali Bach-Hamba, Tahar Haddad, Abdelaziz Thâalbi, Habib Bourguiba…), peut s’enorgueillir de posséder aujourd’hui une véritable école de pensée islamique moderne. Mohamed Talbi, qui écrit souvent dans ces colonnes, est l’un de ses plus illustres représentants. On citera aussi Hichem Djaït, Abdelmajid Charfi, H’mida Ennaïfer, Iyadh Ben Achour, Mohamed Charfi, Sadok Belaïd, Abou Yaâroub Marzouki ou encore Youssef Seddik.
À cette liste, il faut ajouter un groupe de femmes qui commencent à faire parler d’elles: Iqbal Gharbi, Mongia Souayhi, Raja Ben Slama et Amel Grami. Historiennes ou arabisantes spécialisées dans les études islamiques, elles publient depuis quelques années ouvrages et articles (en arabe) où elles proposent une relecture, souvent très audacieuse, de l’histoire de l’islam et de ses textes fondateurs (Coran et hadith, tradition du Prophète). Leurs écrits leur valent le respect des intellectuels progressistes et libéraux et la foudre des fondamentalistes.
À propos du hijab, ces jeunes universitaires sont unanimes : il n’a jamais constitué une obligation religieuse, surtout durant les premières années de l’islam. Le Prophète, qui recevait indifféremment hommes et femmes, n’a jamais exigé des secondes qu’elles se voilent le visage. Il n’a jamais caché non plus ses épouses au regard des visiteurs, qui étaient nombreux à se rendre chez lui, du moins durant les cinq premières années de l’Hégire.
Quant aux versets coraniques où il est question du hijab, il convient de les situer dans leur contexte. Dans les sourates al-Nour (« Lumière ») et al-Ahzab (« Factions »), le hijab est conseillé aux femmes libres, quand elles sortent dans la rue, afin qu’on puisse les distinguer des esclaves. Ces dernières ayant pris l’habitude de porter le voile elles aussi, par coquetterie ou pour passer pour des femmes libres, le calife Omar al-Khattab a dû le leur interdire de manière formelle. Si le port du voile était une obligation islamique, le Commandeur des croyants ne l’aurait pas interdit à des musulmanes, fussent-elles de modeste condition.
Dans un autre verset de la sourate al-Ahzab, le hijab a une autre signification. C’est une sorte de séparation (ou de rideau) derrière lequel le Prophète s’est résigné – sur le conseil du même Omar al-Khattab – à cacher ses épouses, afin qu’elle puissent recevoir les gens des deux sexes sans se mélanger à (ou être vues par) eux.
Ce n’est que longtemps après la mort du Prophète que les fouqaha (théologiens, jurisconsultes) ont fait du port du voile une obligation pour les musulmanes. Mais seules les citadines ont respecté l’injonction, et encore, alors que les Bédouines ont continué à sortir le visage découvert.

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